Pays soleil de sable et de pierre. [Alexie]

Invité

Les yeux encore teintés de sommeil s’étaient lentement découverts et Emeric pouvait encore y déceler des éclats de paresse. De toute évidence, la jeune Australienne n’avait pas encore saisi l’origine du cri de terreur qui l’avait brusquement tirée de ses songes et son esprit ralenti avait du mal à recoller entre eux les morceaux. Pour lui faciliter la tâche, l’indexe de son congénère désigna avec dégout la créature qui siégeait fièrement sur la jambe nue. La bête. Lentement, les pupilles noisettes suivirent le tracé qui lui était désigné. Instantanément, elles s’écarquillèrent, confrontée à l’horrible vérité. Un hurlement tétanisé déchira le paisible silence et Alexie bondit par réflexe sur ses pieds. Mais bien sûr, à peine se fut-elle redressée que son bikini glissa le long de sa peau, offrant sans pudeur sa poitrine en spectacle. Déconcertée, gênée, surtout, la jeune femme se rua après un temps de stupéfaction sur la robe blanche qu’elle avait abandonnée à ses pieds. Nouvelle discipline, nouveau record du monde. Jamais personne n’avait du enfiler une tenue à pareille vitesse. Une vraie Rho Kappa.

Incendiaire, la foudre de ses iris se planta vivement sur la silhouette élancée de l’Allemand. Réflexe de survie, il entama à moitié écroulé de rire une course destinée à le sauver de la fureur féminine. Elle allait le tuer. Il avait intérêt à courir vite, très vite. Une foulée. Deux foulées. Trois, quatre, cinq. SCROTCH ! Son pied droit s’écrasa sur un coquillage et la carapace tranchante lui lacéra la plante. Saut de surprise. Ses oreilles s’accrochèrent alors dans… un trou ? Dés lors, il ne put l’empêcher. Déséquilibré par la tranchée, il tomba en avant et retomba lourdement sur des pâtées de sable. Maudit soit le crétin qui avait rendue universelle la règle château = douves. Roulant sur le sol, il attrapa maladroitement son pied douloureux, l’expression de son visage étrangement partagée entre un « bordel ça fait mal » et un « haha c’est trop drôle, comment je t’ai baisée ! ». Il était plié et éprouvait de sérieuses difficultés à se reprendre. La fille tenta la discorde, la voix teintée de nervosité. Mais à peine l’insulte eut-elle franchit la barrière de ses lèvres qu’il repartit de plus belle dans son incessant fou-rire.

- Mon dieu t’… t’aurais vu ta tête ! parvint-il à articuler au bout d’un moment. La tête que t’a tirée ! De l’or… ça valait… de l’or !

Roulant sur la gauche, il s’approcha de son interlocutrice et lui fit une tape amicale sur la jambe.

- Allez, sans rancune. C’… AÏE !

Quelque chose venait de heurter son crane. Le massa du bout des doigts, il releva un peu sa tête ombragée par la silhouette… d’un gosse de huit ans tout au plus. Cette saloperie de môme venait de lui balancer un coup de pied.

- T’as cassé mon château de sable !
- Hein ? Ton quoi ?
- T’as cassé mon château de sable, t’es méchant !

… et sans le moindre scrupule, il recommençait !

- M… aïe, mais arête, dégage de là !

Afin d’épargner le peu de neurones qu’il lui restait, le Rho Kappa se redressa, mettant ainsi son crane hors de portée du gamin. Méthodiquement, il frotta les grains qui s’étaient infiltrés dans les plis de ses vêtements et contempla le terrain désolé qui un peu plus tôt s’était surnommé forteresse.

- Hum… c’est… beau… C’est.. c’est de sa faute à elle.

Il désigna la brune, mine innocente. Le petit garçon croisa les bras, boudeur et déterminé à la fois.

- Si vous ne m’aidez pas à tout refaire, je vais le dire à mon grand frère !
- Cool. Et ton grand frère c’est… ?

