L'art et la psychologie: un état de symbiose? ~ Connor, Adam

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Je souriais à Rafaela lorsqu’elle me dit que ça ne lui posait aucun problème de lui prendre un peu de son temps après cette séance. Elle sembla néanmoins s’inquiéter pour moi. Je la rassurai immédiatement :

-Ne t’inquiète pas. Ce ne sont que mes dilemmes moraux habituels mais j’ai besoin d’en parler et je sais que tu ne me jugeras pas…, dis-je toujours à voix basse. A ce moment-là, je ne savais pas si l’élève que je devais encadrer était déjà arrivé mais j’avais jugé plus raisonnable de parler à voix basse.

Arrivés dans la pièce mitoyenne, la psychologue me présenta au jeune homme aux goûts vestimentaires douteux. Apparemment il s’appelait Adam. Je me retins de sourire quand elle lui expliqua que l’art pourrait l’aider à s’ouvrir et à se canaliser. Ca avait été le cas pour moi. L’art avait empêcher de replonger dans mes vieux démons même si, parfois, ceux-ci se manifestaient encore. Ma collègue se tourna vers moi. Je la laissais parler, lui expliquer ce qu’elle voulait faire en me mêlant à leur séance de psychothérapie. J’admirai la jeune femme. Elle était si calme et compréhensive avec son patient. J’admirai sa douceur. Je crois que je n’aurais jamais été capable de rassurer ainsi l’adolescent car il avait paniqué pendant quelques instants, je l’avais bien vu. Je m’enfonçais peu à peu dans une sorte de bien-être étrange à l’écoute de la voix calme et douce de Rafaela. Puis elle s’adressa directement à moi. Ce que je pourrais lui proposer comme activités? Il y avait tant de choses… Tout dépendait du caractère du garçon. Je me tournais vers Adam pour lui énumérer une liste d’éventuelles activités. Mais il demanda à Rafaela si ça pouvait l’aider. Je savais très bien que la question ne m’était pas destinée mais j’étais un bon exemple de ce que l’art pouvait faire sur un cas désespéré.

-Hé bien, je peux te proposer de faire du dessin, de la sculpture, de la photographie, de la peinture… Après tout dépend de ta personnalité mais ne doute pas de l’aide que peut t’apporter l’art. J’étais un cas désespéré quand j’avais 17 ans et si je n’avais pas eu l’art, je serais déjà mort à l’heure qu’il est. La photographie m’a permis de ne pas replonger dans mes vices., expliquais-je d’une voix tout aussi calme que celle de Rafaela. Je ponctuai ma phrase d’un sourire bienveillant.

Je n’avais aucune raison de ne pas vouloir aider l’adolescent. Il était à une période charnière de sa vie et un coup de main, peu importe d’où il vient, pouvait aider et donner espoir. Je le savais, j’avais été à sa place… Enfin, à une place similaire. J’avais toujours cette envie viscérale d’empêcher des jeunes de s’enfoncer sur le chemin que j’avais pris quand j’avais leur âge. J’avais envie de leur donner l’aide que je n’avais, au départ, pas reçu car on écoutait plus facilement un adulte extérieur à la famille que ses propres parents. Je jetais brièvement un regard vers Rafaela puis reposer mon regard sur Adam.

-Pourrais-tu m’expliquer ton… Trouble, ton problème? Mlle Variola me l’a expliqué mais je n’ai pas vraiment bien compris.

J’espérais qu’Adam n’ai pas mal pris l’un des mots que j’avais utilisé. C’était l’une de mes plus grandes craintes : que mes paroles soient mal interprêtées.

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L'art et la psychologie: un état de symbiose?

Je sens que cette séance ne va pas être exactement comme toutes les autres. Je ne sais pas encore pourquoi, ça ne va pas tarder. Même Rafaela est différente, même si je ne pense pas que ça ait un quelconque rapport avec moi. Elle a aussi une vie privée après tout. Elle m’invite à aller m’installer dans une autre petite pièce, celle où nous avions l’habitude de faire les séances. Je m’exécute alors et m’installe. Elle a cette bonne humeur et ce sourire que j’aime bien chez elle, parce qu’ils me font souvent défaut.

