Get Up Get Off [Aime rat]

Je m'apprêtais à quitter les lieux lorsque la jeune femme me répondit par une répartie... Minable. Je ne pris même pas la peine de me retourner pour lui répliquer quelque chose. Par ailleurs, j'étais suffisamment fatigué comme ça, entre mes nuits trop courtes, mes rêves qui me réveillaient la nuit en sueur, et maintenant cette putain de fille qui se croyait tout permis. Je priais intérieurement pour que les américaines ne soient pas toutes comme ça, sinon je risquais de ne pas apprécier cet endroit. Il n'y avait donc personne de discret, ici ?

Mais la provocation ne s'arrête pas là, puisque l'idiote décida de m'invectiver de nouveau. Lâche ? Moi ? Je me retournais, avec un soupir d'exaspération. Bordel, elle ne manquait pas d'air, celle-là. Pire encore, elle me prenait pour un type qui se permettait de frapper les femmes. Je la fixais un moment. Cette fille était laide. Son regard était laid, sa démarche de gouine était laide, son visage était laid, ses fringues, tout respirait la laideur chez cette fille. Mon dieu, elle me dégoûtait. Salope. Je ne lui avais rien demandé, et elle se permettait de me faire des remarques ? Je la fixais sournoisement, répondant par un demi-sourire.

"Je ne frappe pas les femmes. C'est pas de la lâcheté, c'est du respect, tu connais ce mot ?"

Elle m'agaçait. Mais j'avais autre chose à penser, de toute manière. Je n'avais pas l'intention de me fatiguer à envoyer promener cette débile juste pour le plaisir d'avoir mouché une connasse. Il y en avaient plein les rues, des gonzesses comme ça. Des filles dégueulasses, qui s'adonnaient à des pratiques immondes sur d'autres femmes, et ce sans le moindre complexe. Elle aurait tôt fait de se faire interner, cette garce. Mais pourquoi m'attarder ? Je lui tournais le dos, jetant un dernier regard en arrière et quelques mots.

"Si t'as tes règles, c'est pas mon problème. Va emmerder quelqu'un d'autre, j'ai pas de temps à perdre. Va te faire foutre."

Je fis quelques pas en direction de la sortie. J'étais persuadé que le message était passé. Et qu'elle allait enfin me foutre la paix.

En vrai, je me faisais chier.

Je n'avais pas cours ce matin-là, mais je m'étais quand même levé à huit heures. J'avais beaucoup de courrier en retard, et mon père me donnait de l'argent pour répondre aux innombrables lettres que je recevais de Turquie ; et ce n'étais pas une mince affaire. Mais mon paternel m'avait assuré que si j'étais proche de mes fans, ma renommée n'en serait que plus forte ; aussi, je ne faisais pas trop le difficile. Je savais que je devais beaucoup à mes parents, à cause de ce qu'il s'était passé l'année précédente ; par ailleurs, si pas mal de gens m'avaient suivi et soutenu, la presse avait fait des gorges chaudes de ma mésaventure. Cela n'avait rien de drôle, cependant ; il n'y avait aucune raison de rire de ce qu'il m'était arrivé. L'année précédente fut une suite d'échecs pour moi, et la pilule fut d'autant plus dure à avaler que d'habitude, ce que je voulais, je l'obtenais... Mais pas cette fois. Non, pas cette fois. Et je l'avais appris à mes dépens. J'avais été la risée de l'univers cruel des mondanités ; mais sans doute, songeais-je, que j'étais bien trop jeune pour comprendre quelles conséquences auraient mes actes. Malgré cela, beaucoup de fans m'ont envoyé des courriers de soutien et le font encore à présent ; me disant que ce n'était pas de ma faute. Que j'étais malade. Et que mon départ pour Miami finirait de soigner les dernières plaies qu'il me restait. Ces mots me touchaient et me redonnaient, peu à peu, confiance en moi ; et je les croyais. En allant dans cet horrible pays, peut-être que je finirais par soigner ce qui avait fait de moi un personnage monstrueux auprès des Turcs. Je gardais espoir, en tout cas.

Bref.

J'avais rendez-vous, ce matin-là, pour faire la visite avec un élève de l'école ; le directeur avait exigé que je visite les locaux pour mieux me repérer, et pour cerner le fonctionnement de Wynwood. Fort bien. ça me gonflait carrément, mais peu importe. J'avais pris un taxi en direction du lycée vers 8h45, persuadé que j'allais prodigieusement m'emmerder, et je n'avais pas tout à fait tort. En entrant, j'étais resté là, appuyé contre le mur du hall, attendant patiemment que mon interlocuteur vienne ; une heure plus tard, il n'était toujours pas là. Je n'avais rien noté de l'heure de la visite, si bien que je finis par penser que j'étais arrivé trop tôt, ou qu'on ne m'avait pas averti d'un changement probable, si bien que j'attendis patiemment, une heure de plus. Je n'étais pas vraiment du genre à me mettre en rogne pour rien ; qui plus est, j'étais persuadé que j'étais fautif, que je m'étais trompé. Alors je patientais. Puis vint un moment où je commençais à en avoir assez... Je laissais trainer mon regard un peu partout dans le hall, attendant une personne, un geste, quelqu'un... Jusqu'à ce que cette fille arrive.

Elle se tenait là, dans ce hall, un regard sauvage vissé sur le visage, les cheveux relâchés avec négligence. Tout en elle respirait la luxure, et pire, elle sentait la gouine. Je fronçais les sourcils. J'avais des à-priori sur les femmes, mais cette manière de se tenir, d'observer les autres d'un air hautain... J'aurais été bien incapable de mettre un nom sur sa confrérie, mais sur son orientation sexuelle, peut-être. Je laissais mon regard l'observer encore un peu, avant finalement d'attraper mon sac pour me barrer... Mais elle ne m'en laissa pas vraiment le temps. Sa voix retentit comme un couperet, vicieuse, froide et... Mauvaise. Très mauvaise. En fait, c'était plutôt mauvais pour moi, finalement. Elle me fixait avec colère, et m'agressa presque verbalement. Non mais pour qui elle se prenait, cette débile ? Qu'est-ce que j'en avais à foutre, de cette gonzesse ? Je lui jetais un regard plein de mépris, avant de finalement attraper mon sac avec agacement. Un petit mot pour la route :

"Va promener tes petites fesses ailleurs, tu veux ? Apprends la politesse, au passage."

Je me détournais d'elle, et me dirigeais d'un pas lent et élégant en direction de la porte extérieure. Je n'allais pas rester là, à attendre pour rien une personne qui ne viendrait pas. Et cette salope pourrissait mon espace, de toute manière.