Ultimate Revelation [Elsa]

Elle l'aime. Comme une dingue, dit-elle. Pour rien au monde elle ne pourrait se passer de lui. Même pas pour de la Häagen-Dazs aux cookies. Mais ça, elle ne le dit pas. Ses lèvres douces se posent dans le cou du jeune homme. Éternellement jeune. Quel rêve. C'est le cas de le dire. Sa main tiède caresse son torse, sous son tee-shirt. C'est marrant, parce qu'elle porte le même que lui. Exit, les chemises à carreaux. Pouf, comme ça. Leurs doigts se lient, elle fait un bond et se redresse, entrainant le blond avec elle. La petite brune a envie de courir sous la pluie. Alors, c'est ce qu'ils font, puisque tel est son désir. Elle seule décide ce qu'il se passe dans ses rêves.

Ils courent, ils courent à travers cette clairière parsemée de fleurs des champs. Leurs souffles se mêlent au vent qui leur caresse doucement le visage et s'engouffre dans leurs cheveux virevoltants. Quand elle n'en peut plus de courir, ils se laissent tous les deux tomber au sol, roulant l'un sur l'autre en riant. Leurs joues sont colorées par l'effort qu'ils viennent de fournir. Leurs cœurs battent à l'unisson. Du moins, elle a cette impression. Au dessus de lui, elle l'observe. Ses cheveux bruns encadrent son si joli visage. Ils rient, tous les deux.

▬ C'était marrant, hein ?

▬ Oui, beaucoup !, répond-t-il, aux anges.

Ses bras enserrent la taille de la jeune femme, qui pose sa joue contre son torse. Elle voudrait entendre le "boum boum" caractéristique d'un cœur qui bat. Ah ! Oui, ça y est. Il bat la chamade, ce cœur. C'est plutôt marrant. Comme si, après tout ce temps, il n'était pas habitué à la présence de la jeune fille. Et c'est le cas. Elle le fait fondre, être en sa compagnie, c'est toujours une folle aventure. Alors, il se sent un peu stressé. Et heureux. Il a peur de la perdre, à nouveau. Il ne veut pas qu'elle le quitte, même si c'est inévitable. Heureusement, il sait qu'elle reviendra. Elle revient toujours. Sans elle, le temps semble long. Mais Elsa ne l'oubliera pas.

▬ Qu'est-ce que tu veux faire, maintenant ? La voiture est là, on peut aller rouler sur le Lac.

Son bras se tend, index en avant. Il pointe une grosse jeep, non loin d'eux. Bien sûr, elle est là depuis le début. Il plante alors ses grands yeux rieurs dans ceux de son amoureuse. Il aimerait bien rouler sur le lac, ça doit être vraiment rigolo. Le nez de la jeune femme n'est pas loin. Sa tête blonde se soulève, et il y pose un baiser furtif. Un bisou qui pète. Il disait ça, avant. Il y a bien longtemps. Quand il avait l'âge de Wyatt. Wyatt... Quand est-ce qu'il viendra le voir, Wyatt ? Bientôt, espère-t-il.

Le pays des rêves est en ce sens merveilleux : on peut tout y voir, tout y entendre, tout y vivre. Rien n'est impossible.

Le ciel est rose ou vert, selon votre convenance. Les pâquerettes vous content fleurette si tel est votre désir. Les iguanes flirtent avec les vaches, les chevaux avec les éléphants. La gravité peut vous sembler tour à tour inexistante ou exagérément pesante. Votre enveloppe charnelle peut se révéler aussi libre et légère qu'une hirondelle. Les ennemis de la vie réelle y viennent pour vous présenter leurs plus plates excuses, les amis vous y rejoignent pour d'autres aventures palpitantes, le garçon ou la fille qui vous plait vous embrasse et vous dit qu'il vous aime...

Oui, dans les rêves, rien n'est impossible.

Pas même faire revivre les morts.

Elsa ne le sait pas, quand elle rêve, mais Chase Turner n'est plus de ce monde. Voilà pourquoi elle s'enferme dans la douce euphorie que lui procurent ces hallucinations.

Quand elle rêve, Chase est bel et bien en vie. Il se tient debout, face à elle, dans cette clairière où elle aurait tant aimé qu'il l'emmène un jour. Un sourire épanouit adoucit son visage. Ses yeux rieurs retrouvent toute leur vitalité, toute leur énergie. Elle a la sensation de sa peau sur la sienne, de leurs doigts qui se lient, des fins cheveux blonds entre ses doigts...