- Comment vas-tu aujourd’hui Adam ?

Je vais lui répondre, après un instant de réflexion, même si j’ai du mal à savoir aujourd’hui. Je ne vais ni spécialement bien, ni spécialement mal. Normal quoi, si tenté que l’on puisse utiliser ce mot avec moi. De nouveaux coups sont portés, signalant l’arrivée d’une nouvelle personne dans le bureau. Ah tiens, attendue ou non ? Elle me dit qu’elle revient et part ouvrir. J’entends quelques paroles échangées, basses, dans l’autre pièce, ce qui fait que je ne les saisis pas. Elle revient alors avec un homme. En entendant son « bonjour » quand il est entré, je m’en serais douté. Je le regarde alors vaguement, espérant une explication.

- Je ne sais pas si tu connais M. Richards, Adam. Il est professeur d'art plastique. Je lui ai demandé de l'aide parce que je suis certaine que ça pourrait t'aider à t'ouvrir et surtout à te canaliser. Beaucoup d'artistes se réfugient dans l'art pour faire passer des émotions c'est donc un refuge pour la plupart d'entre eux. Personnellement, je ne m'y connais pas du tout en art c'est pourquoi M. Richards t'aidera mieux que moi en te faisant participer à divers ateliers/activités.

Je détaille alors le professeur un peu plus. Son visage me dit quelque chose mais je ne sais pas si je l’ai vu souvent ni où je l’ai aperçu. De toute façon, est-ce que ça change quelque chose ? Je ne crois pas. Si j’ai bien compris, elle veut que ce Mr. Richards s’occupe de moi, me fasse faire des activités pour m’aider. Mais n’est-ce pas ce qu’elle fait elle ? Elle me « refourgue » à ce type que je ne connais pas et qui ne me connait pas ? Elle ne veut plus m’avoir comme patient, j’ai compris. Ça m’attriste, même si j’avais l’impression que ce moment arriverait un jour. Je suis tenté de me braquer, parce que je n’aime pas qu’on me lâche. Mais je suis également tenté d’accepter parce que j’ai déjà fait des efforts et que je ne veux pas que ce soit pour rien. Elle coupe court à mon choix en disant que nous nous verrons toujours. La mini lueur de panique disparait de mes yeux. Ça me rassure. Je me tourne vers l’homme, Mr. Richards, et essaye de lire une expression sur son visage. Il est difficile de m’apprécier, parce qu’à un moment ou à un autre, je pète un câble. Même avec ceux que j’affectionne, je ne suis pas toujours très tendre. Je me décide enfin à ouvrir la bouche, retournant mon attention sur la jeune femme.

- Vous croyez vraiment que ça peut m’aider ?

J’ai confiance en son jugement, c’est en moi que je n’ai pas confiance. Je sais que les activités artistiques peuvent beaucoup aider. La preuve : quand je suis devant mon piano. Et puis, je suis un Alpha Psi. Je vois aussi comment les autres agissent autour de moi, à la confrérie. Apparemment, pour les activités et tout, je dois voir avec le spécialiste. Un peu plus pour moi-même que pour les adultes, je murmure quelque chose.

- Pourquoi pas … ?

J’attends alors comme Rafaela ce que va répondre le professeur. Elle lui demande même ce qu’il peut proposer. A vrai dire, à part avec mon instrument, je ne suis pas très douée de mes dix doigts. Ça me permettra de découvrir un peu. J’espère juste que si je n’arrive pas, ça ne va pas plus m’énerver que m’aider ! Avec moi, on ne peut jamais savoir à l’avance.

