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 White Rabbit |Neal|

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MessageSujet: Re: White Rabbit |Neal|   White Rabbit |Neal| EmptyDim 28 Avr 2013 - 17:59





White rabbit.

La musique, ce n'est pas sa vie.

Non, il y a plus. Il y a la puissance de la musique, et celle des mots griffonnés avec une rage presque palpable sur du papier. Ce sont ces frissons qui parcourent ton dos, jusqu'à en toucher la nuque avec une certaine extase langoureuse. Il prononce quelques mots, avec cette gêne qu'elle ressent dans chacun de ses gestes. Au moins, tu lui as fait de l'effet, ma conne. En tout cas voilà ce qu'elle pense alors qu'elle le voit s'avancer, presque hésitant, alors qu'elle le voit marmoner quelques phrases bateaux avant de se renfermer, de ouveau, au contact de la jeune femme. Perle le sait. Perle le sent. Il est fascinant. Absolument fascinant. De la racine de ses cheveux jusqu'à la plante de ses pieds, il est fascinant. Son regard en dit long, ses mouvements sont amples mais stressés. Ses cheveux longs et torsadés, sont magnifiques. Le visage fin et les yeux rieurs en ajoutent encore à ce portrait qui te fascine. Un instant, Perle vagabonde, et tu oublie qu'elle n'es pas seule ; jusqu'à ce qu'il remonte le son et s'installe devant l'instrument de musique. Lorsque tout commence, lorsque la musique reprend, Perle ne s'installe pas à son pupitre, non. Les mots qu'elle veut écrire dès lors sont pour lui. Pour cette créature étrange et fascinante qui se tient assise là. Et qui joue.

Alors que cette musique la transporte, Perle se sent partir dans un ailleurs. Elle ressent tout cela comme si elle n'était que spectatrice et non actrice de cette scène ; la musique tonne si fort que tous ses membres en tremblent. La batterie joue en rythme, parfaite, puissante, et donne un ton violet à ce qui se déroule sous ses yeux. Alors qu'elle s'autorise à jeter un regard en direction de son interlocuteur, celui-ci ne semble même pas la voir, absorbé par la musique qu'il joue, par le ton qu'il donne. Par la violence et le corps qu'il y met. Perle n'a jamais touché au moindre instrument de musique, mais elle sait ce que c'est, la ressentir. Elle sait ce qu'est la passion de la chose, l'amour profond des sons et de ce qui se propage autour d'elle comme un feu ardent. Il sait, lui aussi. Si c'est beau, si c'est fort et que ça la prend aux tripes, c'est parce qu'il ressent, lui aussi, le truc. Elle écoute, et ferme les yeux, absorbée par la force de cette musique qui les dévore. Puis qui s'arrête, aussi vite qu'elle est venue. Perle attrape son carnet, alors que l'inconnu quitte son poste de combat pour exhiber une collection faramineuse de bracelets brésiliens. Un sourire est arraché. Perle rirait, si elle le pouvait ; un jeune homme jouant de la batterie sur une musique belliqueuse prône sans doute la paix et l'amour avec ses dreads comme compagnie, un joint à la main, les bracelets témoignant de son amour profond des autres. C'est paradoxal, mais amusant. Perle aime les gens amusant.

Et sans doute encore plus les gens paradoxaux.

Il se présente, il s'appelle Neal. Perle n'a jamais entendu parler de lui, mais sans doute lui non plus. Elle sourit, et griffonne quelques mots sur son carnet en réponse, s'approchant de lui pour qu'il puisse lire correctement ses pattes de mouches.

Moi, c'est Perle. Enchantée Neal.

Alors qu'elle se détourne pour ranger ses affaires, une autre question fuse. Perle sourit de plus belle, très curieuse de l'attitude de l'inconnu. Il pose des questions, parle beaucoup. Il est intrigant, presque passionnant, va savoir. En tout cas, elle répond. Avec sérieux. Sympathie, aussi. Elle aimerait poser des questions, mais elle doit écrire pour cela.

Pour les mêmes raisons que toi en fait. Ici il y a peu de passage le soir, et j'en profite pour écrire et souffler un peu. Mais tu ne me dérange pas. C'est très beau ce que tu as fait à la batterie.