Quand elle rêve, Chase est à mille lieux de ce qu'a été son enveloppe charnelle, après la noyade. Il est en vie. Tout simplement.

• • •

Doucement, les cheveux blonds du jeune homme se plaquent sur son front, à l'instar de ceux de son amie, collés à ses joues rosies par le plaisir qu'elle a d'être en sa compagnie. Il lui sourit, angélique. Sa voix résonne comme un doux murmure, si proche et à la fois si lointain.

▬ Tu as raison, il pleut... Mais je m'en moque. Si c'est pour être avec toi, j'affronterai les pires tempêtes, les ouragans et les tsunamis. C'est pas une petite pluie comme ça qui va nous effrayer, pas vrai ?

A nouveau, un sourire. Sa main douce caresse la joue de la petite brune, tandis que ses yeux couleur océan se perdent dans l'étendue de ceux d'Elsa. A les regarder, ainsi tous les deux, sous la pluie, l'évidence frappe : Ils s'aiment, ils se sont toujours aimés. Leur relation comporte des hauts et des bas, mais elle est solide. Rien ne peut les séparer. Surtout pas une petite pluie. Après tout, ce ne sont jamais que quelques gouttes d'eau. Rassemblées, elles forment à peine un filet d'eau. Il se mue en cours d'eau, puis en rivière... Et toutes les gouttes, si infimes qu'elles soient, qui s'y rajoutent, aident à la formation d'une belle et grande mer. Mais là à nouveau, ce n'est pas quelques gouttes d'eau qui pourront les séparer. Leur amour est plus fort que ça.

Doucement, le blond se penche en avant. Il ne veut pas brusquer sa jeune amie, qu'il sait fragile et un peu timide. Il attend quelques secondes, sans la quitter des yeux. Le feu vert lui est accordé d'un regard, et il pose doucement ses lèvres sur les siennes.

L'étreinte est douce, aérienne, sensuelle. Ses mains d'homme attirent à lui le corps frêle de la jolie brune. Il ne veut pas la sentir trop loin de lui. Sa présence est nécessaire à sa survie. Car sans elle... il n'est plus qu'un souvenir. De sa main droite, il lui caresse lentement le dos, la gauche s'étant nichée dans le cou parfumé de l'élue de son cœur. Leurs lèvres se jouent encore l'une de l'autre, se taquinent longuement et inlassablement. Doucement, leur baiser prend fin. Il ne la lâche pas pour la cause. Il aime la sentir contre lui, dans ses bras. Elle est si réelle que c'en est troublant.

▬ Elsa... J'aimerais que tu restes avec moi pour toujours... J'aimerais que cette clairière soit notre refuge à nous, éternellement. Je t'aime, tu sais... Tellement que c'en est douloureux.

Douloureux... Douloureux...

• • •

Oui, le pays des rêves est décidément un endroit magique.

Malheureusement, quand vient l'heure de le quitter, l'illusion s'efface. Les couleurs initiales reprennent leur place, les animaux et les fleurs cessent de parler, les éléphants ne se lient plus d'amitié avec les chevaux, encore moins avec les girafes. Nos ennemis le redeviennent, plus hargneux que la veille. Heureusement, nos amis, eux, sont toujours là, si tant est qu'ils ne soient pas imaginaires... Et les morts, dans tout ça ?

Et bien, lors de cet inévitable retour à la réalité...

L'absence des défunts se fait encore plus cruellement ressentir.

BAM !

Retour à la réalité.

Quelle heure pouvait-il bien être ?

Lentement, la jeune fille ouvrit les yeux.

Un rêve.

Tout ceci n'était qu'un rêve.








Cela fait maintenant trois semaines que Chase est mort.

C'est si long et si court à la fois, trois semaines.

...

Assis sur mon petit nuage, je l'observe. Ni les murs, ni les toits, ni la nuit ne pourront plus jamais m'empêcher de veiller sur elle, de là haut.

Elsa ne le sait pas, mais je pense à elle. Je veille sur elle, je la protège. Et je l'aime, aussi.

Pour toujours et à jamais.

Un honneur, carrément... Je ne lui en demandais pas tant, mais sa réponse me fait vraiment super plaisir. Voilà, maintenant je peux le dire ; je suis heureux. J'ai l'impression que plus rien ne pourra se mettre en travers de ma route... de notre route, à Elsa et moi. La copine de Superman... Ce qui ferait donc d'elle une Loïs Lane ? Boh... J'en sais rien, j'ai jamais vraiment regardé cette série. Je ne cesse de sourire, et enchaine sur la réplique des cookies. Elsa me répond qu'on en fera, et qu'elle connait plein de recettes. Ses doigts jouent avec les miens, taquins. Elle hésite, un court instant, puis pose ses lèvres sur les miennes. Je répond tendrement à son baiser tandis que sa main resserre l'étau autour de pan de ma chemise. Quand elle rompt le contact, je me sens partir un peu en avant, comme pour continuer. Doucement, ma copine (héhé) relève son charmant visage tout timide vers moi et me pose une question qui me fait sourire comme au début de son gif.

