[TERMINE]Le parc municipale ou la rencontre du Fantasme <3 [Apollo(n)]

Hum, May ayant l’ouïe plutôt fine, pour divers raison, alors il avait remarqué ce léger accent. Et puis peut être que son accent à lui était si fort que du coup dès qu’il croisait quelqu’un en ayant un, même petit il se fixait dessus directement ? Tout est possible avec May Willis. S’il devenait président un jour, du moins candidat, il aurait un slogan déjà tout beau à sortir aux électeurs.
Soit, il annonça qu’il avait gagné la guerre face à sa mère et Apollo parut vraiment surprit. Il y avait de quoi ! Pas tout le monde ne connait une telle situation avec sa mère. Et bien, aux yeux de May, cette femme l’avait totalement trahi. Elle était allée dans les bras d’un autre pendant que son époux mourrait et souffrait à l’hôpital. Pendant que son mari l’appelait dans son sommeil. May avait été seul, dans la chambre de son père, ce mois de Mai où il était mort. Et le jour de l’enterrement, Madame Nakagawa n’était pas là non plus. Il la détestait.

Mal du pays, ça oui. Mal du respect japonais. Mal des décors. Mal des coutumes. Mal du langage. Mal des boutiques, de la nourriture, de la musique. De la télévision, des mangas. Mal de ses défauts aussi. Mais May aimait son pays. Il l’aimait d’autant plus qu’il l’avait quitté bien malgré lui. Il aimait l’éducation qu’on y recevait et ne voulait pas de celle qu’on donne ici. En gros, il voulait partir. Mais comme dit plus tôt, il était quand même plus heureux à Miami.
Vrai aussi qu’il regardait l’heure de plus en plus d’ailleurs son portable vibra juste après que son professeur ne lui propose de partir. May sourit, gêné.

« Hm… May est attendu… Merci beaucoup Apollo-sensei ! May espère voir vous bientôt ! Et vous offrir un verre aussi ! »

Le japonais lui offrit un merveilleux sourire à nouveau en se levant, et après avoir salué son aîné, il fit demi tour pour partir en courant.

[END]

Le regard de May ne me quittait pas. Il suivait chacun de mes gestes avec intérêt. Tout en buvant son verre à la paille, il m'observait par dessous ses longs cils. J'avais toujours admiré les gens qui réussissaient à faire ça. Moi, quand j'essayais de regarder les gens "par en dessous", j'avais surtout l'impression d'avoir une grosse crasse dans l'oeil ! Tout en me répondant, May sourit.

- Hm… Ma mère s’est débarrassée de May !

Le pire dans tout ça ? Il en avait l'air plutôt satisfait. Je me dis que peut-être, ce n'était pas le cas. Après tout, qui en serait content ? Une mère, c'est ce qu'il y a de plus précieux... Quand on la perd, de quelque manière que ce soit, on est blessé à vie. Bien sûr, il y a des façons plus dures que d'autres. J'avais moi-même perdu ma mère d'une façon démentielle... Cela avait gâché ma vie, cela m'avait obligé à fuir toutes ces années ! De nouveau, je m'étendais sur un sujet qui me faisait du mal...

- May est content, ici. Mais May veut rentrer à Tokyo vite !

Poursuivit-il. Ainsi, il avait le mal du pays ? Quoi de plus compréhensible ? Moi-même, je n'avais pas remis les pieds dans mon pays natal depuis bien trop longtemps à mon goût. Mais je ne pouvais rien y changer. May, lui, pourrait peut-être un jour y retourner, quand il serait un homme. Je ne répondis rien, perdu dans mes pensées macabres. Le jeune nippon en profita pour me poser une question.

- Et Apollo-Sensei ? Vous avoir un accent, aussi.

Je souris. Moi qui pensais mon accent infaillible, je m'étais apparemment trompé. Maintenant, quant à savoir quel accent j'avais ! Tout en répondant, je remarquai que May regardait sa montre toutes les deux minutes. Apparemment, il était pressé et je le retenais peut-être...

- Oh, j'ai beaucoup voyagé... Mais à l'origine, je viens de Finlande. Rares sont les gens qui arrivent à discerner mon accent étranger.

Puis, j'ajoutai en souriant, prévenant :

- May, tu veux peut-être y aller ? Nous avons fini nos verres et je vois que tu regardes ta montre... Si tu dois partir, je ne vais pas te retenir plus longtemps.

Etait-il vraiment en possession d’une telle joie de vivre ? Peut être qu’il s’agissait simplement de sa carapace à lui. Se forcer à tout tourner en dérision, sourire en permanence. En plus de savoir qu’il avait un beau sourire, May avait un caractère particulièrement joyeux. Sourire apporte la chance, c’est ce que sa grand-mère lui répétait quand il perdait espoir face à certaines choses. Si sourire apporte la chance, mieux vaut ne pas pleurer. May n’avait pas besoin de malchance, il l’avait assez vécu comme ça. Maintenant, il fallait se battre avec ce qui lui restait, alors, autant sourire. Et puis, il ne voulait pas qu’on voit qu’au fond, ça n’allait pas tant que ça. D’ailleurs, peu de personnes le remarquaient vraiment. Normal, même lorsqu’il est question d’annoncer quelque chose de difficile, d’affreux, de triste, de négatif en fait, May le fait avec légèreté et simplicité. Il faut dire que c’est aussi un défaut souvent reproché. Ne peux-tu donc pas être sérieux, un peu ? On parle de quelque chose de grave ! Ah oui ? Mais si je suis sérieux alors, ça deviendra encore plus grave non ?

