[TERMINÉ] La petite famille au complet. [Isy]

Un poney. J'en avais la poitrine qui gonflait tellement j'étais fier de lui. Et c'est dans des moments comme celui-ci que je me disais qu'Isy ne m'avait pas arnaquée sur la marchandise. Enfin, façon de parler. Wyatt tenait bel et bien de moi. Je le regardai en souriant, déjà en train d'échafauder des plans pour lui en offrir un, qui resterait à la ferme et qui lui appartiendrait. Il pourrait aller le voir quand il en avait envie, le monter autant de fois que ça lui plairait, s'en occuper et... Oups, j'suis peut-être un peu trop enthousiaste, là. Est-ce qu'on peut offrir un poney à un gamin de 4 ans ? Mon père m'aurait dit que oui, l'évolution logique de la situation était le jet à 7 ans. Ouais, bon... On va y réfléchir, hein. Il fallait que j'en parle avec Isy, de toute façon. Je ne voulais pas offrir un truc trop énorme à Wyatt si elle n'était pas d'accord.

▬ Un poney. Le pouvoir de la ferme agit trop sur ton esprit mon petit ! Je ne sais pas comment on va le ranger dans la chambre, le poney...

Je lui fis un clin d'oeil, malicieux. J'avais bien compris que sa répartie concernant le pouvoir de la ferme m'était un tout petit peu adressée, et ça me faisait rire. J'aimais bien l'idée, en plus. Mon fils deviendrait peut-être un vrai petit fermier, comme moi. Cette idée m'enchantait, même si j'avais l'impression que je ne pouvais pas souhaiter ça à notre gamin, mais plutôt une brillante carrière d'avocat, de médecin ou de... J'sais pas moi... Président ? Sauf que bon, c'était pas trop mon style. Alors je préférais me dire qu'il ferait ce qu'il voudrait de sa vie et que quoi qu'il arrive, je le soutiendrais toujours.

▬ Ça serait bien qu'on fasse ça avec ta maman et la mienne Chase... Enfin, ça serait plus convivial je pense ! Et ça fera de bons souvenirs à prendre en photo pour la décoration de la chambre ! Parce que oui, j'adore mettre des photos partout !

Je souris, tout en terminant ma glace d'une bouchée.

▬ Ouais, tu as raison ! Puis on les présentera, comme ça. J'suis sûr qu'elles vont s'entendre. Et je pense que ça plaira à Wyatt, d'avoir sa mamy et tata réunies.

Oui, parce que Wyatt appelait ma mère "tata", c'était plutôt mignon.

▬ J'téléphonerai à ma mère pour voir si on peut organiser ça à la ferme...

Nous passâmes ensuite la fin de l'après-midi ensemble, à discuter, jouer sur la plaine de jeux, faire la course, rire à gorge déployée... Plein de trucs chouettes, qu'on fait en famille, et qui nous rappellent à quel point la vie est merveilleuse, simple mais tellement agréable.

Ce qu'Isobel pu lire sur le visage de Chase la toucha. Comme elle s'y attendait. Ce n'était simplement qu'un bonheur s'exprimant par un sourire. Il se baissa pour être à la hauteur du petit bout. Ils étaient mignon comme ça. Isy les regardait, tendrement. Wyatt avait déjà dépasser la moitié de la taille qu'il ferait normalement à l'âge adulte. Un bon mètre quatre-vingt ? Plus grand que maman... Elle l'imaginait déjà. Il aurait les parents les plus classes aux réunions parents-profs. Beaux et intelligents. Des parents séparés, certes, mais qui ne finiraient jamais d'être fiers de lui. Et il ne manquait plus que ces futurs copains adolescent drague la jeune maman. Chose qui devait être courante mais qui était juste un supplice à imaginer pour la demoiselle. Son fils ado... On a le temps d'y repenser, hein !
Le fermier accepta de venir à l'anniversaire. Ils pourraient le fêter tous ensemble à l'appartement de Katherine Wilson... Ou alors à la ferme. Avec leurs mères et les animaux... Grand rêve du petit. Wyatt semblait content de la réponse. Quoi ? Il s'attendait à un "non je t'aime pas toi !" peut-être ? Impossible. Désolée de te l'apprendre, Chase allait tout faire pour t'avoir à ses côtés, Wyatt. Tu ferais mieux de t'y habituer...