Innocence, quand tu nous tiens. Perle en est l'exemple type. Cette naïveté qui l'habite est presque palpable. Cette curiosité mordante, aussi. Elle ne sait pas pourquoi, mais elle est obsédée, fascinée par cet étranger qui l'a sortie de sa torpeur. Elle ignore si c'est le regard. Ou les cheveux, ou tout, tout simplement. Ou cette phrase. « J’veux pas être méchant, mais tu m’fais flipper. Vraiment. » bref. Elle s'assoit sur une table, tout en écrivant de nouveau. Le silence en serait presque pesant, si la musique ne continuait pas à tourner derrière, volume baissé. Elle tend le carnet à Neal, puisque c'est son nom.

T'es un de ces écolos, non ? Vous êtes plutôt marginaux en général. Ici, je vois surtout des alphas. Tu aime la musique ? Tu en fais depuis longtemps ?

Oui, parce que pour ne pas deviner de quelle confrérie sortait ce jeune homme, il fallait être aveugle.

Ou con.

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MessageSujet: Re: White Rabbit |Neal|   White Rabbit |Neal| EmptySam 13 Avr 2013 - 12:13

♦ Son rire vint briser le silence de la pièce, un rire sorti de nulle part, comme resté bloqué pendant des années. Comme si elle n’avait pas ri depuis son enfance, ce furent d’abord quelques notes éraillées qui s’échappèrent de sa gorge. Et Neal l’observait, alors que les larmes montaient aux yeux de la jeune femme ; il l’observait sans bouger. Il ne savait pas comment réagir devant cette hilarité soudaine, un excès de folie inattendu en cette fin d’après-midi. Neal ne pouvait s’empêcher de la regarder, de la fixer, alors qu’elle partait d’un éclat de rire de plus en plus violent. Comme s’il avait dit la chose la plus drôle qu’elle n’ait jamais entendu, son rire clair explosait dans la salle, venait se coincer dans chaque renfoncement de la pièce. L’adolescent n’avait toujours pas esquissé le moindre mouvement, il se contentait de fixer le visage qui s’illuminait devant lui. Ses yeux en parcouraient les contours, comme s’il tentait de l’enregistrer, d’en connaître les traits par cœur.

Puis le silence refit son apparition, aussi subitement qu’il avait disparu. Devant lui, la jeune femme souriait, empêchant son rire de franchir la barrière de ses lèvres. Comme si elle avait commis une erreur en riant, qu’il fallait qu’elle refoule toute cette allégresse qu’elle semblait ressentir. Neal fut plus surpris par ce silence soudain que par le fou-rire dont elle venait d’être victime. Celui-ci lui avait paru si naturel ; il avait eu l’impression que son rire attendait qu’elle baisse sa garde pour pouvoir s’échapper. Et il l’avait fait, avec tant de légèreté et de beauté que le Nu Zêta en était resté coi. Il avait simplement eu un mouvement de recul, inquiet à l’idée qu’elle puisse se jeter sur lui et le découper en morceau, tellement elle semblait folle. Mais la fascination qu’il éprouvait à la vue ce spectacle l’avait empêché de faire quoi que ce soit de plus, et il se contentait de se tenir debout, les bras ballants. Les yeux de la jeune femme brillaient, quelques larmes se frayaient encore un chemin entre ses cils ; ses joues étaient rosées et sa respiration haletante. On aurait dit qu’elle venait de courir. Neal lui rendit son sourire, ne comprenant toujours pas ce qui avait pu provoquer cette hilarité.

Quand il la vit s’emparer de son carnet, il pensa qu’elle allait lui expliquer ce qui venait de se passer. Mais ce ne fut pas le cas, et Neal en fut étrangement soulagé. Il préférait que ce moment garde de son mystère ; comme un spectacle de magie dont on ne connaît pas les tours et qui nous émerveille. Près de lui, elle lui tendit son carnet et Neal lut les quelques mots qui y étaient griffonnés. « Désolée, je ne voulais pas te faire peur. Je ne savais pas que quelqu’un pouvait venir à une heure pareille. » L’adolescent lui sourit franchement, et s’excusa maladroitement. « Non, c’est moi. J’ai pas pensé que tu pouvais être… que tu pouvais peut-être pas parler » Son sourire se fit plus doux, plus contrit. Il détestait agir comme un abruti, mais c’était plus fort que lui, quelque chose dans sa nature le poussait à l’être. Et il ne pouvait rien y faire, sinon tenter de limiter les dégâts. « J’aime bien venir ici le soir, généralement il y a personne, c’est plus tranquille et calme que le reste du lycée ». Ils s’observèrent un instant, puis elle lui intima de jouer, son carnet barbouillé de quelques lettres de plus. Neal la regarda, sourit, et murmura un « Ok » décidé. Il s’éloigna d’elle et se dirigea vers la chaîne hi-fi. Il remit la chanson au début et en monta le son, qu’il remit au même niveau que lorsqu’il était entré. Puis il partit vers la batterie, derrière laquelle il s’installa avant d’attraper une paire de baguette sur l’étagère d’à côté. Avant de commencer, il s’adressa à l’inconnue. « Comme ça, on est tous les deux contents. Tu peux continuer d’écrire ce que tu étais en train d’écrire ; et moi je peux m’éclater sur ce morceau » Puis il se détourna d’elle, se plongeant entièrement dans la musique.