Le professeur lui dit qu’il n’était pas embêté, May qui le fixait depuis tout ce temps n’insista pas mais si, il avait l’air embêté en lui annonçant qu’il enseignait les mathématiques. May ne comprenait pas vraiment. Le sujet avait pourtant l’air de mettre l’autre mal à l’aise. Pas que le japonais ne trouve pas ça amusant de pousser les gens à bout. En fait, il le faisait souvent. Mais là, ce serait mal venu. Il ne voulait pas qu’Apollo prenne la fuite. Du coup, il but de son verre sans rien ajouter, mais laissant son regard noir électrique détailler l’aîné qui changea de sujet. Ce qu’il faisait à Miami ? La question sembla amusé le japonais qui glissa, un sourire de connivence aux lèvres.

« Hm… Ma mère s’est débarrassée de May ! » Il sourit encore. Voyez, sourire même en disant quelque chose de terrible.

Mais en même temps, il ne mentait pas. Il avait poussé sa mère à bout. Il avait tout fait pour la rendre folle. Il avait brûlé, cassé, déchiré, découpé, détruit. Il avait fait les choses les plus affreuses, l’avait humiliée. Finalement, la femme, à bout, l’avait transféré ici. Pas au Japon, bien sur, elle ne comptait pas lui faire ce plaisir, hein !

« May est content, ici. Mais May veut rentrer à Tokyo vite ! »

Vite, Tokyo. Vite, mon pays, ma ville, mes traditions… Vite… je ne veux pas qu’Il devienne trop Américain…

« Et Apollo-Sensei ? Vous avoir un accent, aussi. »

Je m'attendais à tout, sauf à cette réaction. May me fit un immense sourire - encore un, à croire qu'il possédait une joie de vivre à toute épreuve - en m'assurant qu'il adorait les mathématiques. Il ajouta qu'il n'y avait pas besoin de parler anglais, pour être bon. En affirmant cela, May me rappela pourquoi, lorsque j'étais arrivé à Bruxelles sans savoir que faire de ma vie, j'avais choisi d'étudier les mathématiques afin de les enseigner, par la suite. J'étais perdu, en débarquant de Finlande dans un pays comme la Belgique. Je ne parlais pas français, et encore moins cette langue barbare qu'ils appellent Néerlandais, dans le sud du pays. Heureusement, Bruxelles étant la capitale européenne - raison qui a fait choir la balance pour cette ville, d'ailleurs - énormément de gens y parlaient anglais. A l'école, j'étais bon dans toutes les matières, mais je m'efforçais de garder des résultats moyens pour ne pas me faire mal voir de mes pseudos amis. Tout en me demandant ce que je pourrais bien faire de ma vie, pour essayer de la "redorer" après toutes les épreuves que j'avais subies, le jeune homme apeuré que j'étais alors était tombé sur une brochure d'une Haute École qui enseignait aux gens à devenir profs de différentes choses. Lorsque j'y avais lu les maths dans les matières, j'avais sauté sur l'occasion et je m'étais inscrit dès le lendemain dans la section érasmus. De la sorte, je pouvais continuer à parler anglais, apprendre le français - lentement mais sûrement - et obtenir un excellent diplôme pour plus tard. Malheureusement, mon passé m'a vite rattrapé, à cette époque. Mais ça, c'est une autre histoire... May me fit vite sortir de mes pensées en se rappelant à moi.

- Pourquoi avoir l'air embêté, Apollo-seisei ?

Excellente question... Pourquoi le fait que quelqu'un puisse ne pas m'aimer m'embêtait-il encore à ce point ? Moi qui pensais m'être forgé une carapace digne de ce nom... je me rendais compte qu'elle n'était pas à toutes épreuves, et que l'opinion d'un jeune homme croisé un dimanche matin presque comme les autres m'importait plus que ce qu'elle ne le devrait. Peut-être avais-je trop fuit ? Peut-être m'étais-je trop caché, sans affronter la réalité de ma personne, pendant toutes ces années ? Je ne voulais pas, ne serait-ce qu'une seule seconde, penser à l'être détestable que j'étais... et encore moins que quelqu'un le remarque ! Mes pensées devenaient bien trop sombres pour une banale conversation, et je préférai changer de sujet.

- Je ne suis pas embêté...

Tout en disant cela, je souris à May. Il me regardait d'un air intéressé.

- Mais dis-moi plutôt, May, qu'est-ce qui t'amène à Miami ?

Une petite indiscrétion de ma part pour éloigner May - et moi-même - de mon passé... Quel mal à cela, n'est-ce pas ?

Le serveur revint donc pour les servir. May l’observa encore. C’était plus fort que lui il essayait de comprendre ! Et il ne comprenait pas. Pourquoi faire ça à ses cheveux ? Ca lui faisait penser à ces japonaises qui mettaient trop de couleurs dans leurs cheveux. Ou alors qui les tuait en les décolorant en permanence. Ca n’avait pas d’intérêt et ça faisait même un peu peur. May préférait les gens qui faisaient tout pour se mettre en avant que ceux qui se cachaient ou s’enlaidissait. Il n’avait rien contre les looks excentrique, du moment que c’était joli. Mais là, ce n’était pas joli, il n’avait ainsi aucune raison d’apprécier. Alors, il se demandait pourquoi cet homme se faisait autant de mal, n’est ce pas. Il ne voulait pas plaire ? n’y avait-il pas des femmes, ou homme, qui l’attirait ? Est-ce qu’il existait des gens assez fou pour s’afficher au bras de cette personne… ?

Bon, c’était sans doute une façon très superficielle de voir les choses. Cet homme avait peut être de nombreuses qualités. Mais May est tout de même assez superficiel pour certaines choses. Soit, il n’eut pas à y penser plus longtemps que ça. L’homme parti, et May posa son regard sombre sur la boisson qu’il avait demandé. Il en but et se rendit compte qu’il n’avait rien but depuis qu’il avait commencé son sport. Alors en effet, c’était bienvenu ! Alors qu’il buvait, Apollo lui annonça, gêné, qu’il enseignait les mathématiques. Le brun releva la tête, silencieux une seconde avant de s’exclamer : « Ah, Sugoi !! » Et de sourire.