▬ Et toi... Tu voudrais bien être mon amoureux ?

Exactement la même que celle que je lui ai posée il y a de cela de nombreuses années, à la maternelle. Sauf qu'à cette époque, ça n'avait pas marché entre nous ! Je rigole un peu et lâche pour la taquiner :

▬ Hm, ça dépend... Tu sais faire des cookies tout choco ?!

J'attends quelques secondes pour voir sa tête, mais comme je suis trop impatient, je n'arrive pas à tenir longtemps la position sérieuse qui va avec ma question. Alors j'éclate de rire, taquin, puis l'attire à moi par la main, avant d'entourer sa taille de mes bras. Ainsi enlacés, je plonge mes yeux dans les siens et lui adresse un sourire serein.

▬ En fait, peu importe... Même si tu ne savais pas cuire un oeuf je voudrais quand même être ton amoureux.

Suite à quoi je me laisse tomber sur le dos, entrainant mon amoureuse avec moi. On se retrouve ainsi tous les deux couchés, sa main toujours dans la mienne et mon bras passé sous sa tête. J'observe un instant le ciel, pensif. Il y a une chose dont je dois vraiment m'assurer, parce que je ne sais pas si elle m'a dit que ça ne l'ennuyait pas pour me faire plaisir ou vraiment parce que ça ne l'ennuyait pas. La question de savoir si ça ne la choque pas que j'aie déjà un fils.

▬ Elsa... Tu... Tu es sûre que ça ne t'ennuie pas, pour Wyatt, hein ? Parce que si c'était le cas, je préfèrerais vraiment le savoir..., murmurai-je, le visage tourné vers elle.

Tandis que je l'observe, mon sourire ne veut pas quitter mes lèvres. Il s'y accroche avec une obsession toute particulière : " Non, je veux être là quand elle te répondra ! " Dans les yeux d'Elsa, c'est la tempête. Un peu écarquillés, ils me fixent sans trop comprendre. Et moi, j'attends. Patiemment. Je ne vais pas mentir et dire que je suis parfaitement serein. Ce n'est pas le cas... Même si je suis sûr de mes sentiments, plus que sûr, même, ça n'a jamais été aussi clair !, et bien j'ai peur de me prendre un vent. Je suis humain, après tout. Et terrorisé. Sauf que je ne le montre pas, parce que j'ai une maitrise de moi exceptionnelle aujourd'hui, face à la fille que j'aime. Ah, elle va parler !

▬ Moi aussi, je t'aime. Je crois que... Je crois que je suis tombée amoureuse de toi.

Tout son visage est rouge, assorti au paysage rempli de coquelicots. Mon coeur, quant à lui, tambourine à une allure folle dans ma poitrine. C'est comme... comme si un raz-de-marée euphorique de bonheur me tombait dessus. Elsa est la sirène qui m'y entraine, dans ce foutu bonheur. Et là, je peux dire que je suis heureux. Et surtout, je sais. Je sais que tout s'arrangera, parce que mon coeur a tranché. Entre Sacha et Elsa, entre la passion et l'amour, il a fait son choix. Déjà, mon ex n'est plus qu'un lointain souvenir tant j'ai l'impression qu'Elsa accapare la moindre de mes pensées. Ma main glisse doucement dans sa nuque et, avec la plus grande délicatesse dont un petit fermier comme moi est capable, je l'attire doucement à moi. Les yeux dans les yeux, je scelle nos lèvres en un tendre baiser. Cet instant, je pense qu'il restera à jamais gravé dans ma mémoire. Doucement, je me décolle d'elle et lui sourit.

▬ Tu ne pouvais pas me faire plus plaisir, Elsa... Ma Superwoman à moi..., ajoutai-je en riant. Me laisseras-tu te prendre la main dans les couloirs, t'embrasser à la cafet' et te dire que je t'aime dans un foyer bondé...? Somme toute... Veux-tu être ma petite amie ?

