On ne m'oublie pas facilement ... [PV Analeigh]

Samedi 14 septembre 2013
Onze heures trente sept

J'avais enfin pu faire une nuit complète en Floride ! Eh oui, on ne pouvait pas dire que j'étais très douée pour ça. Le premier soir, avec le décalage horaire, je n'avais pas dormi la nuit, mais plutôt dans la journée. Le deuxième soir, je m'étais couchée à je ne sais pas quelle heure du petit matin, avec Trey; même si je m'étais levée à 15 heures, je n'avais pas réellement dormi de la nuit. Et concernant les autres soirs, soit la chaleur, soit la musique émanant d'une chambre voisine, soit les bruits étranges d'un lit qui cogne contre le mur ou bien des gémissements de plaisir émis par une des filles vivant sous le même toit que moi avaient fait que je ne trouvais jamais le sommeil avant tard la nuit, ou plutôt, tôt le matin. Bref, j'étais vidée de toutes mes forces physiques lorsque hier, à 20 heures, après mes cours, ma douche et mon dîner, je m'étais exilé dans ma triste chambre pour vénérer mon lit tel un Dieu. Plongée entre ses draps chauds et réconfortants, bercée par l'odeur de la lessive de papa, calinée par la douceur de mes tissus, je m'étais finalement endormie quelques minutes seulement après m'être couchée. Et cette nuit là, aucun bruit, aucune voix, n'avaient eu raison de moi.
Ce sont les rayons du soleil qui, chauffant doucement les draps de mon lit et mes joues, avaient fini par me réveiller, ce matin, vers 10 heures. J'avais adoré ce réveil silencieux, ce réveil calme et surtout, solitaire. Je crois que c'était l'une des choses qui me manquaient le plus d'ailleurs, la solitude. L'Alska est une terre sauvage, douée pour ça. Ses larges et parfois inquiétants endroits font peu à beaucoup et il y est très facile de se retrouver seul avec soi-même. Alors qu'ici, il y a toujours quelqu'un. A l'école, dans cette confrérie (qui était ceci dit en passant, une belle arnaque!) et même dans cette ville -cette région-. Je ne me sentais pas réellement à l'aise ici, à Miami. Je n'aimais pas cette fourmilière géante de monsieur tout le monde. Tout le monde se ressemble, pense pareil, à la même vie et moi, je trouve ça totalement dommage et même triste. Ces gens là n'ont rien à raconter qui pourrait m'intéresser, moi et les autres habitants de l'Alska sommes vraiment d'une race supérieure, comme je l'ai toujours pensé. En tout cas, bien plus supérieurs à ces américanos de mes deux.
J'avais fini par m'extirper de ma couette en laine, que mamy m'avait confectionné pour mon départ et, restant dans une semi-obscurité, je me réveillais en douceur. Pas de musique, pas de bruit pour ne pas réveiller mes salopes de colocataires parce que oui, fallait le dire, cette confrérie était certes la seule exclusivement féminine -d'où mon choix pour celle ci- mais NUL PART on ne m'avait dit que c'était un regroupement de toutes les pimbèches du pays et même d'ailleurs ! Des mini-pouf, riches, arrogantes, narcissique et vraiment méchante en plus de ça. Bref, le BON-HEUR pour moi, pauvre petite fille de pêcheur qui vient du pays -abstrait pour eux- qui est l'Alska. (Je suis sûre qu'elles pensent toutes qu'il ne s'agit que d'un glaçon dans un océan de coca cola).

Finalement, après avoir prit le temps de m'habiller, c'est à dire enfiler un jeans et un tee-shirt (mon premier achat américain!) gris tout simple, à 10$ ainsi que des ballerines (première fois de ma vie que j'en porte, 25$ !) je pris mes quelques pièces de monnaie restantes et partis vers le métro pour aller dans le centre ville. J'aimais bien y aller le matin, parce qu'il y avait toujours moins de monde à ce moment là, je trouvais. J'adorais le métro ! J'étais tombée amoureuse de cette invention, je trouvais ça tellement simple, ludique et pratique que je crois que c'est bien quelque chose qui risque de me manquer lorsque je retournerai chez moi. Je descendis à quelques arrêts de l'école, longeant la promenade, face à cet océan qui a l'air si chaud et agréable, comparé à ce que je connais... Je rêvais d'aller m'y baigner d'ailleurs, mais il faudrait pour ça que j'achète un maillot de bain et là, ça risque d'être compliqué. Il me reste environ 30 dollars pour finir le mois et je pense qu'un maillot n'est peut être pas aussi pressant que des clopes pour le mois entier. En parlant de ça, je fini par m'approcher d'une terrasse où des petits déjeuners y étaient apparemment servis et ce, pour pas cher. Enfin... Le prix d'un café était quand même à 8$... Je soupirais. Est-ce que j'avais le droit de m'asseoir même si je ne commandais rien? Au pire, autant essayer et si je dois partir, je partirai. Je m'installais alors et à peine mes fesses collées au fauteuil, un serveur vint me demander ce que je voulais prendre. Bon ok, on était que deux sur cette terrasse mais quand même ! Hallucinant ! Je lui répondis que je ne prenais rien pour le moment et sortis une cigarette de ma poche, la glissant dans les lèvres, je pris mon briquet et tira ma première bouffée de la journée. Fermant les yeux, sentant la chaleur sur ma peau, je pensais : est-ce que papa connait cette sensation?

« T'es à Wynwood High School , non ? Et tu es la nouvelle ? Je m'appelle Bliss , retiens bien mon nom , tu entendra souvent parler de moi . Bref tu as commandé quoi ? »

Une voix m'avait tirée de mes pensées. J'ouvris subitement les yeux et observa la jeune fille assise non loin de moi. Elle était blonde platine, maquillée d'une façon qui certes, la rendait très jolie. Elle était belle et très bien habillée. En fait, je l'avais déjà croisé... Ah mais oui ! C'était l'une des pouf de ma confrérie ! Elle puait l'argent et je n'avais pas encore vu son téléphone brillant d'or et de diamants. Lorsque je le vis, je ne pu m'empêcher de me demander si c'était de vrais diamants, comme ceux que des pauvres gens piochent dans des mines à l'autre bout du monde? Alors c'est pour ce genre de gadgets de merde qu'ils triment des jours entiers dans cette merde? J'trouvais ça tellement dommage de voir tout ça. Alors rien que cette pensée, m'agaçait un brin envers cette fille. Et puis d'où est-ce que je devais me souvenir d'elle. Ce narcissisme exacerbé me rendait folle et me donnait envie de lui sauter dessus, lui arracher les cheveux et lui foutre la tête dans une merde de chien bien dégueulasse pour lui rappeler qu'elle et moi, venons de la même chose. Que ce n'était pas ses diamants qui feraient la différence... enfin, c'est ce que je croyais...
Je répondis donc, d'une voix nonchalante:

« Ouais c'est ça, je m'appelle Analeigh.
J'ai rien commandé, c'est trop cher pour moi, je n'ai pas apporté mes liasses avec moi, c'est con hein? »

Oh oui humour noir et cynisme quand tu m'accompagnes nous vivons une magnifique histoire d'amour!