« C’est bien. May aime mathématiques. Pas besoin parler anglais. »

Annonça-t-il apparemment plus que ravi de cette annonce. Depuis qu’il était en Amérique, la seule matière où il avait gardé ses résultats excellents était les mathématiques. Avant, May était excellent en tout. Maintenant, il était juste… Normal, avec une mention pour les mathématiques. Enfin, son anglais écrit était tout de même plus désirable que son orale rassurons-nous. Soit, Apollo qui semblait si gêné n’avait donc aucune raison de s’en faire, May était très heureux. Faire bonne impression sur un professeur de Maths, ça, il ne devrait pas trop mal s’en tirer !

« Pourquoi avoir l'air embêté, Apollo-sensei? »

L'uniforme... Le moyen parfait pour un professeur de déterminer quels horribles mioches sont dans son école et quels autres n'y sont pas ! Je me rendais bien compte que pour les élèves, cette obligation devait être particulièrement frustrante. Après tout, ressembler à la masse des élèves de son école, ne pas pouvoir s'affirmer ou se distinguer quand on est extraverti doit être gênant. Mais de mon point de vue d'un membre du corps professoral... Quoi de mieux que l'uniforme ? Surtout quand on a pas la mémoire des visages. Il y pensait avec nostalgie quand May s'exclama joyeusement.

- Oh ! Apollo-sensei, alors ! May est content ! Vous apprenez quoi ?

Il me fit un immense sourire qui découvrit toutes ses dents. C'était vraiment un beau gamin, et particulièrement quand il souriait. J'étais sur le point de répondre quand le serveur nous apporta nos boissons. Je lui tendis distraitement un billet, sans quitter May du regard. Il regardait le serveur, comme fasciné par son horrible coiffure. C'en était presque gênant. Heureusement, il s'éclipsa rapidement, nous laissant seuls avec nos boissons. Je bus une grande gorgée rafraichissante avant de répondre au jeune homme.

- J'enseigne les mathématiques. Hum...

Je toussotai légèrement, presque gêné d'avouer cette tare. Après tout, moi aussi j'avais été jeune. Moi aussi j'avais, il y a de cela quelques années, détesté mes professeurs. J'étais bon à l'école, j'aimais les mathématiques, contrairement à la plupart de mes camarades, mais en tant qu'élève, je me sentais presque obligé de détester tous les profs, autant qu'ils sont. Pour rentrer dans le moule, garder mes amis, que sais-je ?, car après tout, je n'avais pas toujours été aussi affirmé que je le suis à présent. Être dans la situation inverse était pour le moins gênant, je n'avais pas envie que l'on me déteste, moi ! J'attendis la réaction du jeune homme avec une certaine... appréhension. Ridicule !

Le temps des uniformes étant révolu pour May, il n’allait pas avoir envie d’en porter un autre avant longtemps. Pas qu’il n’était pas dans une bonne école ! Au contraire, quand il trainait avec l’uniforme de son école, généralement à Tokyo on les traitait en roi. L’élite japonaise, le futur du pays ! May n’avait jamais eut de problème à l’école. Juste que depuis qu’il était dans un pays dont il ne comprenait pas la langue c’était beaucoup plus difficile. Mais bref, juste, être uniformisé, comme les autres, ça l’agaçait. Quant à l’excuse du « tout le monde est égaux, ainsi », c’était tellement faux que ça l’énervait. Les pauvres avaient des uniformes de pauvre, voilà tout. Et puis ça se voyait ! Enfin, May n’était pas non plus un de ces enfants de riches agaçant. Surtout depuis qu’il entrait dans le monde de l’argent et des charges à payer.

Quant au fait de se coiffer pour du jogging, c’était plutôt qu’il ne s’était pas décoiffé depuis cette nuit. Un Host se doit d’être parfait pour ses clientes voilà tout. Ne mentons pas pourtant, May se coiffait tout le temps. Il se pouponnait et prenait grand soin de chaque détail sur lui. Le sport, ça faisait partit de tout cela. May aime draguer, plaire, séduire, faire craquer. Il adore ça. Et ce n’est pas en se sentant moche qu’il il parviendra. En arrivant ici, il avait eut peur que le fait d’être asiatique au milieu des autres le défavorise beaucoup. Mais non, il gardait un succès qui l’avait très vite rassuré. Ici aussi, il pourrait jouer à plaire…

En parlant de jouer à plaire, il faisait très attention en ce moment même. Derrière cette attitude si calme, presque nonchalante, May n’avait absolument pas oublié que cet homme lui était très plaisant ! C’était amusant, cet aura qui se dégageait de lui. May croyait beaucoup à la première impression. Pour lui, un sentiment a toujours un sens. Soit, Apollo lui avoua être professeur dans son école et May eut un sourire tellement éclatant modèle pour une pub Colgate l’aurait carrément jalousé.

« Oh ! Apollo-sensei, alors. May est content ! Vous apprenez quoi ? » En fait, on dit plutôt vous enseignez quoi, May, mais bon, pas grave.

May suivi des yeux le serveur à touffes d'un air absolument ahuri. Comparé à lui, May... Bah ! C'est vrai qu'il était plutôt à son avantage, le petit japonais ! Prendre la peine de se coiffer pour sortir faire un jogging était un concept qui me dépassait, mais il faut bien avouer que j'étais un type un peu spécial. Quand il perdit le serveur des yeux, il se retourna vers moi.

- Oui. Voilà ! L'école au nom compliqué.

Il s'étira comme un chat sur sa chaise.

- Vous connaissez ?