C'est tellement cliché, tout ça. Les sentiments, les histoires à l'eau de rose, les demandes cul-cul la praline et tutti quanti. J'ai l'impression de me retrouver dans une série télé con-con à la One Tree Hill, tiens. Donc, oui, c'est totalement cliché. Et vous savez quoi ? Je m'en fout, parce que moi, ça me rend heureux de dire ça. Et j'aime cette série. J'aime ce qui est cul-cul. Au fond, je suis peut-être un peu sensible. Et puis c'est tout. Elsa me donna sa réponse, et j'enchainai presque immédiatement par :

▬ Puis j'adorerais apprendre à faire des cookies avec toi ! ♥

Ses grands yeux bleus s'ouvrent d'un coup avant de chercher les miens. Ses joues se colorent automatiquement d'un rose adorable. C'est une des choses que j'aime, chez Elsa. La facilité avec laquelle j'arrive à la faire rougir. Comme au ralentit, je vois une rangée de dents blanches étreindre sa lèvre inférieure. Ce simple petit geste, si innocent et naturel, me donne envie de recommencer. Je veux reposer mes lèvres sur les siennes, l'embrasser à nouveau. Mais moi, je ne suis pas comme ça. Je ne vole pas plein de baisers, je cherche à les mériter. Alors, je continue de sourire. Sa petite main vient alors se loger dans mon cou. J'ai envie de fermer les yeux pour profiter de ce contact, mais je ne veux pas détacher mon regard de celui d'Elsa. Il y a tellement de choses qui circulent, entre nous. Rien que par un regard, je peux comprendre tellement de messages cachés. Et elle, comprend-t-elle ce que j'essaye de lui communiquer ?

Doucement, avec une exquise délicatesse, Elsa se redresse pour déposer un baiser léger au coin de mes lèvres. Je penche la tête, comme pour faire durer cet instant plus longtemps. Derechef, ses joues se colorent et elle enfuit son visage dans mon cou, gênée. A-do-ra-ble ! Un souffle chaud vient alors me caresser la peau : un soupire de mon amie. Un très court silence s'installe, complété par les bruits de la nature qui nous entoure et nous protège. Puis, une question.

- Tu voudras que je t'apprenne à faire des Cookies ?

Un tout petit rire m'échappe, tandis que mes yeux se plissent et que le coin droit de ma bouche s'étire. Quelle répartie du tonnerre, elle est décidément trop mignonne. Doucement, je me décale un tout petit peu en arrière... juste assez pour que son joli minois ne soit plus fourré dans mon cou. Juste assez pour que nos yeux se croisent, s'accrochent... ne se lâchent plus. Je me noie dans la contemplation de son visage. A mon tour, de dire quelque chose. Elle m'a posé une question, elle attend une réponse. Un doux sourire éclaire mon visage, mes yeux rieurs et attendris n'ont de cesse de se régaler de la vue d'Elsa. Doucement, je viens à nouveau caresser sa joue de ma main, sans la quitter des yeux. Le moment est parfait. Il n'y a que nous et la nature. C'est maintenant ou jamais.

- Je t'aime, Elsa.

Les joues roses, Elsa secoua la tête doucement, avant de me sourire et de passer une main dans ses cheveux bruns. Elle et moi avions le même tic, il faut croire. Cette constatation me fit doucement sourire.

▬ Si tu es content... Je suis contente, alors. Et puis... je comprends, un peu, aussi.

Je serre sa main un peu plus fort dans la mienne, pour qu'elle comprenne que je suis là, que je la soutiens. Je connais son secret, et je sais par conséquent pourquoi elle vient de dire ça. J'ai envie de la serrer contre moi et de lui dire qu'elle pourra toujours compter sur moi en cas de coup dur. Mais bon, les contacts trop brusques, j'évite. Alors, je me contente de tout faire passer par une petite pression de main, un regard, un sourire. Elle ne dit rien, laisse son regard dériver vers le panier. Elle a l'air curieuse. Elle finit même par lâcher ma main, à mon grand regret, pour s'y intéresser de plus près. Je l'observe faire, sans me départir de mon sourire. Ses petites mains fouillent à l'intérieur et elle y découvre les cookies. Délicatement, elle en sort deux du Tupperware et m'en tend un. Comme je suis gourmand - et pas du tout morfale - je le prend, la remerciant d'un clin d'oeil. En deux bouchées, il est englouti. Elsa y va avec plus de précaution. Elle en prend une toute petite bouchée, sous mes yeux amusés, avant de le mâcher avec application. Elle se tourne ensuite vers moi et me dit qu'ils sont délicieux, avant de demander si c'est moi qui les ai fait. Je secoue la tête de droite à gauche.

▬ C'est ma maman.

