[Abandonné] Travaux forcés [Maeko]

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Travaux forcés
Maeko & Adam

La jeune fille croise ses bras sur sa poitrine et me lance un regard noir. Elle a l’air aussi ravie que moi de devoir travailler en binôme. Je crois que ça va pas être facile. Comment ça pourrait l’être en partant sur de mauvaises bases ? Elle fait une remarque, que je ne relève même pas. Je la regarde se recoiffer et elle me pose une question.

- J'imagine que tu n'as pas cherché un pays à étudier pendant la pause de midi... N'est-ce pas ?

Haussement d’épaules. Non, je ne l’ai pas fait. Ce truc, ça m’énerve déjà. J’allais pas en plus y réfléchir pendant mon déjeuner. On est deux sur ce travail, on a qu’à réfléchir à deux. Et puis, elle ne doit pas l’avoir fait non plus, puisqu’elle enchaine avec une autre question. Enfin plusieurs. Un soupir m’indique qu’elle n’est pas heureuse d’être là. Tant mieux, elle n’est pas toute seule.

- Bon alors ? Tu as une préférence pour le pays qu'on va étudier... Euh... Machin... Comment tu t'appelles déjà ?

Vu que je me suis pas encore penché sur la question, non, je n’ai aucune préférence. Déjà, il faut savoir ce que le prof entend par « pays en crise ». Je réponds quand même à la dernière partie de sa question, c’est demandé si gentiment.

- Adam.

Je ne lui retourne pas, je me rappelle. Elle, c’est Maeko. Quand je veux, je peux quand même avoir une bonne mémoire. Mes yeux se posent sur le livre qu’elle me tend. Bon, séparons en plusieurs groupes. Premièrement, pays touchés par la crise économique. Beaucoup, c’est sûr. Mais certains plus que d’autres. Comme l’Espagne ou la Grèce, en Europe. Après, évidemment, il y a des pays d’Afrique toujours en manque d’argent et ne traversant pas une crise passagère mais étant en crise depuis de trop nombreuses années déjà. Ensuite, il y a d’autres sortent de crises. Crise du gouvernement par exemple. Rébellion du peuple, renversement du pouvoir. Crise parce que reconstruction compliquée ou dictateur difficile à faire tomber. Comme les pays Arabes. Ce sont eux qui m’intéressent le plus à vrai dire, mais je veux pas m’imposer. De toute façon, je sens déjà mal cet exposé, autant que la jeune asiatique en face de moi ait un sujet qui lui plait plus ou moins.

- J’ai aucune préférence de pays. Mais j’avoue que je préfère les soulèvements du peuple.

Je lui montre la page concernée, pour qu’elle puisse voir. Il n’y a plus vraiment d’agressivité dans ma voix, mais pas de sympathie non plus.

- Du moment que c’est un truc qui me saoule pas trop, ça me va.

Du moment que tu me saoule pas trop, ça me va. Il y a un autre point qu’il vaut mieux éclaircir maintenant. Le type de document que nous allons présenter. Parce que ça représente pas le même travail, pas le même investissement. C’est clair que je compte pas passer des heures avec elle sur quelque chose qui me motive même pas. En même temps, je sais qu’un travail plus approfondi est plus récompensé. Au pire, je m’en fiche de ma note. Mais elle ? Suis-je vraiment mal luné au point de lui planter la note d’un devoir ?

- On fait un diapo ou autre chose ? Je te préviens, j’accepte pas de faire n’importe quoi.

Non, faire le guignol devant la classe, très peu pour moi. Je pense pas que ce soit son genre non plus, mais autant poser les choses dès le début. Je passe une main dans mes cheveux et finis par poser mon sac par terre, histoire de dégager la table. On peut aussi travailler chacun dans son coin et mettre en commun dès que y’en a besoin. Quoi que, c’est pas top non plus. Ça se voit souvent et le binôme est pénalisé.

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 Travaux forcés.

Le travail d'équipe est essentiel. En cas d'erreur, ça permet d'accuser quelqu'un d'autre.[Bernard Menez]

C'était l'une de ces journées de cours qu'elle passait à attendre désespérément la fin. Elle avait dessiné sur son cahier durant les deux heures d'anglais qui avaient précédé au lieu de suivre le cours, tout en soupirant un maximum, histoire de montrer son mécontentement. Puis la prof d'anglais s'en était allée pour laisser place à une collègue pire encore : celle d'histoire-géographie. Maeko avait alors observé son sac, posé sur la chaise vide à côté d'elle d'un air désespéré, si seulement elle avait essayé de s'intégrer à la classe, elle n'aurait pas eu à supporter seule les cours. Malheureusement, une fois de plus, elle avait pensé qu'elle n'avait besoin de personne et elle s'était finalement retrouvée toute seule. Pendant que l'enseignante expliquait qu'ils devraient faire, par binôme un exposé sur un pays en crise au choix, elle s'était remise à son œuvre d'art. Ainsi, quand elle entendit son nom, elle releva la tête avec un air ahuri, sans savoir pourquoi on avait parlé d'elle. Elle avait donc passé le reste de l'heure à harceler ses voisins de devant pour qu'ils l'informe de la situation. Si bien qu'à la fin des deux heures, elle savait qu'elle avait un exposé à faire et mieux encore, avec qui. On lui avait montré le garçon en question du doigt, en la prévenant que ce n'était pas quelqu'un de facile. Ce qui confirmait une chose : elle ne s'était pas du tout intégrée, parce que jusqu'à preuve du contraire, niveau caractère, elle se posait là, elle-aussi.