Mince... J'espérai que ce n'était pas interdit de boire un verre avec un de ses élèves. Je n'avais pas envie de me faire renvoyer comme un malpropre avant même d'avoir commencé le boulot. Enfin... Si je pouvais le commencer ! Le directeur m'avait dit d'être là à 8 heures, mais sans m'avoir jamais vu. J'espérais simplement qu'il ne ferait pas preuve de discrimination évidente en me renvoyant sur le champs, usant de n'importe quel prétexte... comme le fait que j'ai bu un verre avec un élève ? Mon Dieu, je devenais carrément parano. Je décidai que de toute façon, le mal était fait et advienne que pourra ! Je souris à May d'un air gêné.

- Oui, en fait, je commence à y travailler demain... Je suis professeur.

Autant lui dire la vérité, après tout. Il n'avait pas l'air d'être le genre de personne superficielle au point de se lever et de partir en me plantant là comme un idiot. De plus, s'il n'était à Miami que depuis 3 jours, il n'avait pas encore du y commencer les cours. Nous étions, en quelques sortes, deux petits "nouveaux" à Wynwood.

Tout en répondant à May, j'aperçus un autre serveur qui déambulait entre les tables. Il portait exactement la même tenue que le touffu. Mais bon sang, c'est bien sûr !, me dis-je. Si seulement on pouvait revenir au temps des uniformes !

Prendre ses marques, rapidement. C’était important de ne pas rester trop longtemps déstabilisé. Et puis, Miami était beaucoup plus calme que New York. Les premiers jours de May à New York avaient été particulièrement difficiles. Il ne comprenait alors rien de ce qu’on lui disait. Pour parler, ça avait été proche de l’impossible. May avait beaucoup déprimé les premiers jours. Tout lui semblait beaucoup trop différent de ce qu’il aimait. Il n’aurait peut être pas pu s’adapter si certaines choses ne l’obligeaient pas à avancer. Quand on vit pour soit, bien sur, c’est plus simple d’être égoïste. Quand on vit pour deux, c’est encore autre chose. En tous les cas, New York avait été l’enfer. Puis il avait de toute façon été obligé de travailler. Evidemment dans ces cas là on apprend plus rapidement. Une fois à peu prêt adapté, il avait continué son chemin. Après tout, il faut toujours continuer son chemin.

En arrivant à Miami, il avait été surprit, mais de manière agréable. On aurait presque cru Okinawa. Presque. Tout y était différent, mais bien plus calme. Alors en trois jours, il s’était sentit mieux. Peut-être un peu parce qu’ici il était loin de sa mère. Et être loin de cette femme, c’était paradisiaque. May ne supportait plus de la voir. Ca l’énervait, rien que de penser à elle. Il la détestait. Haïr à ce point la femme qui vous a mit au monde n’est parfois pas simple à assumer. Mais on a tous un passé, et il faut savoir faire avec. Pour ça, May était plutôt fataliste. Même si, au fond, comme tout enfant blessé trop jeune, il aurait juste voulu être comme les autres, grandir comme eux. Avoir encore son père à ses côtés, entre autre. Il lui manquait, atrocement. May aurait voulu avoir quelqu’un sur qui s’appuyer et à qui demander des conseils. Avoir un père, ce n’est pas négligeable, surtout quand on l’a perdu.

Après avoir commandé à boire, son aîné lui demanda s’il n’était pas à Wynwood. May eut du mal à répondre tout de suite. Il se remettait du look affreux de ce serveur. Pourquoi faire tant de mal à ses cheveux ? N’importe quoi ! C’était se rendre moche pour se rendre moche ! Le genre de chose que May avait trop de mal à assimiler. Il aimait être beau. Il adorait ça. Bref, il finit par secouer la tête et sourire de toutes ses jolies dents.

« Oui. Voilà ! L’école au nom compliqué. »

Confira-t-il en s’étirant. Les sons dans ce genre, c’était atroce pour May. Les japonais n’ayant aucun mot ne se séparant pas par des voyelles, certaines consonances lui faisaient parfois défaut. C’était aussi ce qui faisait craquer ses clientes au club. May commande de « L’içou » pour l’ice de la glace, m’voyez.

« Vous connaissez ? » S’étonna-t-il.
Enfin, en même temps, ça devait être connu ou alors ici aussi tout le monde connaissait le nom des écoles. Après tout, à Tokyo, on reconnaissait chaque élève par son uniforme. Ah ! May était ravi de ne plus avoir à porter d’uniforme d’ailleurs !

Pour le respect... Bien sûr, c'est bien ce qu'il me semblait ! Pas si con, le petit prof, finalement... Arrivés au Pot au Lait, nous nous installâmes à une table et May s'empara prestement de la carte avant de l'éplucher attentivement. Quand je lui demandai depuis combien de temps il était à Miami, il ne leva pas les yeux pour me répondre, apparemment captivé par la carte.

- Hm, non. May est ici depuis trois jours.

Puis, il clappa le menu entre ses mains. Trois jours... C'est peu ! Il avait l'air d'avoir déjà pris ses marques, pourtant... Les apparences peuvent être trompeuses. Je me demandai vaguement ce qui l'avait poussé à quitter son pays. Études, simple voyage, raisons personnelles,... Le sujet ne me regardait pas, je fis donc un immense effort pour ne pas poser de questions.

- May est à l’école avec un nom compliqué.

Un nom compliqué ? Compliqué pour un japonais ? Je réfléchis un instant, doutant que la coïncidence soit possible. Serait-il par hasard à Wynwood ? Le serveur arriva avant que je ne puisse poser la question et nous demanda, de sa voix rocailleuse, ce que nous voulions boire. May avait l'air légèrement interloqué par son apparence : il avait le crâne rasé, à l'exception de quelques touffes disséminées un peu partout sur sa tête. De fait, ce n'était pas très joli, mais bon... Chacun fait ce qu'il veut de sa tête ! Il reparti après avoir pris nos commandes, me laissant l'occasion de poser la question à May.