J'ai l'air con, à dire ça. C'est pas grave, Elsa ne m'en voudra pas. Je continue de l'observer, inlassable. Je suis étonné qu'Elsa ne me pose pas de questions, à propos de Wyatt. C'est peut-être... le contre coup ? Elle est peut-être en train d'accuser le choc, là ? Je ne sais pas... Dans le doute, autant la fermer. Doucement, elle s'allonge contre un coussin, une fois son cookie terminé, avant de bailler. Mes yeux n'en perdent pas une miette, attentifs. Autant dire que quand elle est là, la clairière m'apparait comme tout à fait banale, ça me fait tout drôle, parce que quand je suis seul, je m'émerveille devant la beauté de la Nature. Là, je ne fais que matter Elsa. Je mériterais des baffes. Je pose ma main sur ma joue, avant de m'allonger à mon tour, de côté, tourné vers elle.

▬ Pardon. Je suis fatiguée, encore. Un peu.

▬ Ferme les yeux..., lui suggérai-je.

Sans poser de question, la jolie brune le fait. J'approche doucement ma main libre et la pose sur sa joue, tout doucement. Je descends jusqu'à son menton avec mon pouce, effleure tendrement ses lèvres. Bien sûr. Je recommence, j'ai à nouveau envie de l'embrasser. Je n'en fis rien, pourtant. C'est pas du jeu, si elle a les yeux fermés, elle ne peut pas contrer le "coup" ! A la place, je remonte ma main et caresse tendrement ses cheveux, y passant les doigts, jouant avec... Ce petit jeu dure comme ça un instant, et plus je l'observe ainsi, tout en laissant ma main courir dans ses cheveux fins, plus j'ai l'impression de voir une princesse endormie. Princesse qui n'attend qu'une chose, c'est bien connu...

Ma main revient effleurer sa joue, son menton et enfin ses lèvres. Mu par un instinct plus puissant que ma pauvre petite raison, je me penche en avant et dépose un doux baiser sur les lèvres closes de mon amie. De petits frissons me parcourent l'échine, pour un baiser. Un seul, rien qu'un seul... Parce qu'un baiser du Prince Charmant suffit à réveiller sa belle, après tout. Moi, je ne suis pas goujat, je ne veux pas en profiter. En plus de mon costume à collants, il me faudrait un destrier blanc. Podor est noir, zut alors. Bah, c'est pas grave, l'idée est là. Souriant, mais un peu stressé quand même, j'attends sa réaction.

Ses yeux inquisiteurs sondent les miens pour y déceler la moindre petite information, qui ne tarde pas à se manifester dans mes paroles. Elle garde un instant le silence, et je sens le stress monter en moi. Le silence, ça ne m'a jamais apparu comme étant un bon signe. En fait, c'est tout l'inverse. Enfin non, ça dépend. Si elle réfléchit à la meilleure façon de m'envoyer chier, c'est mauvais. Mais... et si elle était juste en train de peser le pour et le contre ? Ou alors... je ne sais pas, de faire sa liste de courses pour la semaine ?! AAAH, ça me stresse, tout ça ! J'en viendrais presque à regretter d'avoir lâché le morceau. Mais non, il ne faut pas regretter. Jamais. C'est bien la plus belle chose que j'ai apprise, à force de fréquenter mon fils. Ne jamais rien regretter. Soudain, ses doigts s'entrelacent aux miens, timides. Je sonde son visage, y cherchant des réponses qui tardent à venir. La jeune fille joue avec mes doigts, sans parler. Moment intense, l'anxiété est à son comble.

- Hm, je... Je sais pas trop quoi te dire. On fait tous des erreurs dans notre vie, j'en ai fait beaucoup, aussi.

Erreur. Mauvais, très mauvais. J'ai l'impression qu'elle n'a rien compris. Un goût amer vient tapisser ma bouche, j'ai envie de retirer ma main et de m'enfuir. Pourquoi dit-elle ça ? Wyatt est tout sauf une erreur, et le fait qu'elle puisse le penser me blesse profondément.

- Mais comme tu as l'air d'assumer cet enfant, j'estime qu'il n'en est pas une. Aussi, je suis un peu contente... Que tu me fasses confiance à ce point là.

Soulagement. J'avais tout faux. Elsa ne pouvait pas être comme ça, pas elle. Pas celle que... Je suis heureux, moi aussi, que sa phrase se termine de la sorte. J'attrape ses doigts et l'oblige à arrêter de jouer avec les miens. Mes yeux se plantent dans les siens, et je lui souris. Le sourire le plus vrai, le plus tendre que je ne lui ai jamais offert. Parce qu'il s'agit de mon sang, de ma chaire, et qu'elle l'accepte, tout simplement.