Alors que son corps se tendait, à l’affut de la moindre note, il oublia la présence d’une autre personne dans la pièce. Il n’y avait plus que lui et la musique, dans un tango passionné. Il sentait les sons lui pénétrer la chair, lui piquer les nerfs et lui tordre l’estomac. Il était devenu la musique, et rien d’autre n’importait. Sa batterie se collait aux percussions de la musique, en imitant les moindres mouvements, les moindres changements. C’était une course effrénée, mais les coups de Neal ne se laissaient pas distancier, ils collaient ceux que la chaîne hi-fi laissaient s’échapper. Puis la musique s’arrêta, et Neal reprit conscience. Il sourit tout seul, comme à chaque fois qu’il jouait, toujours surpris de savoir faire quelque chose avec deux morceau de bois et de la peau tendue. Il se releva , se passa une main derrière la nuque et souleva légèrement ses dreads. Il avait chaud. Il remonta les manches de sa veste, laissant apparaître un nombre surprenant de bracelets en tissu. « Je suis Neal, au fait » dit-il soudainement, désireux de capter l’attention de la demoiselle. Il ne savait pas pourquoi, mais il avait envie qu’elle s’intéresse à lui, même un peu. « Et toi, pourquoi tu te planques ici ? »
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MessageSujet: Re: White Rabbit |Neal|   White Rabbit |Neal| EmptyVen 15 Mar 2013 - 2:00

    Le miroir de ton âme.

    S'infiltre dans ton esprit comme le pire des poisons. Lorsque tu regardes au travers, tu ne vois que le mensonge et pourtant, il est là. Bien présent. Ce reflet que tu te forces à oublier, ce passé que tu as enfermé dans une coquille, ce monde qui t'appartient, à toi et à toi seule. N'abandonne pas. Ne fuis pas. Observe un instant ce qui te fait face, et apprends à lui dire. Que ce n'est plus toi. Que cette époque est révolue. Qu'au regard de ton silence, est née une nouvelle forme de pensée, un nouveau monde, une nouvelle fille, entière, présente, douce et belle. Aujourd'hui, tu peux le regarder sans crainte, parce que des gens sont là, t'aiment, te soutiennent et t'attirent comme un aimant qui te fat face, monstrueusement, impunément, terriblement accrochée à ta vie comme autant de choses qui t'empêchent de marcher. Reste. S'il te plait. Et regarde. Assume. Car au delà de tout cela, il y a toi. Toi qui ne sais pas, qui ne comprend pas. Dans ce moment de silence, qu'y a-t-il de plus qu'une étreinte brisée ? Qu'un pion, que l'on arracherait si violemment aux mains d'autres, qui ne sont plus que ténèbres ?



    Cette fille qui rit, elle n'existe pas.

    Désolée, je ne voulais pas te faire peur. Je ne savais pas que quelqu'un pouvait venir à une heure pareille.

    Elle prit le temps de l'observer. Encore. Un court instant. Quel passage curieux dans la vie de Perle. Elle révèle la vérité. Mais fait comme si rien ne s'était passé.

    Joue.
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MessageSujet: Re: White Rabbit |Neal|   White Rabbit |Neal| EmptyMar 12 Mar 2013 - 21:58

♦ Le silence de la pièce était presque total. On n’entendait que l’horloge murale, son incessant égrenage des secondes ; et la respiration lourde et traînante du surveillant. S’il n’y avait eu bureaux et chaises, Neal se serait cru dans un hôpital dévasté.
Par les fenêtres closes, le soleil tapait et se réfléchissait sur les murs blancs maculés de tâches et de traces en tous genres. Le regard de l’adolescent était fixé sur le plafond jauni par le temps, ses yeux passant d’une fissure à une autre, en imprimant les contours dans ses rétines.