- Tu ne serais pas à Wynwood, par hasard ?

S'il y était... Et bien, je commençais vraiment bien le boulot, à boire un verre avec un de mes probables futurs élèves !

Mais si, il était ravi ! Pas tous les jours qu’on l’invitait à boire comme ça. Enfin, surtout venant d’un homme qui semblait tout sauf enclin à se laisser draguer par un homme. Enfin, May n’était pas « un » homme, il était MAY. Ca changeait forcément tout. Et puis il ne lui avait pas dit grand-chose. Juste qu’il le trouvait beau. Accompagné avec un sourire. Mais là encore. Pas « un » sourire. Son sourire. Le sourire de May, pas vrai. Rien n’est jamais pareil quand il est question de May Willis, au final. Si ? Pas jusqu’ici en tout cas. Soit, le « san » lui avait échappé. Il ne savait rien de cet homme sauf qu’il était sans doute plus âgé. Il lui devait le respect de l’homme qu’il ne connaissait pas, sans pour autant allé jusqu’à le nommer « sempai ». « San » était donc la marque de respect qu’il utilisa. Autant l’expliquer ici, parce qu’il sera sans doute bien incapable de mettre les mots dessus plus tard, quand Apollo posera la question. Pour l’instant, il était heure à suivre cet inconnu pour boire un verre.

L’aîné le mena dans un endroit vraiment étrange. May regardait autour de lui totalement intrigué par cela. Il ne traînait jamais dans ce genre d’endroit. Dans son pays bien sur, il existait des bars tous plus fous les uns que les autres. Des bars hôpitaux, où l’on buvait dans des tubes à essais, des bars cimetières, où les tables étaient des cercueils… Des bars bonbons, tout était rose. Beaucoup de choses. Mais il ne les fréquentait pas. Lui, il était plutôt Host Club et boîte traditionnel. C’était amusant de découvrir un bar comme celui-ci, loin de chez lui. Il trouva vraiment la situation cocasse ! Mais fut rassurer de ne pas être seul être humain normal ici. Même s’il n’aurait sans doute pas fuit dans le cas inverse. Il en fallait beaucoup pour déstabiliser May Willis. Ou alors très peu, si on savait où frapper.
Soit, avec tout cela, May ne pensait pas au silence qui s’installait, et Apollo s’occupa de le briser comme un grand. Le japonais regarda son vis-à-vis comme surprit de se souvenir qu’il était là. Et bien jusqu’ici il était dans ses pensées. Que voulait dire San ? May chercha comment expliquer cela.

« Hmm… San… après nom d’une personne… pour le respect ? »

Ce ne fut pas simple mais c’est la réponse qu’il donna, et qui se rapprochait le plus de la vérité. Bien sur on pouvait en parler plus longtemps mais May était déjà plongé dans son décryptage de la carte. Mais ça les boissons, il gère le May. C’est bien l’un des premiers trucs qu’il a apprit en quittant Tokyo. Alors qu’il choisissait, l’autre lui demanda s’il était à Miami depuis longtemps. May se redressa, et sourit.

« Hm, non. May est ici depuis trois jours. »

Fit-il savoir en refermant le menu. Trois jours à Miami, un an à New York, et toujours la même envie : rentrer chez lui ! Enfin, il se doutait que ce ne serait pas pour tout de suite. Et pour l’instant il s’amusait beaucoup à Miami. New York, il avait détesté. Ici, il y avait des gens très amusant. May adore les gens amusant…
« May est à l’école avec un nom compliqué. »

Ma proposition ne le ravit pas. Elle ne le dérangea pas non plus, apparemment. Il s'essuya le visage puis consulta discrètement sa montre avant d'accepter, puis d'ajouter :

- May connait pas trop… ici. Alors May vous fait confiance Apollo-san !

Apollo-san...? Je ne connaissais pas spécialement la culture japonaise, mais j'étais loin d'être idiot. Je savais grâce à mes lectures que "san" était une particule ajoutée pour marquer... Quoi déjà ? Le respect des aînés ? A moins que celui-là ne soit "sempai" ? Enfin, je l'avais su. Je crois. Tout en me torturant les méninges pour retomber sur la signification exacte du "san", je fis signe à May de me suivre et je pris la direction de la place la plus proche, là où se trouvait mon café préféré. Il se situait à la fin d'une petite ruelle et n'était pas visible de la rue principale, rendant l'endroit introuvable pour un non-initié. L'intérieur, tout à fait psychédélique, me fascinait. Des poupées Barbie et Ken étaient crucifiées au mur, nus, près de l'entrée. Le bar était recouvert d'une mosaïque de pierres plates en verre, sur l'avant. Les tableaux représentaient des animaux-hommes, des enfants effrayants qui vous suivent du regard grâce à un ingénieux système de caméras ou encore des petits monstres étranges. Tout, dans ce café, était fascinant, et il portait le doux nom de "Pot au lait". Sa clientèle n'était pas, comme on pourrait le croire, typée. Il y avait des gens comme moi, certes, mais aussi de jeunes étudiants, des hommes plus âgés qui y sortaient leur maîtresse, des punks, des rockers, des grunges... Tout !




Comme je ne retombais pas sur la signification de "san" et que le silence s'installait, gênant, je me décidai à poser la question à May.

- May ? Que signifie "San", au juste ?

Puis je lui souris tranquillement, attendant sa réponse avec une certaine impatience : je détestais ne plus me souvenir de quelque chose... Cela me donnait trop l'impression de vieillir ! Puis, tout à coup, je me rendis compte que je ne savais pas depuis quand May était aux USA, et je rajoutai, avant qu'il ne réponde :

- Au fait ! Cela fait longtemps que tu es ici, à Miami ?