- J'ai seulement une question... Sa mère... C'est Isobel, n'est-ce pas ?

Sa question est posée doucement, timidement. Comme si elle avait honte de la poser, d'ailleurs. Je comprend pourquoi. La Voix a déjà balancé à plusieurs reprises le prénom de notre fils à toute l'école. Alors, le fait qu'elle donne du crédit à cette information doit la mettre mal à l'aise. A cet instant précis, je suis à mille lieux de me souvenir qu'elle connait Isy grâce à moi, et que mon amie lui a peut-être révélé l'existence de notre fils. Mon sourire ne s'évapore pas, au contraire. Penser à Isy et Wyatt, qui sont "ma famille", même si avec Isy, c'est plus compliqué ça, ça me donne juste envie de sourire, et de sourire encore.

- Oui, c'est bien elle... Je l'ai rencontrée à Londres. A l'époque, nous étions jeunes... Isobel était amoureuse de moi, mais de mon côté, j'ai bien peur d'avoir été un vrai crétin. Je sortais avec elle pour oublier mon ex, Brooke. D'ailleurs, c'est le comble, elle est à l'école ici. C'est la seule fille que j'ai vraiment aimée, à part... Enfin, je veux dire que voilà. Et donc, quand Isy m'a annoncé qu'elle était enceinte, j'ai pris la fuite. Si je ne l'avais pas recroisée ici, à Miami, je n'aurais certainement pas signé des papiers d'adoption il y a peu de temps. Et pourtant, tu n'imagines pas comme je suis heureux que le hasard nous ai remis sur le même chemin. En plus, le plus génial, c'est que nous sommes colocataires, tous les deux. C'est l'occasion de tout reconstruire...

Tout le long de mon monologue, je ne m'étais pas départi de mon sourire, et je n'avais pas lâché sa main non plus. Doucement, je l'attirai à mes lèvres et y posai un doux baiser, les yeux dans les yeux avec mon amie.

- Je suis tellement content que tu acceptes ça, Elsa. Tu ne sais pas à quel point ça me touche...

Mes yeux inquisiteurs observent la jeune fille, qui semble éblouie par l'endroit. Je m'en doutais ! Dès que j'ai découvert cette clairière, j'ai su qu'il faudrait que j'y emmène un jour quelqu'un de vraiment spécial. Comme Elsa... Elle observe ce que j'ai préparé, attentive.

▬ C'est génial, Chase, vraiment. Je trouve ça adorable. T'as dû te lever super tôt pour faire tout ça... C'est super gentil.

Je hausse les épaules, modeste. Après tout, une petite virée à cheval, ce n'est jamais une corvée pour moi, alors bon... Puis là, c'était pour faire plaisir à Elsa, alors ça valait le coup de se lever tôt. Dernier argument : Je n'ai jamais été un lève-tard. En gros, c'était vraiment pas grand chose. La petite brune se dresse doucement sur la pointe de ses pieds pour atteindre ma joue, où elle pose un doux baiser, avant de me remercier, doux murmure au creux de mon oreille. Je souris, un peu timide. Sa main est toujours dans la mienne et je la sers doucement. Nous nous installons tous les deux sur la couverture en laine. Du coin de l’œil, je vois Cheyenne et Podor brouter tranquillement dans leur coin, et ça me fait sourire. Il y a des choses, comme ça, qui me donnent irrémédiablement envie de sourire. Comme les chevaux, ou Wyatt, ma mère, Elsa... Toutes ces personnes qui comptent énormément pour moi. Doucement, je m'allonge contre un coussin et soupire d'aise. Bon. Si j'ai amené Elsa ici, c'est parce que j'avais des choses à lui dire, à la base. Aussi pour qu'elle passe un bon moment, d'accord, mais c'est vrai que quand j'ai organisé tout ça, j'avais autre chose en tête que simplement passer du bon temps entre amis.

▬ Hm... Elsa ? Léger temps de pause. En fait, si je t'ai amené ici, c'est... c'est parce que j'ai quelque chose d'important à te dire.

Je me relève en position assise et plante mes yeux dans les siens. Il est temps que je lui parle de mon fils. Je veux savoir ce qu'elle en pensera, mais aussi si elle m'acceptera tel que je suis, avec un enfant. Je n'en doute pas vraiment, mais bon... Je reprend ma respiration un bon coup, avant de me lancer. Direct, je n'aime pas tourner autour du pot.