D'ailleurs, lorsqu'elle alla voir son binôme pour lui donner rendez-vous à la bibliothèque l'après-midi même, elle ne lui demanda pas son avis. Le midi, elle manga à la cafétéria, seule. Elle chercha bien Sojiro du regard, mais elle ne le vit pas. Sûrement mangeait-il au restaurant universitaire, avec les autres étudiants et comme elle n'était pas censée aller là-bas, elle prit son mal en patience. Elle passa les deux heures qui suivirent à la bibliothèque, à réviser ses kanjis. Absorbée pas son travail, elle ne fit pas attention à l'heure. Ce fut l'arrivée de son binôme qui la sortit de sa concentration, d'une façon un peu brusque. En effet, le garçon déposa brutalement son sac sur la table, la faisant sursauter, et alors qu'elle relevait un regard noir sur lui, il s'assit face à elle, tout aussi lourdement.

« Je suis là, comme tu voulais. » Fit-il, apparemment de mauvaise humeur. Loin de se démonter pour si peu, Maeko croisa les bras sur la table en haussant un sourcil. « Heureusement que t'es là, j'aurais jamais remarqué. » Répondit-elle, ironique, avant de se baisser pour récupérer son livre d'histoire-géographie. Elle replaça une mèche de ses cheveux correctement, arrangea ses lunettes et l'ouvrit. « J'imagine que tu n'as pas cherché un pays à étudier pendant la pause de midi... N'est-ce pas ? » Demanda-t-elle, sans même prendre la peine de relever les yeux. Elle l'avait déjà bien assez vu et il l'exaspérait déjà. Elle fit semblant d'être absorbée dans son livre qu'elle ne lisait pas du tout en réalité et, après quelques seconde, soupira en daignant relever la tête. « Bon alors ? Tu as une préférence pour le pays qu'on va étudier... Euh... Machin... Comment tu t'appelles déjà ? » fit-elle, sèchement en lui tendant le livre à la page des pays en crise.

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Travaux forcés
Maeko & Adam

Je viens à peine de reprendre les cours que ça m’énerve déjà. Devoir me lever le matin m’insupporte. En fait, je préférerais aller me balader, ou même discuter avec Cheyenne, une jeune fille que j’ai rencontrée. Par moment, pourtant, j’aime écouter mes professeurs parler, apprendre d’une manière différente de celle de mon ancienne école. Mais dans l’ensemble, ça m’énerve. Je suis nouveau, il est normal que les autres se posent des questions à mon sujet. Mais je déteste entendre des chuchotements sur mon passage. Surtout que je sais que j’ai l’air bizarre et qu’on ne m’apprécie pas forcément. Ça ne fait que très peu de temps que je suis ici, mais j’espère déjà que ça ne va pas continuer tout le reste de l’année. Parce que ça va pas me motiver à suivre régulièrement les classes.

Aujourd’hui, je ne suis pas spécialement de mauvaise humeur. Je suis juste un peu blasé, rien de bien méchant. Je suis un peu étalé sur ma table, mais je note ce que le professeur raconte et j’écoute d’une oreille plus ou moins concentrée. Jusqu’à ce que l’adulte annonce que nous avons des exposés à faire. En histoire-géographie, nous devons choisir un pays en crise et expliquer le pourquoi du comment, en faisant un espèce de dossier. Support juste pour le professeur. Pour nos camarades, présentation au choix : diaporama, pièce de théâtre, film d’animation, comme on veut quoi. Je sens déjà que je vais détester ce travail. Je verrai si j’ai décidé de le faire sérieusement ou non. Pour l’instant, c’est plutôt négatif. Mais ça peut très vite changer. Le pire je crois, c’est qu’on est en binôme et que c’est lui qui choisit. Bon, de toute façon, je crois que personne ici ne pourra me supporter. Je plains le pauvre petit qui va tomber sur moi. Un sourire se dessine sur mon visage. Je ne pense pas un seul instant que c’est peut-être moi qui vais en baver.
Arrivé à mon tour, j’écoute quand même ce que le professeur décide, histoire de savoir qui je vais me coltiner.

- Mr Handstom, vous serez avec Mlle Matthews.

Je sais même pas qui c’est. Enfin, je trouverai bien. Le cours se termine et je récupère tranquillement mes affaires. C’est parti pour le même calvaire, mais dans une autre matière. Une petite asiatique s’avance vers moi. Je devine que ce doit être elle Mlle Matthews, sinon pourquoi vernir me voir ? Gagné je crois.

- Salut. Je suis Maeko et je crois que je suis avec toi. On se voit à la bibliothèque à 15 heures.

Okay, elle ne me laisse même pas le choix. Bon, on a pas cours à cette heure-là, mais quand même. Si j’ai envie de faire autre chose ? D’accord, j’irai. Et si je suis pas disposé à travailler sagement, tant pis pour elle. Elle apprendra que je suis pas facile à vivre et elle apprendra à pas me donner d’ordre. Parce que pour le moment, je n’aime pas en recevoir. Elle s’éloigne et je sors de la classe pour me diriger, grognon, vers la prochaine salle.

A 15 heures, comme prévu, je vais à la bibliothèque. Je ne me dépêche pas, je n’ai pas envie. Elle est déjà là, installée. Je vais alors vers elle et pose pas très délicatement mon sac à bandoulière sur la table. Je m’assois de la même façon et la regarde.

- Je suis là, comme tu voulais.

Une façon de lui montrer que je n’ai pas aimé sa manière de m’imposer cette séance de travail. Il est clair que je suis maintenant de mauvaise humeur. Mais ça se trouve, je me suis frotté à plus fort que moi.

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