* HJ : Ce démentiel café existe réellement, hé oui ! Si un jour vous décidez de venir sur Liège, je me ferai un plaisir de vous y emmener :D Vous trouverez plus de photos ici : http://www.potaulait.be/v_cafe.php?lang=fr

Enfin May ne parlait pas trop ! Il était simplement vivant. Très vivant. Trop vivant ? Il n’aimait juste pas trop la monotonie, le calme. Ce qui était trop déprimant. Parce que lui-même était plutôt intérieurement déprimé alors il essayait de faire un contraste. Etait-ce idiot de penser ainsi ? Peut-être. Mais, il était ainsi depuis si jeune. Quand avait-il décidé qu’au lieu de montrer son côté déprimé, il allait faire tout l’inverse ? Si, il se souvenait. Parce que quelqu’un de déprimant à cette époque, ça n’aurait aidé personne. De toute façon, quelqu’un de déprimant n’aidait jamais personne, surtout pas lui-même. Se plaindre sur son sort, ça ne sauvait pas. Essayer d’avancer, c’était toujours ça. Même si parfois, finalement, on n’avançait pas. Pas du tout. Et se fatiguer à être positif quand rien n’avance, c’est impossible. Personne ne peut continuer ainsi sans jamais faiblir. Cela étant dit, il fallait tout de même avancer. Alors May avait prit le partit du vivant. Et du coup, il parlait beaucoup. Et encore, en anglais, il était si mauvais qu’il parlait beaucoup moins qu’en japonais !

L’homme qui venait de le sauver ne semblait pas vraiment le suivre. Normal. Mais il l’avait sauvé et c’était une bonne chose. En même temps May vivait une vie un peu dangereuse. Son métier était de plaire aux femmes et parfois il jouait trop le jeu. Charmer, c’était plus que facile pour lui. Comme si il avait été programmé pour y parvenir. Né pour ça ? Enfin pas vraiment. Bref, les folles lui courant après pour divers raisons étaient fréquentes. Les garçons aussi. En fait, les garçons c’était pire parce qu’en dehors de son job. May draguait beaucoup plus facilement les hommes après tout. En parlant de ça, ce professeur était particulièrement attirant pour lui. Et puis, il n’avait pas un look comme les autres. May n’en était pas vraiment étonné non plus, de là où il venait les looks particuliers étaient considérés comme… Faisant parti du paysage. Ringo elle-même portait le look sweet lolita… Elle était si belle. Enfin, ce n’était pas le moment de penser à Ringo.

L’homme lui fit lâcher son bras et May fut tout triste. Il n’avait pas l’habitude d’être repoussé ainsi après tout… Son regard avait du se faire très triste aussi, parce que l’homme changea d’avis et lui tendit la main, le tout en se présentant. La lumière revint dans le regard du japonais qui serra cette main. En plus, il n’avait pas parlé trop vite donc May avait tout comprit. Par contre, son nom était un peu compliqué. Pour le Apollo, ok, mais le nom de famille… Il ne prendrait pas le risque de le répéter hein. Apollo-san, ce serait parfait. Ensuite, l’homme lui proposa… D’aller boire quelque chose ? Dire qu’il mourrait de soif comme ça. Didonc, c’était un peu abusif ça aussi. Mourir de soif… Enfin, apparemment il courrait aussi ! Peut-être qu’il courrait depuis longtemps lui aussi. Enfin on lui offrait un verre il n’allait pas dire non !

« Ah… merci. May connait pas trop… ici. Alors May vous fait confiance Apollo-san ! »

Lui dit-il en essuyant un peu son visage avec sa serviette, regardant l’heure. Oui, il avait bien le temps pour un verre avant de retourner à ses affaires.

Effectivement, il me courait après ! J'essayai d'accélérer le pas, mais rien à faire, j'étais déjà sur les rotules et la fougue de la jeunesse fit rapidement son effet : il me dépassa comme si de rien n'était puis se mit à courir face à moi, en arrière. Damn ! Je n'étais décidément plus aussi sportif qu'avant ! La musculation m'avait encrouté... Tout ça pour développer de piètres muscles, que personne ne voyait jamais, de toute façon. Le jeune homme - May ? - me fit un joli sourire et je me pris à penser qu'il était décidément bien mignon, avec sa petite tête aux yeux bridés. Il m'assura à nouveau qu'il me trouvait fort à son goût puis stoppa notre course, ce qui au demeurant m'arrangea bien. Je saisis ma gourde, mais elle était vide. Lui m'observait, silencieux... Je ne le connaissais que depuis quelques minutes et j'avais déjà l'impression que le silence était chez lui une forme d'exploit. Soudain, je sentis quelque chose son mon œil... Son pouce ?! J'eus un léger mouvement de recul mais ne dis rien. Il observa son doigt souillé de liner et me souris encore une fois.

- Mais, avoir maquillage pendant le sport, définitivement pas une bonne idée !

Il n'avait pas tort... mais ma soirée avait été tellement agitée - sans parler de ma nuit - que je n'avais tout simplement pas l'envie de me démaquiller. La pensée que j'aurais une tête de zombie le lendemain, jour de rentrée des classes, me vint à l'esprit et je me maudis de ne pas y avoir pensé plus tôt. Me maudire... Je ne faisais que ça, en permanence. Je me maudissais de ne pas m'être démaquillé, d'avoir laissé mes pâtes sur le feu trop longtemps, d'en dire toujours trop à trop de gens... Cela devait être une de mes activités internes favorites ! Alors que je me perdais lentement dans mes pensées, May me fit revenir à la réalité en me saisissant le bras et en se remettant lentement à courir, me trainant derrière lui.

- Mei est reconnaissant. Un si bel homme qui sauve Mei. Au fait. Je suis Meiji… ah.. non… May. Oui May… C’est ça !