▬ Alors, voilà... J'ai un fils, Elsa. Il a 3 ans, il s'appelle Wyatt...

Je ne baisse pas le regard, ne voulant pas perdre le contact visuel avec elle. Et puis, à quoi bon ? J'assume tout à fait mes actes passés, et j'aime mon fils plus que tout. C'est... inconditionnel, et rien ne pourra m'enlever ça. J'espère juste qu'elle comprendra... et qu'elle ne me repoussera pas.

Elsa rétorque que c'est à elle de me remercier, pour l'invitation, avant de m'offrir son plus joli sourire, auquel je répond, le coeur tout réchauffé. C'est bizarre, l'effet que ça me fait, quand je la regarde. Cette envie de sourire, cette sensation de bien-être. L'amitié, c'est vraiment génial. Un truc super, genre à pas gâcher. De longues secondes s'écoulent, durant lesquelles Elsa profite du paysage. Et moi, je l'observe, à la dérobée. C'est la première fois que je la vois aussi sereine.

▬ Et, ça va toi, sinon ? Enfin, je veux dire... Mieux que depuis la plage ?

Je prends le temps de réfléchir à ma réponse, avant de la lui fournir. Est-ce que moi, ça va ? Théoriquement, oui. James va mieux, aussi. Enfin, sauf qu'entre temps, Sacha l'a frappé, dans sa chambre. Heureusement qu'il m'a appelé, James. Il aurait pu en crever, faible comme il était. Putain, quand j'y repense, ça me fout en rogne. Mais c'est pas le moment de parler de ça. Je ne veux aucune pensée parasite entre Elsa et moi, aujourd'hui. Juste les chevaux, la nature, le soleil du début de l'automne et nous deux. Le pied.

▬ Hm... Moi... Oui, moi ça va beaucoup mieux. C'est un peu grâce à toi., ajoutai-je en lui faisant un clin d'oeil.

Le reste du chemin s'avéra paisible. Les seuls sons qui brisaient la quiétude ambiante étaient le chant des oiseaux et le bruit mat des sabots sur le chemin de terre. Après encore dix petites minutes, à discuter de tout et de rien, nous parvînmes à l'endroit que je souhaitais montrer à Elsa. Il s'agissait d'une petite clairière, où poussaient les coquelicots sauvages et les marguerites. Les feuillages des arbres laissaient passer des rayons de lumière dorée, qui éclairaient la clairière et l'enveloppait ainsi d'une atmosphère romantique. Je descendis de ma monture souplement et attachai sa bride à un arbre, dans un coin, avant d'aider Elsa à en faire de même.

▬ Et voilà, ma jolie. C'est ici que je voulais t'emmener... Viens avec moi..., dis-je en lui prenant la main.

Je l'emmenai au centre de cet endroit magnifique, lui laissant découvrir la surprise que je lui avais réservée. Très tôt le matin, j'étais venu au grand galop pour dresser notre "table". J'avais étendu dans l'herbe une grande couverture confortable, en laine toute douce, sur laquelle j'avais disposé quelques gros oreillers. A côté attendait un panier, avec des bouteilles de jus de pomme - il me semblait que ça lui plaisait - à l'intérieur, ainsi qu'un Tupperware rempli de cookies que ma maman avait fait. C'était pas grand chose, mais j'espérais que ça lui plairait. J'observais sa réaction avec appréhension.

La petite brune s'approcha docilement de Cheyenne, posa son pied dans l'étrier très naturellement. D'une impulsion et aidée de ses bras, elle se hissa jusqu'à la selle, s'y installa confortablement et m'adressa un sourire amusé. Je devais lever la tête pour la regarder, maintenant. Je répondis à son sourire, tandis qu'elle me faisait remarquer que maintenant, c'était elle la plus grande. Et, comme le haut de mon crâne avait l'air de beaucoup l'amuser, j'y plaçai ma bombe pour qu'elle arrête de pouffer. Je me dirigeai ensuite vers Podor, le sortis de son boxe et grimpai agilement dessus.

▬ Et voilà, juste retour des choses : c'est moi le plus grand ! ♥ plaisantai-je.

Elsa s'accrocha aux rennes de Cheyenne, j'approchai doucement Podor pour m'en saisir également près de sa bouche. D'un coup de talon bien placé, je donnai l'impulsion au mustang, qui se dirigea vers l'extérieur. Tout naturellement, la jument suivit, Elsa sur son dos. Une fois à l'extérieur, j'aidai Elsa à positionner correctement ses mains sur les rennes, puis nous nous mîmes en route. J'avais lâché les rennes de Cheyenne, c'était donc Elsa qui la maitrisait totalement. Nos chevaux marchaient l'un à côté de l'autre, ce qui nous laissait l'opportunité de discuter.