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Observant minutieusement chaque page du dossier, se remémorant le cas d'Adam, Raf repensait à ce qu'elle comptait faire. C'était un processus différent des autres. Allier une matière, un hobby à un cas psychologique. C'était délicat et compliqué au niveau de l'analyse, mais c'était la seule issue qu'elle trouvait pour Adam et n'étant pas comme les autres psys, à laisser tomber dès qu'il y avait des obstacles plus gros, elle préférait tenter le coup, de toute façon ça ne pouvait pas être pire et peut-être même qu'il y trouverait une passion plus intéressante, une spécialité qui lui plait plus qu'une autre, peut-être qu'il y trouvera un épanouissement quelconque, au moins ça le canalisera. Elle aurait pu choisir une personne extérieure au lycée pour l'aider dans sa tâche, afin de ne pas mêler un de ses profs à sa vie privée et à ses problèmes, mais ce qu'elle aimait chez Connor, qu'elle ne trouvait pas chez les autres, était sans nul doute son jeune âge. Rafaela était persuadée qu'un homme de la quarantaine allait être plus méthodique et rhétorique qu'un homme approchant la trentaine et renfermerait probablement Adam dans son instabilité. De plus, Connor n'avait pas l'air d'être le genre d'homme strict et sévère, Adam n'en sera que plus épanoui.

Plusieurs coups se firent entendre dans le bureau de la jeune femme, elle invitait la personne se trouvant derrière la porte à entrer et lorsqu'elle reconnu Adam, elle se levait et s'approchait de lui en souriant. Rafaela analysait le comportement de l'adolescent: sa tenue vestimentaire était plutôt originale, mais c'était comme ça depuis plusieurs séances, elle avait réussi à s'y faire. Un peu plus las que d'habitude, elle l'invitait à s'asseoir en lui montrant la pièce annexe où se trouvait des divans et une atmosphère plus chaleureuse que le bureau en lui-même.

Bonjour Adam! Installe-toi à côté je t'en prie.

Elle attrapait le dossier du garçon se trouvant sur son bureau, dans la foulée et le suivait jusque la pièce à côté. Elle prit place sur un des divans, en face de son patient et tout en gardant son sourire, elle s'adressait à lui sur un ton des plus joviales.

Comment vas-tu aujourd'hui Adam?

Elle comptait enchainer sur le déroulement de la séance d'aujourd'hui, quand d'autres coups contre la porte du bureau résonnèrent dans la pièce.

Un instant, j'arrive.

La dame s'excusait et passait dans la pièce à côté pour y inviter la personne à entrer. Elle se stoppait au milieu du bureau et vit Connor passer la porte, elle sourit une nouvelle fois en le voyant ajoutant un clin d'oeil amical. Ce dernier s'approchait d'elle et lui demandait un moment pour discuter après l'entretien.

Pas de problème, j'ai du temps, mais rien de grave au moins?

Elle retournait dans la pièce où se trouvait l'élève en compagnie de Connor et l'invitait, lui aussi, à s'asseoir. Elle reprit sa place initiale avant de s'adresser à Adam.

Je ne sais pas si tu connais M. Richards, Adam. Il est professeur d'art plastique. Je lui ai demandé de l'aide parce que je suis certaine que ça pourrait t'aider à t'ouvrir et surtout à te canaliser. Beaucoup d'artistes se réfugient dans l'art pour faire passer des émotions c'est donc un refuge pour la plupart d'entre eux. Personnellement, je ne m'y connais pas du tout en art c'est pourquoi M. Richards t'aidera mieux que moi en te faisant participer à divers ateliers/activités.

La jeune espagnole tournait le regard vers son collègue et ensuite vers Adam. Elle avait un peu peur de sa réaction, mais dans un sens, elle était convaincue qu'il voulait changer, qu'il voulait s'en sortir et donc, qu'il accepterait, avec au moins du recul, cette proposition. Cependant, elle tentait aussi de le rassurer concernant les entretiens qu'il avait avec elle.