Que de blabla... Il n'arrêtait donc jamais, ce jeune freluquet ! Je freinai des quatre fers pour l'obliger à s'arrêter et secouai mon bras pour qu'il le lâche. Quand ce fut chose faite, je remarquai qu'il me regardait d'un air tout penaud... Rah ! Comment ne pas succomber ?! On aurait dit un cocker abandonné sur le bord de la route ! Je soupirai bruyamment et lui tendis la main...

- Bonjour May, enchanté. Je suis Apollo. Apollo Tässäon.

Il saisis ma main et la secoua vigoureusement, apparemment fort satisfait. Bon... Je mourrais de soif. Ce jeune type me semblait un peu perdu, et tant qu'à faire...

- Bon, May, je t'invite à boire un verre. Je meurs de soif !

[Les japonais m'ont kidnappée! Du coup je te réponds tard et je suis épuisée! donc pardon pour cette réponse... XD]

Ma~ma… Il s’enfuit ! Pourquoi est-ce qu’il part en courant comme ça ?

« Eh… Mate ! Enfin… attend ! Mei ment pas ! »

Il avait prit partit de courir après Apollo. Le fait d’être sans doute plus doué que lui en course fit qu’il l’eut très vite rattrapé, voir dépassé. Pour tout dire, il courrait maintenant de dos, afin de faire face à ce sauveur à qui il trouvait, vraiment, un charme ! Quelque chose qui, pour May, semblait attirant. Et pour le jeune asiatique, la première impression ne changeait généralement pas. Etait-il gay ? En fait, plus gay que bi. Il trouvait les femmes ennuyantes et en jouait plus qu’autre chose. Pour lui, toutes les femmes ne valaient pas mieux que sa mère. Donc il craquait beaucoup plus facilement sur les hommes. Cependant il adorait avoir raison des femmes. Tout ça pour dire que ce sauveur inconnu lui plaisait beaucoup. Que ce soit du sens commun ou non d’ailleurs. Il lui fit un adorable sourire.

« Enfin, parfois. Mei parfois ment mais… Mei trouve définitivement vous beau ! »

Il finit par s’arrêter, stoppant dans sa course cette pauvre victime qu’était le professeur de mathématiques. May l’observa quelques temps en silence, avant de passer son pouce sous l’œil d’Apollo pour y effacer une trace de maquillage. Il sourit de nouveau.

« Mais, avoir maquillage pendant le sport, définitivement pas une bonne idée ! »

Fit-il savoir en faisant un geste de la main comme pour chasser une mouche. Il fallait tout leur apprendre à ces jeunes ! Euh, non May, il est largement plus âgé que toi et tes dix-sept malheureuses années… Ce garçon n’était pas normal n’est ce pas ? Voilà qui faisait son charme, ou pas du tout d’ailleurs. A la fois excessivement sociable, mais totalement impossible à cerner. Une vague, qui vient, vous chatouille les pieds et repart aussitôt alors… Enfin, on pourra lui reconnaître sa franchise. N’ayant pas du tout peur de s’imposer face à cet homme qui voulait sans doute être tout seul, le japonais lui prit le bras et le fit reprendre sa course, pour l’accompagner dans son jogging. Il ne lui laissait même pas vraiment le temps de reprendre son souffle ou non. Alors qu’il courrait depuis deux heures et qu’il avait travaillé toute la nuit, May avait un regain d’énergie. Marchait-il à l’énergie solaire ? Peut être. Il n’avait rien avalé depuis deux jours aussi. Il en avait marre de la nourriture américaine et aucun bon restaurant japonais n’existait à Miami. Existait-il seulement un restaurant japonais à Miami ? Il devrait peut être faire la cuisine lui-même.


« Mei est reconnaissant. Un si bel homme qui sauve Mei. Au fait. Je suis Meiji… ah.. non… May. Oui May… C’est ça ! » lâcha-t-il en faisant "oui" avec la tête, fier de lui ... et pendant ce temps, il n’avait pas quitté son bras, hein !

Dimanche. 10 heures. J - 1. Ce n'était pas dans mes habitudes, mais j'étais stressé. Je n'avais jamais donné cours, ce foutu directeur ne me prenait pas à l'essai, je ne savais même pas sur quoi se porterait mon premier cours ! Toutes ces questions m'empêchaient de fermer l'œil, c'est pourquoi je me retrouvais dans ce parc, un dimanche matin, à courir après je ne sais quoi depuis 20 minutes. Je n'avais pas une excellente endurance - mon truc, aussi curieux que cela puisse paraitre, c'était la musculation - mais courir m'empêchait de penser à tout ça. J'étais vêtu d'un pantalon de jogging noir, basique, et d'un tee-shirt à l'effigie de mon groupe de métal viking préféré : les finlandais d'Ensiferum. Je chantonnais une de leur chanson, histoire de me rapprocher un peu de mes origines, ou peut-être de ne pas penser à ce qui m'attendrait le lendemain.

Soudain, j'aperçus au loin une touffe de cheveux noirs qui fonçait vers moi. Quelque chose - ou plutôt quelqu'un - était à sa poursuite. Mi-inquiet, mi-curieux, je ralentis le pas progressivement pour finalement m'arrêter. Je posai mes mains sur mes genoux et essayai de reprendre mon souffle sans toutefois quitter des yeux les deux joggeurs qui se rapprochaient de plus en plus. Quand le premier fut à ma hauteur, il me saisis le bras et se cacha derrière moi. Je fus un peu déséquilibré, mais ne dis rien. Une jeune brune passa en courant... apparemment à la poursuite du jeune homme. Jeune homme qui s'appuya sur moi sans aucune honte, essoufflé. C'était un asiatique, il avait la peau lisse, parfaite et ses yeux en amande étaient d'un noir d'encre à couper le souffle. Il murmura quelque chose que je n'entendis qu'à moitié et leva ensuite les yeux vers moi. Il parut étonné, mais ce n'était rien à côté de ma propre surprise ! Je me demandais qui pouvais bien être ce jeune homme étrange. Soudain, et très naturellement il me dit :

- Oh ! Mei trouve vous très beau !