Il était assis là depuis près d’une heure, le bois de la chaise endolorissant son dos. Il tentait vainement de se placer confortablement, s’attirant les regards courroucés des autres élèves. Le bois craquait et grinçait sous son poids. Neal n’était pas fait pour rester en place, ce n’était pas dans sa nature. Il fallait qu’il bouge, c’en était devenu presque vital. Il s’étira, se balança en arrière sur sa chaise, dont le dossier grinça bruyamment. Machinalement, il tapota du bout des doigts un rythme improvisé, transformant le bureau d’étudiant en instrument de musique.

Le jeune homme se demanda vaguement si ça avait valu le coup. Quitter le lycée pour aller camper, une semaine entière. Les conséquences ne s’étaient pas fait attendre. Il était bloqué dans cette salle d’étude, collé, en compagnie d’une dizaine d’autres élèves. Tous les soirs. Pour les deux prochaines semaines. Un temps perdu pour s’exercer, améliorer sa guitare et son chant, ou pour marcher pieds nus dans l’herbe du parc. Il adorait ça. Il aimait par-dessus tout fouler le sol pieds nus, sentir la matière contre sa peau, ressentir la moindre aspérité, la plus petite bosse… Il ne se sentait jamais aussi libre, aussi proche de la nature que dans ces moments-là. Il avait été élevé de cette façon, et mourrait ainsi. Pieds nus. Libre.

Le toussotement du surveillant le fit redescendre sur Terre. Neal braqua son regard sur le petit homme chauve. « M. Cochran. Il me semble que c’est votre comportement… distrait qui vous amène ici. Ne m’obligez pas à prolonger votre punition jusqu’à la fin du mois. Reprenez-vous, et concentrez-vous sur votre devoir ». Neal posa les yeux sur sa feuille, blanche à l’exception du sujet. Il sourit, écrivit quelques mots et s’adressa au surveillant. « J’ai fini. J’peux partir ? ». L’autre ne prit pas la peine de lever les yeux vers le lycéen, se contentant de marmonner dans sa barbe naissante. « Non. Vous devez rester deux heures ici. ». « J’peux aller aux toilettes alors ? ». L’homme soupira, puis abandonna le combat. Cet élève était bien trop exaspérant. « Oui. Je veux que vous soyez de retour dans cinq minutes. Pas une de plus » Neal acquiesça et quitta la pièce aussi rapidement qu’il le put

Une fois dans le couloir, il tourna à gauche, prenant la direction opposée aux sanitaires. Il n’avait pas l’intention de remettre les pieds dans cette salle aujourd’hui, et peu lui importait que sa punition soit prolongée. Il était un esprit libre, et l’asservissement scolaire ne faisait pas partie de ses hobbies. Il marcha d’un pas vif jusqu’à sa destination, avec l’envie irrépressible de jouer de la batterie. Aux abords de la salle, il entendit des notes filtrer au travers de la porte et des murs fins. Quelqu’un était là, quelqu’un qui écoutait la bande son de la série « Game of Thrones ». L’adolescent sourit. Une personne avec d’aussi bons goûts ne pouvait qu’être sympathique. Il ouvrit la porte et pénétra dans la pièce, presque surprit d’y trouver une silhouette féminine, occupée à noircir un cahier. Neal s’approcha doucement d’elle, et s’apprêtait à signaler sa présence d’un toussotement, quand la jeune fille se tourna vers lui. Surprise, elle referma son cahier d’un coup sec et le fit disparaître. Le Nu Zeta n’eut que le temps d’apercevoir une écriture fine, sans pouvoir la déchiffrer. L’inconnue s’était déjà précipité vers la sono et en avait baissé le volume.