Evidemment, toi et M. Richards faites comme bon vous semble pour la fréquence des activités en fonction de vos disponibilités et quant à nous deux, on continue à se voir régulièrement, comme d'habitude. Tu pourras me dire ce que tu en penses, si ça t'aide ou si au contraire ça t'enfonce encore plus. Pour les activités en elles-même, encore une fois, c'est entre vous. Si tu préfères la photographie, le dessin, ou autre chose, tu dois en discuter avec lui.

Rafaela gardait toujours un ton calme et posé pour expliquer son objectif à l'étudiant. C'était sa façon d'être avec ses patients: Calme et posée. Elle n'avait aucune raison de s'énerver et être excitée comme une puce pouvait en exaspérer certains. Elle savait aussi que son comportement était plus rassurant que d'autres psys je-m'en-foutistes, faisant juste oui de la tête pour faire croire qu'ils ont tout compris, alors que non. Elle tournait le visage vers le professeur d'art.

Tu pourrais lui proposer quoi comme activités, par exemple?

Au moins, Adam verrait ce à quoi il devait s'attendre et le mieux placé pour parler d'art, ici, c'était Connor, pas moi. Il était donc le mieux placé pour proposer des activités artistiques.

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A l’origine, j’étais prof d’art plastique. Sauf que ma charmante voisine, Rafaela Torres D. Variola alias la psy du lycée, m’avait demandé de l’aider. Je ne pouvais pas refuser et ce pour plusieurs raisons : elle était ma voisine et se mettre un voisin à deux n’était pas agréable; elle avait remplacé ma psy; elle était une bonne amie et je lui avais parlé de certaines choses assez embarassantes alors je ne pouvais pas vraiment refuser au risque de dégrader ma relation avec cette charmante jeune femme qui pourrait me gâcher la vie si elle décidait de dévoiler les choses que je lui avais dit sous le couvert de la confidence. Le service que Rafaela m’avait demandé était en rapport avec un élève, un certain Adam Handstom. Etant donné que je n’étais pas un grand fana de la psychologie, je n’avais pas vraiment compris ce que Rafaela m’avait expliqué. Je m’étais dis que je comprendrais quand je verrais ce jeune homme. J’avais rendez-vous avec Rafaela et l’élève après la pause déjeuner.

Ce matin, j’étais passé dans le parc en fumant une cigarette. J’avais remarqué un ado qui n’avait pas l’air d’être sobre. Sérieux, le gars portait un t-shirt avec une licorne dessus. Qu’est-ce qu’il avait fumé avant de s’habiller? Je ne m’attendais pas une seule seconde que ce jeune homme puisse être l’élève avec qui je devrais “travailler”. C’était en refoulant un rire moqueur que je m’en allais pour donner mon premier cours de la journée. C’était partie pour une journée à tenter de dissimuler sinon vaincre mes sentiments pour Nina. Je devenais fou. Je savais que je n’avais pas à avoir une telle relation avec une de mes élèves mais j’étais incapable de me ressaisir. Quand je la repérai dans un couloir, j’étais incapable de faire comme si elle était invisible. Mon regard me trahissait, je ne voyais qu’elle. A ce rythme-là, je perdrais rapidement mon travail car quelqu’un remarquera vite mon petit manège. Je commençais sincèrement à me demander si je n’étais pas tombé amoureux de ma jeune élève. Si c’était le cas, je venais de signer mon arrêt de mort. Finalement, je n’étais pas vraiment net dans ma tête. Techniquement ce que je faisais c’était de la pédophilie, du détournement de mineur et quand on faisait ça, il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond. Etais-je vraiment le mieux placé pour m’occuper d’un élève avec un problème psychologique alors que j’étais moi-même un peu dérangé? J’en doutais mais je ne pouvais pas faire faux-bond à Rafaela.

Après avoir fumé une cigarette dehors après ma pause déjeuner, j’allais au bureau de Rafaela. Je frappais en priant pour qu’elle soit seule afin de lui parler quelques instants. J’entendis la voix de la psy et j’entrai. L’élève était déjà là. Oh non, c’était l’éève que j’avais vu dans le parc. Je me demandais toujours ce qu’il avait pu fumer ce matin pour s’habiller ainsi.

