Terminé | Des cours d'arts ? Non merci [Pv F. Connor Richards]

Je regardai attentivement la jeune femme. Si j’avais su ce qu’il y avait dans la tête de Mahina, je crois que j’aurais encore plus pris de plaisir à lui proposer ces cours particuliers. Mahina m’avoua ensuite qu’elle n’était pas nulle en tout. Elle aimait et se débrouillait en sport. C’était un excellent début. Le sport avait souvent une dimension artistique. Je souriais. J’étais satisfait de la réponse, je saurais me débrouiller avec elle. Enfin, je pense. En l’observant, je remarquai que son comportement était un peu étrange. Quelque chose sonnait faux dans son attitude. Peut-être attendait-elle que je lui propose les cours particuliers? Ou peut-être était-ce juste une impression. Elle me dit qu’elle doutait que cela change quelque chose. Mon sourire ne se décolla pas de mes lèvres et je lui dis :

-Ne crois pas ça, je sais que je peux te faire apprécier l’art et te faire faire quelque chose pendant mon cours.

Mahina reprit son sac et s’apprêta à partir. Je pensais qu’elle s’en aller tout de suite, sans plus de cérémonie. D’ailleurs, j’avais moi aussi commencé à ramasser mes affaires lorsqu’elle me demanda si j’avais autre chose à lui dire. Je levais les yeux vers elle tandis que j’enlevais ma main de ma poche en laissant tomber, à l’intérieur de la poche, mon paquet de cigarettes. J’avais toujours cette réserve, je n’aimais pas que mes élèves sachent que je fumais… Enfin, j’étais sûr que certains m’avait déjà vu fumer.

-En fait, si. J’ai une dernière chose à te dire : on se retrouve Samedi qui vient à 14h devant le lycée, ça te va? Si tu as un empêchement, voilà mon numéro., lui dis-je en lui donnant un morceau de papier où était inscrit mon numéro de portable. Je conclus : Vas-y, tu peux filer. Au revoir.

J’attendais que Mahina soit sortie avant d’en faire de même et de fermer la porte à clé derrière moi. Ma journée était finie. Arrivé dans le parc, j’allumais une cigarette et scrutais mon environnement. Je regardais les lycéens. S’ils savaient pour Nina et moi, seraient-ils effrayés en me voyant? Je me posais tellement de questions. J’avais peur d’être pris pour un pédophile. Je devais partir rapidement, sortir de l’enceinte du lycée sans plus tarder. Je me hâtais, regagnais ma voiture pour rentrer chez moi.

Mahina était un cas beaucoup plus dur que ce que je ne m’étais imaginé. Elle semblait vraiment réfractaire à l’art. Elle était venue à mon cours juste pour faire un test?! Je me demandais ce qui était le pire : Nina qui s’était plantée en prenant mon cours ou Mahina qui venait pour faire un test? J’avoue que ça ne me plaisait pas que Mahina dise que j’en aurais contre les élèves mauvais si je voyais son niveau. Je me connaissais et j’en avais vu des mauvais élèves et, jamais, je n’avais eu quelque chose contre les mauvais élèves. Mahina était tellement sûre d’elle que s’en était presque impudent. Et bien sûr, la demoiselle avait mal pris ma question sur sa présence à mon cours.

-Attends… Qui te dis que tu es nulle? L’art se cache dans tout notre quotidien, tu ne peux pas être nulle en tout! Je suis sûr que si tu me laisse une chance, je peux te faire apprécier l’art…, lui dis-je d’une voix toujours aussi calme et neutre.

Je savais que j’en étais capable. J’avais bien réussi à faire rester Nina à mon cours alors je pouvais bien faire aimer l’art à Mahina. Oui, je savais très bien que si Nina restait à mes cours c’était pour me reluquer pendant toute l’heure et être dans la même pièce que moi mais c’était quand même une réussite. Une autre différence fondamentale existait entre ces deux élèves : Nina essayait de faire quelque chose alors Mahina n’essayait rien et ce n’était pas avec cette attitude qu’on pouvait avancer et s’améliorer. J’étais un mec tenace et je ne m’avouais jamais vaincu. Mon histoire avec Nina le prouvait : je ne la laissais pas tomber même si notre histoire n’était pas le genre d’histoire que l’on devait avoir avec son élève.