Elle lui faisait maintenant face, ses yeux fixés dans les siens, imperturbable. Neal resta figé un long moment, ne pouvant détacher son regard de la jeune fille. Happé par ses yeux, il resta là et ne bougea plus. Puis il se reprit, haussa un sourcil. La situation n’était pas gênante, juste étrange. Surprenante. Il se racla la gorge. « Salut ». Aucun son ne sortit de la bouche de la lycéenne, ses lèvres restèrent scellées. Neal se demanda s’il lui arrivait de parler, ou si elle se contentait toujours de fixer les gens. « J’étais venu jouer de la batterie. J’te dérange peut-être ? ». Aucun son. Seule la sono semblait en vie, alors que Neal et sa surprenante inconnue se fixaient mutuellement. L’écolo fit un pas en arrière, sans pour autant détacher son regard de la jeune fille. « J’veux pas être méchant, mais tu m’fais flipper. Vraiment. »

Mais il ne quitta pas la pièce, absorbé par l’aura que dégageait la Reine du Silence.
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MessageSujet: White Rabbit |Neal|   White Rabbit |Neal| EmptyMar 26 Fév 2013 - 17:27

    C'était ce silence qu'elle appréciait. Ce silence profond, respectueux, d'une salle comble, dont le calme n'était troublé que par la voix paisible d'un homme, debout devant le tableau vert, portant à travers la pièce comme le souffle d'une mémoire universelle.

    Oui, les cours d'histoire, Perle adorait ça. Ce silence mélodieux dont les élèves faisaient preuve parfois, cette zèle attendrissante, cette passion dans les yeux de certains au regard de ce que firent leurs ancêtres. Admirative, Perle écoutait. Toujours. Et écrivait, de l'autre main. Car oui, cette jeune métisse était non pas dissipée, mais seulement obsédée par un travail acharné des deux côtés. Des études, d'abord, puis de ses écrits, qu'elle conservait avec cette vénération presque abusive, puisque personne n'avait jamais eu le droit de lire ce qu'elle écrivait. Cette façon bien à elle de garder ce cahier précieusement contre elle résonnait comme une interdiction. Personne ne devait toucher. Ni regarder. Et lire, certainement pas. Dans son esprit, aucune exception n'était possible. Même sa mère, même ses frères, personne n'avait jamais touché à cela, et tous savaient que quiconque essaierait le paierai très cher. Car si la petite métisse n'avait pas les cordes vocales pour hurler, elle savait manier les mots. Voilà sa force. Et sa faiblesse, faiblesse décrite en long, en large, et en travers au miroir de ces lignes qu'elle écrivait avec acharnement. Chaque jour. A chaque cours. Elle ne pouvait s'arrêter. Son stylo était la prolongation de son bras. Et on ne perd pas un morceau de son bras.

    Les cours passèrent, filèrent, aux yeux de Perle comme autant d'heures d'écriture qu'elle passa simultanément en cours, et dans ses rêves. Au demeurant, Perle n'était pas une mauvaise élève, loin de là ; ses notes faisaient sa fierté. Et grâce à son mutisme, elle était dispensée d'oral. Encore une chose qui l'arrangeait beaucoup.

    Finalement, à dix-huit heures, elle décida qu'il était temps de se détendre. Oui, mais comment ? Lâcher son livre ? Lâcher ses cours, ses cahiers, son stylo, pour faire autre chose. Alors, ce fut avec une évidence presque entière qu'elle entra dans la salle insonorisée où beaucoup d'élèves recherchaient la détente, par la musique. Perle ne savait ni chanter, ni jouer d'un instrument, elle ne connaissait rien du solfège. Mais elle savait une chose, c'était qu'il n'y avait personne un Lundi, à dix-huit heures. Alors, elle entra. Ses talons claquèrent au contact du sol de la grande pièce munie d'objets aussi étrangers pour elle qu'un mousquet ; mais peu importe. Une seule chose l'intéressait, ici. Ce n'était pas le piano, ni la batterie, ni les autres instruments, pupitres et objets obsolètes qui trainaient dans le coin. Non, ce qui l'intéressait, c'était ce qui se trouvait au fond de la pièce, cet immense objet noir et brillant. La sono.

    Car oui, même si Perle ne connaissait rien de la musique, cela ne l'empêchait pas d'apprécier, et d'écouter aussi souvent que possible les compositions de grands auteurs de musique de film. Elle éveillait ses sens, ses passions, cet amour qu'elle éprouvait pour tout ce qui pouvait toucher, de près ou de loin, aux instruments s'accordant parfaitement pour ne trouver qu'une harmonie pure. Des images plein la tête. Accordées aux moments de paix pour écrire, encore et encore, comme si sa vie en dépendait. Finalement, elle inséra le CD dans la fente, s'assit à une table, et finit par en revenir à ce qu'elle chérissait sans doute plus que le dernier fond de teint sorti du marché : sa plume.