Très... quoi ?! Je haussai un sourcil d'un air circonspect. Il n'avait pas l'air de maîtriser totalement l'anglais, il avait du se tromper de mot. Je n'étais absolument pas à mon avantage - si tant est que j'en ait un ! - ce matin-là : maquillage dégoulinant de la veille autour des yeux, cicatrice bien visible me barrant la lèvre, cheveux au vent... Je pris le parti de faire comme si de rien n'était et lui souris avant de faire quelques pas en arrière. Puis je me retournai franchement et repris ma course comme si je ne l'avais jamais croisé... sauf que ! J'entendis derrière moi des pas martelant le sol. Me court-il après ?, me dis-je, étonné.

Teru-teru-bōzu, teru bōzu
Ashita tenki ni shite o-kure
Itsuka no yume no sora no yo ni
Haretara kin no suzu ageyo

Teru-teru-bozu, teru bozu
Fais que demain soit une journée ensoleillée
Comme parfois le ciel en rêve
S'il fait beau je te donnerai une cloche en or

Une cloche en or. En voilà une idée géniale. Offrir une cloche en or à un Teru Bozu pour le féliciter du beau temps. C'était formidable, d'apprendre ça aux enfants. May stoppa sa course pour lever les yeux vers le ciel bleu qui s'offrait à lui. Certes, il faisait assez beau. Mais un frisson lui rappela aussi que cependant, il faisait froid. Nous étions en hiver après tout. Il soupira et se lança de nouveau dans son jogging, ses yeux fixant un point devant lui. Il était encore tôt et bien sur, il n'avait pas trouvé le repos du guerrier auquel il aspirait. Impossible de dormir les quelques heures qu'il avait trouvé. Il avait ainsi décidé de se lancer dans un jogging. Et maintenant, il avait cette comptine pour enfant dans la tête. Géniale, quoi.

Teru-teru-bōzu, teru bōzu
Ashita tenki ni shite o-kure
Watashi no negai wo kiita nara
Amai o-sake wo tanto nomasho

Teru-teru-bozu, teru bozu
Fais que demain soit une journée ensoleillée
Si tu réalises mon rêve
Nous boirons beaucoup de saké sucré

Boire du saké! Bah tiens pourquoi pas. Un enfant qui chante ça, normal. Apprendre à des petits à partager son saké, merveilleux. Et puis, qui rêverait d'une journée ensoleillée? Etait-ce un but dans une vie, cela? May avait pourtant bien accroché un Teru Bozu à la fenêtre de sa chambre. C'était plus joli, le soleil. De toutes façons, si on lui avait demandé quels étaient ses projets pour l'avenir, il n'aurait pas eut de réponse. Alors oui pourquoi pas, juste avoir du beau temps. Suis-je ridicule de penser ainsi? Le japonais essuya son visage avec une serviette passée autour de son cou, tout en courrant encore. Le sport, on dit que ça vous vide la tête de tous vos soucis. Pourtant, May avait l'impression d'y réfléchir deux fois plus. Il décida de se concentrer sur cette comptine, et de la fredonner, tout en continuant ce qu'il faisait...

"Teru-teru-bōzu, teru bōzu
Ashita tenki ni shite o-kure
Sore de mo kumotte naitetara
Sonata no kubi wo chon to kiru zo"

Teru-teru-bozu, teru bozu
Fais que demain soit une journée ensoleillée
Car s'il fait nuageux et que tu pleures
Je devrai te couper la tête!

Amen. Lui couper la tête? Carrément? Ce pauvre petit fantôme qui ne demandait rien à personne. Juste pour un peu de pluie? N'était-ce pas une mauvaise pensée? May ne put s'empêcher un sourire. Apprendre à un enfant à couper la tête de quelqu'un si son souhait n'était pas réalisé. Finalement, les jeux vidéos n'étaient pas plus redoutables que les comptines japonaises, croyez moi. S'il fait nuageux, hein? Et si dans ma vie, il fait sombre aussi? Le garçon s'arrêta, penché en avant, il cherchait son souffle. Peut-être avait-il trop accéléré sur la fin. Voilà deux heures qu'il courrait. Sa montre lui indiqua 10h. Un dimanche, à 10h. Il savait où il devrait être mais, il n'en avait pas le courage. Il se laissa simplement retombé sur un banc, la tête penchée en arrière.

"May!"

Tiens, une voix! Le garçon releva la tête pour voir au loin... Oh, des ennuis! Une jeune femme s'approcha de lui, elle semblait un peu plus âgée, mais très en colère. Le brun fit une moue et se releva.

"Ah, Alysson-san. Vous promenez vous tôt!" - Ouais, bon, l'anglais, toujours pas ça.

"May! Je t'ai vu avec une autre fille hier!" Le brun fit une autre moue. Il était arrivé il y a trois jours, et ce genre de soucis commençait déjà? ara ara...

"Belle femme? May était avec?"

"Oui elle était très belle!" May fit une petite moue outrée.

"Impossible. Alysson-san est seule belle femme que May connait."

La femme rougit, May sourit. "May doit partir. Au revoir..."

Moment de montrer qu'il ne faisait pas du jogging pour rien xD... May prit ses jambes à son cou. Si bien qu'il la sema mais... Et bien, il savait qu'elle courrait toujours. Son sauveur se montra bien malgré lui. Un homme très grand: plus grand que May, derrière qui il put se cacher, laissant passer la femme en furie. Le japonais reprit son souffle, s'appuyant à l'inconnu.

"Ah... Meiji est sauvé... juste..."

Il releva les yeux vers le sauveur inconnu et resta silencieux quelques secondes.

"Oh, Mei trouve vous très beau!"