Instantanément, le doigt boudiné se pointa en direction d’un gros baraqué à l’allure de boxeur.

- Ah.
- Je veux quatre tours. Un beau donjon. Et une graaande cours. Et un pont-levis. Et aussi des murailles.

[Désolée c'est vraiment nul mais j'ai du faire ça entre deux recherches, j'ai un emploi du temps très chargé en ce moment.]

Invité

La plage. Une des seule requête d'Alexie. Un de ses seul plaisir après le sport. En réalité, elle y était fort liée, sable et mer rimaient, comme bien des choses pour la jeune femme, avec exercices, jogging, volley, bref, du sport. Elle avait donc insisté sur la proximité de l'océan, lorsqu'elle avait accepté la proposition de son psy. Car oui, s'éloigner de l'Australie n'avait, naturellement, pas été une idée d'Alexie, ni même de sa mère qui rechignait totalement face à ce départ. Le vieil homme qui la suivait psychologiquement – une obligation qui était liée à sa vie professionnelle – lui avait conseillée de partit terminer ses études à l'étranger, afin de faire des rencontres et d'obtenir, enfin, son diplôme . Ce dernier point ne semblait pas fondamental à la jeune Freeman mais, par contre, sa vie sociale l'inquiétait depuis quelque temps. Etais-ce sur un coup de tête qu'elle avait dit oui ou sur une réflexion bien plus longue mais inconsciente, peut importe, aujourd'hui elle avait sa plage à quelque kilomètres à peine de son université.

Comme souvent, depuis son arrivée à Wynwhood High School, Alexie regrettait amèrement son choix ? Elle savait ce qui l'avait poussé à s'écarter de Sydney et donc de sa mère et de ses entraînements sans fin, mais elle considérait que sa raison était bien maigre face à tout ce qui lui manquait. Pourtant, ce matin, elle sut se dire qu'il était trop tard pour faire demi tour, elle sut se décider à faire des projets pour cette journée autres que repas et gymnastique. S'étendre sur le sable chaud, plonger son corps dans l'eau fraîche, siroter un cocktail quelconque sur une terrasse et regarder avec un certain intérêt les joueurs de l'équipe des Cannonballs. Simplement jouer l'ado normale. Elle avait donc enfilé une robe blanche et légère par dessus un bikini fleuri, elle s'était résignée à lâcher ses cheveux d'un violet très pâle – une erreur de la coiffeuse -, alors qu'elle avait l'habitude de les nouer pour s’entraîner et elle s'était rendue en taxi jusqu'à la plage privée.

Ses écouteurs enfoncés dans les oreilles jouant en boucle « Take a bow » de Muse -qui d'autre pour Alexie?-, elle s'était allongée sur un transat, les mains plongées dans le sable, dans son maillot coloré et, après avoir observé un long moment l'étendue azure face à elle, la jeune femme s'était endormie. A vrai dire, cela n'avait pas été son projet, elle avait simplement voulu fermer les yeux face au soleil qui les lui brûlait mais elle avait ressentit toute la fatigue accumulée depuis son arrivée et s'était donc assoupie, persuadée de la sécurité des lieux.

-Quoi ?

Le cri qui l’avait sortie de son sommeil l'avait plus irritée que préoccupée. S'étirant maladroitement et attrapant en tâtonnant sa paire de lunettes de soleil, elle se remit enfin et observa Emeric qui fixait sa jambe avec effroi. Quelque peu préoccupée, elle jeta un coup d’œil sur ce qu'il fixait et se leva d'un bond tout en secouant son membre.

-Ahh ! C'est quoi ce truc ?

Alexie réalisa alors que son haut de bikini avait glissé, il lui fallut quelque secondes de réflexions avant de réaliser qu'elle n'était pas en plein cauchemar. Elle sauta sur sa robe, l'enfila rapidement et fixa le Rho Kappa avec une rage que peu lui connaissait.