    Et cette musique, qu'elle chérissait comme un emblème.

    "Il n'y a rien de puissant, rien de merveilleux, rien de passionnant dans la guerre. Pourtant, ils aiment ça. Tous autant qu'ils sont. Tous, ceux qui sont là, volontaires et armés, auprès de ceux d'en face, comme autant de chiens hargneux prêts pour un combat sans merci. La scène ressemble à une arène. Tous, les épées au poing, se tiennent face aux Autres, sans un mot, sans un cri, dans ce silence qui précède la mort et accélère la haine. Engendrée par tous. Crainte de beaucoup. Elle brille dans leurs yeux comme un feu brûlant, dans lequel seules les secondes sont déterminantes. Ils s'observent, se jaugent, animaux qu'ils sont, tous, assoiffés de sang et de tuerie. Mais en face, l'atout, l'enjeu, est plus fort. Leurs convictions font leur bonheur, leur volonté n'a pas d'égale, et la rancoeur, la vengeance, sont devenus les fers de lance de leur rébellion. Ces hommes ne sont armés que de rapières, leur blason est déchiré. Leur honneur est le seul qui les maintient debout. Paysans, esclaves, prisonniers de guerre, torturés, humiliés en place publique, guerriers, forgerons, ils sont tous de la même race, du même monde. Des aborigènes abandonnés aux mains cruelles d'un souverain travesti pour le bien du monde, dont les mains pâles touchent le pommeau de son épée avec une délectation certaine.

    Mais en face, ce n'est pas un homme qui se tient debout, le visage figé par un calme olympien. Ce n'est pas un homme qui observe l'ennemi, les yeux saphir brûlants d'un désir profond de justice. Ce n'est pas un homme, non. C'est Elle. Sa robe d'un bleu azur brille à la lueur du soleil, ses replis virevoltent au rythme du vent qui vient de se lever. Ses cheveux longs, blancs, font comme un cercle lumineux autour de ce visage si jeune, si calme. Elle fermerait presque les yeux. Elle sait qu'elle va gagner. Elle sait que ses hommes ne sont pas là par la contrainte, mais par la force de volonté, par la conviction de faire un monde plus beau, plus juste. Elle sait qu'ils sont là pour délivrer leurs frères, leurs mères, femmes, enfants, même, enfermés au loin dans des camps de travail austères, esclaves d'un roi sans scrupules. Un roi qu'elle a aimé.

    Mais aujourd'hui, tout a changé. Ses pupilles reptiliennes fixent le champ de bataille. Aujourd'hui, elle va rendre la liberté à son peuple. Aujourd'hui, elle écrasera cette armée qui se dresse devant elle pour l'en empêcher. Aujourd'hui, elle cessera d'aimer cet homme aux cheveux longs, dont la peau blanche comme du lait semble briller. Elle lui jette ce regard, une dernière fois. Elle ne veut plus s'en rappeler. Elle veut seulement un avenir meilleur. Et cet avenir, elle le voit dans l'oeil mort de celui qu'elle aime. La guerre n'est pas amusante. Ce n'est que cruauté et dilemne. Mais il faut la faire. Et aujourd'hui, elle est prête.

    Voilà ce que disent ses yeux, lorsque son cri de guerre résonne dans la plaine."


    Bruit de porte qu'on ouvre. Plongée dans cet univers inventé d'elle seule, Perle n'entendit pas immédiatement que quelqu'un venait d'entrer. Quand bien même, elle avait monté le volume à fond, si bien que la musique devait s'entendre dans le couloir. Ce ne fut que lorsqu'elle lâche sa plume que son regard se tourna vers le nouveau venu. Elle eut un sursaut, et ferma violemment son cahier qu'elle rangea dans son sac à une vitesse vertigineuse. Elle se rendit vers la chaîne hi-fi, dont elle baissa le son. Il venait sans doute se plaindre qu'à l'étude, on entendait que cette musique. Elle avait été égoïste. Mais parfois, ce n'était pas plus mal.

    Ne sachant trop que faire, elle fit face à l'inconnu et le fixa de ses yeux noirs. Longtemps. Sans ciller.
    Bonjour aurait été un meilleur salut. Mais elle avait un peu la flemme de sortir son carnet de son sac.

    On verrait pour les salutations plus tard.
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