Il fallait que j’arrête de faire une analogie entre Mahina et Nina. En réalité, elles n’avaient pas vraiment de points communs. Dès que j’eu arrêté de comparer Mahina et Nina, je me mis à réfléchir à la façon d’intéresser Mahina. Je devrais certainement apprendre à la connaître, à connaître ses goûts et en connaissant ses goûts, je serais plus à même de viser juste et trouver un art qui lui plaise. Je souriais et lui dis :

-Si tu es partante, je peux te donner des cours particuliers. Crois-moi, ce genre de cours ne sera pas comme les autres. Tu n’auras pas grand chose à faire, ça sera plus du bon temps qu’autre chose.

Etrangement, j’espérais qu’elle me dirait oui. Elle semblait être un défi, un magnifique et trépidant défi que je me devais de relever. Ce n’était pas vraiment sympa comme façon de voir une élève mais c’était l’une des façons dont je la voyais.

Dans toute ma courte carrière d’enseignant, il y avait un comportement qui m’énervait par dessus tous : les gens qui n’essayaient pas. Je me fichais bien du résultat qu’il y avait un travail derrière. C’était précisément l’attitude qu’avait Mahina Taymour, une élève fraîchement débarquée à Miami.

La jeune fille était arrivée en retard et avait dis quelques mots d’excuses. Mais c’était le genre d’excuses bâteau. C’était le genre d’excuses qui n’était pas sincère. Pendant toute l’heure, je donnais différents exercices. Quand je passais dans les rangs, les élèves travaillaient tous même s’ils réussissaient plus ou moins bien. Seule Mahina ne faisait rien. Elle me faisait un peu penser à Nina. Je m’étais demandé ce que Nina faisait dans mon cours sauf que Nina, elle, faisait des efforts et essayait sincèrement de faire quelque chose même si c’était nul. Mahina, elle, semblait totalement désintéressée par ma matière. Quand la sonnerie retentit, je demandai à Mahina de restait un peu. Elle vint à mon bureau. Je la fixai des pieds à la tête pour ne pas oublier la jeune femme. Elle me demanda si quelque chose n’allait pas. Elle pensait que c’était à cause de ses excuses. J’eu un sourire en coin tandis que je m’appuyais sur mon bureau.

-Ca n’a rien à voir avec ton retard. Mahina… Pourquoi es-tu dans mon cours? Tu es totalement désintéressée de ma matière. Je n’ai rien contre les élèves qui sont mauvais. En revanche, je n’aime pas beaucoup cette attitude. Tu n’en as rien à faire de l’art mais tu es ici et dans mon cours, tu ne fais rien. J’aimerais que tu y mette un minimum du tien. Tu sais, l’art ce n’est pas uniquement le dessin., lui dis-je sans hésiter.

J’aurais pu lui dire d’autres choses encore. J’aurais pu ajouter que, moi-même, je n’aimais pas particulièrement le dessin, que je préférai la photographie. J’aurais pu lui dire que mon cours n’était qu’un cours optionnel et que, par conséquent, je ne comprenais pas du tout qu’elle vienne s’ennuyer ici. J’aurais pu lui dire que ce n’était pas la première fois qu’une élève mauvaise croisait mon chemin. Je pensais bien sûr à Nina mais Nina était un mauvais exemple, elle était mauvaise mais elle avait une motivation pour venir à mes cours : moi, elle me trouvait charmant et je n’ai toujours pas compris pourquoi. Je ne pouvais vivre une seconde histoire similaire à la relation que j’entretenais avec Nina. En plongeant mon regard dans celui de ma jeune élève, j’enfonçai mes mains dans les poches de mon jeans. Je devais avouer que j’étais un peu nerveux à l’idée que l’un de mes collègues me voient en train de discuter avec Mahina surtout avec l’affaire “Nina” qui me faisait passer pour un pervers aux yeux d’un certain colosse blond. Pour calmer ma nervosité, mes doigts jouaient avec mon briquet que je gardais dans ma poche. Je tentais d’être le plus calme et le plus neutre possible aux yeux de mon élève. En attendant une réponse de la part de la jeune fille, je me demandais pourquoi j’avais décidé d’être professeur. Je n’avais pas fait ce métier pour avoir des élèves inintéressés qui venaient aux cours juste pour passer le temps mais, inévitablement, je tombais sur ce genre d’élèves et c’était parfois décourageant.