▬ C'est loin, l'endroit où tu veux m'emmener ?

▬ Hm... Au galop, c'est à dix minutes. Au pas, ça nous prendra un peu plus de temps, mais c'est pas un soucis, les paysages sont beaux par ici !

Nous quittâmes le sol plein de graviers de la ferme pour nous engager sur une petite route de terre, plus agréable pour les pieds des chevaux. Le soleil était haut dans le ciel, ses rayons s'infiltraient entre les feuilles des arbres qui nous entouraient de part et d'autre du sentier. A chaque fois que je venais par ici, j'avais l'impression de me ressourcer. Et la suite promettait d'être encore plus agréable, puisque à la fin de ce sentier se trouvait un immense champ de blé doré, où poussaient parfois quelques fleurs colorées entre les épis. On avait de la chance, le propriétaire du champ avait décidé de récolter son blé fin de semaine. Elsa et moi pourrions donc encore profiter de sa vue aujourd'hui.

▬ En tout cas, je suis content que tu aies accepté de venir aujourd'hui, Elsa.

Sourire, plissement de paupières... Le soleil venait de m'éblouir, gentiment. D'habitude, je ne portais pas de bombe, mais plutôt une casquette ou un chapeau. Mais bon, avec les débutants, il faut montrer le bon exemple !

Dans l'écurie, pas un détail n'échappait aux yeux curieux de mon amie. Elle n'avait pas l'air de paniquer, ce qui me fit plaisir. L'équitation, les chevaux... C'était mon monde. La voir s'y émerger aussi tranquillement me comblait. Le moindre détail ne pouvait lui échapper, ses yeux vrillaient la pièce, attentifs. Et moi, je l'observais. On était habillés pareils, tous les deux, à peu de choses près. Les chemises à carreaux lui allaient vraiment bien. Elsa me donnait envie de sourire. Mes bras n'aspiraient qu'à une chose : l'enlacer, la réconforter... La petite brune se tourna alors vers moi, une mini-pointe d'inquiétude dans le regard.

▬ Ouais, bien sûr. Seulement, j'en ai jamais fait alors, on y va doucement, d'accord ?

▬ Pas de grand galop pour aujourd'hui, promis ! Croix d'bois, croix d'fer, si j'mens, j'vais en enfer !, ajoutai-je dans un grand sourire.

Je lui pris alors la main, avant de l'entrainer avec moi dans la remise. Le matériel d'équitation y était rangé. Bombes, scelles, brosses,... Tout s'y trouvait, en attendant tranquillement qu'on les utilise. A l'entrée, je lâchai sa main, m'approchai des bombes et en saisis une de petite taille, noire, en feutre. Je pris ensuite la mienne - il y en avait une par bénévole, une pour ma mère et une pour moi, nominatives - et revins près de mon amie.

▬ Alors, première chose indispensable... la bombe ! Essayes un peu, pour voir si ça va niveau taille ?

Elsa s’exécuta, nous réglâmes ensemble la taille et la lanière pour la maintenir en place puis elle me suivit au milieu des boxes. J'avais préparé le matin même un cheval de petite taille, habitué aux débutants, du nom de Cheyenne. Cette gentille jument était à la ferme depuis 3 longues années. Elle y était arrivée dans un état lamentable, battue par ses précédents propriétaires et à peine nourrie. A force de soins et d'amour, une poignée de bénévoles et moi-même avions réussis à lui rendre foi en les hommes, et à présent elle était l'une des meilleures lorsqu'il s'agissait de s'occuper des débutants. Je pénétrai dans son boxe, caressai sa robe couleur pie, avant de sourire à Elsa.

▬ Voilà ta monture pour aujourd'hui. Elsa, je te présente donc Cheyenne ! Tu verras, elle est parfaite, et super calme. La seule chose, c'est qu'elle est très gourmande, alors il faut que tu sois ferme en tenant les rennes. Si tu la laisses s'arrêter une fois pour brouter, elle aura compris qu'elle peut le faire sans arrêt. Donc, fermeté ! Tu me suis ?

Souriant, je sortis le cheval de son boxe et l'amenai vers un autre, où m'attendait Podor, un mustang noir immensément haut, que j'adorais monter pour sa fougue. Je me tournai vers mon amie et l'invitai à monter sur Cheyenne d'un clin d'oeil.