-Bonjour!, lançais-je en entrant dans la pièce.

Sans hésiter, je m’approchai de Rafaela et lui glissai à l’oreille :

-Après cette séance, il faudrait qu’on parle…

Rafaela me connaissait et elle savait de quoi j’avais envie de parler. Ensuite, je m’asseyais sur une chaise en attendant que Rafaela commence. Après tout, c’était elle la psy et je n’avais pas totalement compris le problème du jeune homme. J’espérais que Rafaela nous rappelerai les faits pour qu’ainsi je puisse aider au mieux le jeune homme aux goûts vestimentaires douteux.

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L'art et la psychologie: un état de symbiose?

Je me fais suivre. Depuis deux ou trois semaines déjà. Pas dans la rue, non. Mais par une psy. Celle de Wynwood. Pourquoi ? C’est tout simple, j’en ai marre de m’attirer des ennuis parce que je ne sais pas me contrôler. Ce n’est pas agréable, ni pour les autres, ni pour moi. Alors j’aimerais que ça change un peu. J’ai bien vu plusieurs spécialistes au Canada, mais ça n’a rien donné. Je veux tout de même réessayer ici. Surtout qu’il n’y a pas que mes sautes d’humeur qui me gênent. Il y a aussi mon enfance. En fait, surtout mon frère. Que je retrouve ici. Alors autant dire que dans ma tête, c’est le bordel complet. Il faudrait y mettre un peu d’ordre.
La psy, elle, m’écoute. Enfin, c’est l’impression que j’ai. Je n’ai pas spécialement du mal à parler, à répondre aux questions, même si certains sujets sont plus sensibles que d’autres. Ça me fait quand même du bien. Parce qu’à vrai dire, je n’ai pas grand monde à qui parler ici. A part de rares exceptions que je n’ai pas envie d’assommer avec ma vie quelque peu agitée.

Aujourd’hui, d’ailleurs, j’ai rendez-vous. Je ne me doute pas qu’il ne se déroulera pas comme d’habitude. Je me prépare sans dire un mot, dans ma chambre de la confrérie. Je prends quelques affaires, un jean simple, mon t-shirt favori avec la jolie licorne rose, mes tennis vert fluo, je me fais un chignon vite fait, et je suis prêt. J’entends du bruit à l’extérieur de la salle de bain. Ayase, ma colocataire bien aimée. Elle doit attendre la place. Je reste encore quelques minutes dans la pièce, sans rien y faire, juste histoire de l’énerver. Je n’ai rien à faire de ma matinée, mais il faut que je bouge. En fait, j’essaie d’être le plus souvent possible loin de ma chambre. Parce qu’avec la Chinoise, ça fait des étincelles. Je me défoule sur elle et elle ne se laisse pas faire pour autant. Quelle idée de nous mettre tous les deux ensemble ! Je crois qu’un jour, je l’étoufferai avec son oreiller. Toujours est-il que je finis par sortir et par la bousculer au passage. Elle soupire. La journée commence bien.
Une fois à l’extérieur, le soleil tape sur mon visage. Il fait chaud, comme souvent à Miami. J’ai envie de me poser tranquillement quelque part, et d’attendre que le temps passe. Je me dirige donc vers le parc. J’aime bien cet endroit. C’est calme, on est à l’air libre, et personne ne vient m’embêter. Enfin, pas depuis longtemps. Parce que la première fois que j’y suis venu, on ne peut pas dire que je suis resté en paix, seul, bien longtemps. Pourtant, en y repensant, ça ne m’a pas plus dérangé que ça. La jeune fille que j’ai rencontré ce jour-là a désormais sa place dans mon cœur, même si celle-ci est un peu plus grande que je n’ose me l’admettre. Je m’assois et sors mon paquet de clopes. J’ai envie de me détendre, ça ne peut pas me faire de mal. Même si, en vue de mon rendez-vous de cet après-midi, je penche pour une cigarette normale. Je ne compte pas arriver totalement stone non plus.