-T'es qu'un gros con tu le sais !?

Les attaches avaient été nettement coupées et qui d'autre que lui aurait put faire cela? Elle n'imaginait même pas une minute qu'il aurait put faire cela pour assouvir un besoin pervers, c'était juste une gaminerie, quel plaisir y trouvait-il? Les poings serrés, elle cherchait veinement de quoi se venger. Elle regrettait soudain de ne pas être professionnelle dans un sport de combat quelconque.

Invité

Un artiste, on pouvait le dire.

Oui. De temps à autre, comme ça, un soir ou un matin, Emeric Kürschner avait la prétention d’orner son blason de la profession d’artiste. C’était une lubie persistante qui parfois le prenait au dépourvu mais sa toile tissée dans un recoin de son cerveau, il lui était impossible de s’en débarrasser. L’arracher, la rompre, la déchirer, c’était entreprise vaine. Née, l’idée, l’œuvre devait être accomplie pour dépasser l’acariâtre rang d’obsession. Alors, bercé par son rire, il pouvait jouir en toute quiétude de l’absolution. En d’autres termes, c’était un moyen comme un autre de prendre son pied. Loin du coup de pinceau de Caravage et du rythme endiablé de Michael Jackson, l’art qu’il avait adopté avait quelque chose de particulier. Un petit plus original qui l’éloignait du dessin, de la sculpture ou du théâtre. Sa spécialité à lui, c’était de taquiner pour mieux se marrer. Il avait commencé tôt. Déjà très jeune, il se faufilait dans des repaires toujours plus saugrenus afin de tendre des embuscades à sa mère. Il planquait les peluches de ses camarades et les clés de ses parents, inventait des scénarios catastrophes qu’il racontait en pleurant à l’école, dans son salon ou dans la rue simplement pour le plaisir d’admirer le stress, l’angoisse, l’effroi et enfin le soulagement partagé entre colère, rire et rancune sur le visage des autres. Et il avait grandi. Et ses idées aussi. Il en était arrivé à brimer les drôles de têtes, bizuter les nouveaux et... et toujours la même rengaine pour ses amis. Oh, ses intentions n’avaient pas une origine foncièrement mauvaise. Toutefois, aveuglé par la finalité le garçon avait la fâcheuse tendance d’oublier les limites. Puis, surtout, sous l’excitation grandissante du piège se refermant, il ne songeait plus aux conséquences. Seulement l’air de rien, ça ne faisait pas rire tout le monde, ce genre de blagues. Voilà comment crescendo ils avaient, Trevor et lui, fait de la fête d’anniversaire de Julia Rhodes un lamentable fiasco. Mais ce souvenir sombre était déjà effacé de sa mémoire. La défaite ne lui avait pas encore coupé les jambes. Loin de là.

À genoux dans le sable, armé d’une paire de ciseaux, l’étudiant préparait déjà une nouvelle course. Les yeux plissés, la bouche pincée dans une expression d’extrême concentration, il était penché au-dessus du corps endormi d'Alexie Freeman, une fille de sa confrérie. Paisiblement allongée sur son transit, elle n’avait pas vu venir le danger et s’était assoupie face à l’océan. L’occasion était rêvée. Délicatement, l’Allemand faisait passer la lame de son arme sous la bretelle de son bikini. Il ferma son poing, refermant ainsi le métal sur le tissu. L’entaille était nette ; la première lanière ne tenait plus. Même traitement pour l’autre côté et pour l’attache centrale. Elle allait très certainement le tuer mais à l’heure actuelle ça ne lui faisait pas peur. Il se releva et attrapa ce qu’il avait jusqu’alors délaissé dans le sable pour le poser sur la jambe nue de sa victime : une écrivisse morte et quelques algues visqueuses. Il recula de quelques pas, pris une profonde inspiration.

Place au spectacle.

- ALEXIE ! Oh mon dieu c’est quoi sur ta jambe ?! hurla-t-il avec effroi.