Toujours cette routine qui se répète [Johnny & Jess']

Les mots défilaient sous mes yeux mais je ne comprenais pas ce que je lisais. Le texte ne voulait pas s'imprimer, après avoir lu trois fois de suite la même phrase sans parvenir à en percer le sens j'ai entendu une voix et je me suis immédiatement tournée vers cette personne. Je ne l'avais jamais vu auparavant, enfin, en réalité je ne faisais plus attention aux personnes qui m'entouraient. Je serais même incapable de dire reconnaître les personnes de ma classe si je ne les ai pas toutes dans la même pièce en même temps.

Je l'avais peut être déjà vu, ou peut être pas. Après tout qu'elle importance? Je devais me concentrer pour répondre à la question qu'il m'avait posé, qu'elle question d'ailleurs? Je l'avais oublié aussi vite qu'il l'avait prononcé, mais il avait au moins réussi à avoir mon attention.

" Excuse moi, tu pourrais répéter s'il te plait? "

Je me sentais mal, je n'aimais pas demander aux gens de répéter, surtout que j'avais une petite idée de sa question mais dans ma crainte de répondre à côté je n'ai rien dit de plus ou de moins d'ailleurs. Ramenant à nouveau mes genoux contre ma poitrine, j'ai fermé le livre avant de le remettre dans mon sac. Autant profité de sa compagnie plutôt que de lire.

"D'ailleurs, je m'appelle Jessica et toi? "

Je me demandais ce qu'il pouvait bien faire dehors mais pour éviter d'avoir moi même à répondre à cette question, je ne lui ai pas posé. Mon regard bleu se posa sur son visage tandis que je e regardais rapidement avant de détourner les yeux. Être dévisagé n'était pas agréable et je le savais bien c'est pour cela que je n'ai pas continué. Cueillant une pâquerette à côté de moi, je l'ai regardé comme si je contemplais un mort. Chase m'avait surnommé une ou deux fois pâquerette, comme tous les membres de notre confrérie nous avions des surnoms de plante et plus généralement de fleur. J'étais sa pâquerette et lui mon pissenlit, sauf que le pissenlit n'était plus des nôtres maintenant.

Sans que je puisse la retenir, une larme coula sur ma joue. Et voilà, encore une fois je me laissais avoir par mes sentiments, à pleurer devant un inconnu. Bravo Jess franchement tu as atteint des profondeurs jamais atteintes...

Le mois de mars venait de commencer et cette saison me donnait légèrement e cafard. Il n’y avait pas de raison apparentes bien évidemment puisque pour beaucoup mars était le retour du printemps, des beaux jours et du beau temps. Le retour de la vie après le froid hivernal mais pour moi ce n’était pas tout à fait cela. Les vieux souvenirs remontaient à l’approche de cette date fatidique, cette date qui resterait à jamais gravée dans ma mémoire malgré les efforts que je faisais pour tenter de passer à autre chose. Rien à y faire, a vie s’acharnait contre moi, tout autour de moi ne cessait de me le rappeler. Comme si la Terre entière s’acharnait contre moi mais je devais continuer d’avancer la tête haute. Le seul avantage avec e printemps c’était que les saisons de surf allaient reprendre. Les préparatifs pour les compétitions, les entrainements et les fêtes sur la plage.

Toujours enfermée dans ma chambre, je tournais en rond. Naëlie n’avait pas dormi ici cette nuit non plus et à vrai dire cela faisait longtemps que je ne l’avais pas revue. Peut-être faisait-elle comme tout le monde ici, venir, rester un temps puis partir, ne supportant pas l’ambiance qui régnait parfois en ces lieux. Plus de nouvelles de cette petite rousse ne me faisait presque ni chaud ni froid, je n’avais pas vraiment eu le temps de la connaitre et puis entre Prune et elle, mes colocataires n’avaient pas fait long feu en fin de compte. Je devais être un tyran sans m’en rendre compte probablement. Ouvrant les volets, j’aurais presque aimé être aveuglée par les rayons du soleil mais non, rien de plus qu’un ciel couvert et gris pas attirant du tout. Au loin je voyais la plage du lycée mais pas une seule vague. J’ai soupiré avant de chercher des affaires, je n’allais pas rester enfermée ici toute la journée, je devais sortir j’en avais besoin, pour quoi faire ? Je n’en avais aucune idée, mais j’avais besoin de respirer, j’étouffais ici. Prenant un livre que je devais lire pour le cours de littérature ainsi qu’un cahier et des crayons, j’ai balancé le tout dans mon sac, avant d’enfiler une paire de bottines à talons bleu nuit. Tirant légèrement sur ma robe grise en angora pour la rendre légèrement plus longue j’ai soupiré avant de détacher mes cheveux. Pour être comme tout le monde je devais porter des vêtements très… qui n’entraient pas dans mon style vestimentaire habituel dirons-nous. Décoiffant légèrement ma chevelure blonde qui avait pris les plis de l’élastique j’ai attrapé une petite veste noire avant de sortir de ma chambre.

Comme chaque matin, je n’avais pas pris à manger, je ne prenais plus de petit déjeuner depuis plusieurs mois à présent et les effets se faisaient ressentir en fin de matinée, mais bon j’avais encore du temps devant moi. En sortant de l’internat j’ai reçu un message que je me suis empressée de lire, reconnaissant a sonnerie entre milles.

« 3 mars 2012 10:08
Etat stable.
Pas d’amélioration, attendons ta visite avec impatience. »

Mon ventre se noua et je ne pensais à rien d’autre qu’à mon passé. Avançant dans le parc désert pour ce samedi matin je me suis retrouvée au bord d’une marre, sans perdre plus de temps j’ai déposé ma veste au sol encore humide à cause de la rosée avant de me recroqueviller sur moi-même, luttant contre les larmes.

Les minutes passèrent avant que je ne relève enfin la tête et attrape ce foutu livre de Shakespeare que je devais lire. Roméo et Juliette, ce classique que nous devions lire pour notre culture générale, le seul que je n’avais jamais lu pour des raisons personnelles mais je n’avais plus le choix à présent. Malgré les actes du passé je devais aller de l’avant mais même si je ne cessais de me le dire, je n’y parvenais pas. Ma foutue faiblesse me dévorait de l’intérieur et finirait par me vaincre à ce rythme-là bien avant la fin de l’année.