Je ne sais combien de temps je reste là, à regarder les gens passer. A réfléchir sur tout et sur rien, sur ce qui n’est pas forcément important dans ma vie. Le retour à la réalité se fait grâce à mon portable, que j’ai mis à sonner pour ne pas être en retard. Je ne prends même pas la peine d’aller manger, je préfère éviter. Je me souviens encore de l’autre jour, et ça me suffit pour me couper l’appétit. Je me dirige donc vers les bâtiments, vers le bureau de la psychologue. Je suis légèrement en avance, aussi, j’attends quelques minutes devant la porte avant de rentrer. Je ne veux pas la déranger, si elle est occupée. Je ne pense pas qu’elle ait déjà quelqu’un, je dois être le premier de l’après-midi, mais si elle a des papiers à faire, on ne sait jamais. Au bout de quelques minutes, je frappe doucement à la porte et attends qu’elle m’invite à entrer pour le faire. Je referme donc le battant avec un petit manque d’énergie. Je ne suis pas au mieux de ma forme, même si ça va quand même. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai plutôt envie de rester à ne rien faire. Cependant, je n’aurais pas raté le rendez-vous, parce que ça ne se fait pas, et qu’aujourd’hui, j’ai décidé de me montrer bien élevé. Je la regarde et lui souris. Elle, au moins, ne me déteste pas, parce qu’il y a un sacré nombre de personnes qui nourrit des sentiments négatifs envers moi. Bon, en même temps, je me trompe peut-être, c’est son métier et elle n’attend qu’une chose : que je m’en aille. Je chasse ces idées de ma tête, je suis trop méfiant pour le coup.

- Bonjour !

Mi- joyeux, mi- las, mon salut ne cache pas vraiment mon état d’esprit. Je n’aime pas faire semblant de toute façon. Si ça ne va pas, je le montre. Là, je ne sais pas vraiment comme je me sens, alors tant pis. J’attends qu’elle me dise de m’asseoir pour me poser sur une chaise. C’est une intuition débile, mais j’ai l’impression qu’aujourd’hui ne sera pas comme les autres jours. Je suis patient, je saurai dans peu de temps.

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Pour la deuxième fois dans sa vie, Rafaela venait de voir son passé défiler en une matinée. En effet, cet étudiant qu'elle avait reçu ce matin : Diego, était en fait le fils de sa soeur. Soeur qu'elle croyait morte dans l'accident de train dont elles avaient été victimes toutes les deux, ainsi que leurs parents. Elle se rappelait la dernière image qu'elle avait eu de sa soeur, c'était encore une petite fille, allongée sur le sol, inerte. Comment avait-elle pu se dire que sa soeur était morte ? En fait, c'était ce qu'on lui avait dit, ce que sa grand-mère lui avait dit. Mais pourquoi avait-elle fait une chose pareille ? Elle n'avait aucune réponse à ses questions et n'en aurait plus à présent, étant donné que sa grand-mère est décédée, elle aussi. Diego lui avait appris qu'Anita, sa soeur, était en Hopital psychiatrique. Encore une fois, une montagne de questions lui venait en tête : pourquoi est-elle là ? Que lui a-t-on diagnostiqué ? Etait-ce sérieux ? Benin ? Elle n'avait pas voulu poser toutes ces questions au jeune adolescent. C'était déjà bien assez compliqué pour lui comme ça. Et puis, elle préférait ne pas le mêler à ces histoires de psychiatrie. Elle ne voulait pas l'effrayer et encore moins lui faire croire que sa mère était un monstre. Aussi loin qu'elle s'en rappelle, Anita était une fille adorable, avec qui elle passait énormément de temps. Elles étaient complices toutes les deux, elles aimaient passer du temps à jouer ensemble et cette journée dans ce zoo avait été le dernier pour les deux espagnoles. Raf' avait dû grandir comme ça, sans sa soeur ni ses parents, sans famille. C'était surement une des raisons pour lesquelles elle ne pouvait s'attacher : une fois qu'on perdait de vue une personne, ça faisait mal. Elle avait déjà vécu ça que trop de fois pour vouloir recommencer avec un homme, c'était une promesse qu'elle s'était faite. Pourtant, Diego était là, lui. Il faisait partie de sa famille, il n'avait pas eu une enfance facile et encore maintenant, sa famille était, finalement qu'un néant sans fin. Elle savait qu'elle n'arriverait pas à ne pas éprouver un certain attachement envers lui, il faisait partie de sa famille, c'était le fils de sa soeur, elle était consciente qu'Anita aurait donné n'importe quoi pour que Rafaela s'occupe de Diego et c'était ce qu'elle comptait faire, à présent.

En ce début d'après-midi, elle avait un nouvel étudiant à voir : Adam Handstom. C'était un élève que la jeune thérapeute voyait depuis deux trois semaines déjà. Elle avait plus ou moins saisit le problème qui se posait dans la vie de ce garçon : il était instable, avait certaines fascinations pour des choses toutes simples dans la vie d'une personne. Il était aussi victime de traumatismes et le tout mit ensemble donnait un sacré comportement insoutenable pour un être-humain. Elle repensait à ses cours d'histoire de la psychologie. D'après des légendes, le comportement lunatique serait dû à la lune ayant une influence sur les malades mentaux. Certains patients bipolaires étaient victimes de cet éclairage que provoquait la lune et qui attaquerait leur comportement susceptible. Cependant, cette théorie avait été sérieusement écartée depuis l'apparition de la lumière artificielle. Elle souriait en pensant à toutes ces théories. Comme quoi la psychologie remontait à plusieurs années et surtout, comme quoi on avançait vite. Les théories telles que celles-là faisaient plus sourire qu'autre chose, il était impossible qu'elle s'arrête à ce genre de foutaises. Dans le cas d'Adam, c'était parfois poussé à l'extrême, mais loin d'être dangereux. D'ailleurs, selon la jeune femme, il n'y avait pas que ça, il fallait voir plus loin et en attendant, il fallait qu'il canalise sa personnalité, son humeur, son psychisme.

En lisant le dossier d'Adam, elle avait remarqué qu'il faisait partie des Alpha Psi, qu'il aimait l'art quelque forme qu'il soit. Elle devait pencher sur cet item, sur une chose qu'il aime, sur une chose qui le garderait concentré et qui l'aiderait à maintenir son comportement. Justement, son voisin n'était nul autre que le professeur d'Art Plastique : Connor Richards. Elle avait voulu lui en toucher un mot, le mettre au courant. Sur le moment, elle avait trouvé sa demande un peu déplacée : profiter du temps libre d'un prof pour aider un élève n'était pas toujours apprécié, mais ce dernier avait approuvé. Il ne s'agissait pas de l'occuper 7 jours par semaines, mais quelques heures afin que l'adolescent puisse se sentir mieux et puisse retrouver un équilibre digne des autres adolescents de son âge. Rafaela avait donné rendez-vous aussi bien à Adam qu'au professeur dans son bureau, après la pause déjeuner. Elle avait évidemment laissé carte blanche sur les activités que lui proposerait le professeur. Après tout, elle n'y connaissait pas grand-chose en art, elle. Elle ne se contentait que d'appliquer ses processus. Aussi, le seul n'étant pas vraiment au courant de ce qui allait se dérouler dans les jours à venir, c'était Adam et c'était la raison pour laquelle il était convoqué. Les deux adultes allaient lui expliquer ce qui était mieux pour lui, ce qui allait le soulager.

Assise derrière son bureau, à feuilleter le dossier de ce jeune homme, elle repensait un instant à Diego. Toute cette histoire était délirante. C'était dingue et déstabilisant, mais une fois de plus, la dame devait rester forte et surtout, ne pas mélanger le professionnel au privé. Elle avait tout le temps pour penser à son neveu, son avenir, son bien-être et au temps qu'ils devaient rattraper, tous les deux.