Ils marchèrent tous les trois. Le petit sautait, entraîné par l'élan de ces parents. Des vrais gamins. Si on ne les remarquait pas, ils se faisaient remarqué ! Le trajet se passa donc remarquablement bien. Leurs rires étaient tellement bénéfiques. C'était comme un baume réparateur que l'on appliquait sur le cœur d'Isobel. Une pommade qui réparait toutes les blessures passées. Toutes les douleurs causées s'effaçaient, pour laisser place à un futur sans problème. Un futur lisse. Sans peine.
La famille arriva au marchand de glace. Ils commandèrent et allèrent s'asseoir sur un petit banc tout près.

« Alors, dis moi bonhomme, qu'est-ce qui te ferait plaisir, pour ton anniversaire ? »

Bonne question ! Isobel ne l'avait toujours pas posée. Un ballon de foot ? Une voiture électrique ? Une hausse de 40% à la bourse ? Un petit frère ? Une villa sur le bord de mer ? Une piscine ? Un camion géant ? Un papa ? Un costume de superman ?...

« Unp' oounnet ! »

Le traducteur officielle d'Isy se mis alors en marche pour traduire :

« Un poney. Le pouvoir de la ferme agit trop sur ton esprit mon petit ! »

Cette phrase n'était pas directement dédiée à la petite tête blonde. Disons que c'était simplement pour dire à Chase : "T'as vu comme tu agis sur ses envies déjà ! Une journée à la ferme et il veut un poney ! Deux jours dans la même chambre... Rien ne va plus !"

« Je ne sais pas comment on va le ranger dans la chambre, le poney... »

Au pire il y avait toujours d'autres alternatives : la peluche, le cheval à bascule, le dodo de papa qui cri "huuuu" ou encore une nouvelle après-midi à la ferme. Ou bien une combinaison de tout ça.

« Ça serait bien qu'on fasse ça avec ta maman et la mienne Chase... Enfin, ça serait plus convivial je pense ! Et ça fera de bons souvenirs à prendre en photo pour la décoration de la chambre ! Parce que oui, j'adore mettre des photos partout ! » lui dit-elle avec un grand sourire avec de repartir dans la dégustation de sa glace parfumée à la fraise.

Wyatt ne répondit pas, trop occupé à regarder la photo collée à la porte. Sa mère et moi échangeâmes un regard interrogateur. La jeune femme s'approcha ensuite de lui et posa une main sur son épaule. Le gamin sursauta, tout surpris et Isy lui demanda ce qu'il se passait. Il répondit un seul, en bafouillant : "pareil". Je me mordis la lèvre. Il n'avait pas l'air d'avoir envie d'une glace, ça m'ennuyait de l'obliger. Mais apparemment, elle comprenait mieux que moi ce qui préoccupait notre fils. Elle le rassura du mieux qu'elle pu, tandis que je les observais, un peu démuni face à la situation. Isy savait s'y prendre... Moi, par contre, c'était une autre histoire ! Heureusement, on avait toute la vie devant nous pour remédier à mon petit soucis de compréhension !

▬ C'est vrai que vous vous ressemblez tous les deux ! C'est magique ! En tout cas, la photo rend vraiment bien, vous faites de la concurrence au travail de maman. Tu veux une glace ? Fraise ?

Comme rassuré par les paroles de la grande blonde, le petit s'exclama qu'il préférait le chocolat. J'approuvai, de mon coin de la chambre.

▬ Ah oui, chocolat c'est beaucoup mieux !

Voilà, je me sentais mieux aussi, du coup. Nous quittâmes donc tous les trois la pièce, de bonne humeur. Je comptais les emmener chercher une glace sur la jetée, le long de la mer. Là où Elsa m'avait confié son plus grand secret, des mois auparavant. Wyatt marchait entre nous, tout sautillant. Il avait l'air content d'être là. Quant à Isy, elle me paraissait songeuse. Et moi... et bien, je profitais de l'instant présent, tout simplement. Je me sentais bien, entouré de la jolie blonde et de notre fils. En famille. J'aurais voulu que le temps dure éternellement et que cette situation dure toujours.

Le petit bonhomme se tourna soudainement vers moi, très inspiré. Il m'annonça alors que c'était bientôt son anniversaire, et me demandait si je voulais y venir. Un sourire attendri illumina mes traits, et je ne pu m'empêcher de m'arrêter. Je m'abaissai à la hauteur du gamin, haut comme trois pommes, et plongeai mes yeux bleus dans les siens.

▬ Je ne manquerais ça pour rien au Monde, bonhomme !

Nous échangeâmes un sourire complice. Diable, ce qu'il pouvait être intelligent, ce petit ! Pour ça, il ne tenait certainement pas de moi... J'ébouriffai ses cheveux et me redressai, tout en lui tendant la main. Sa mimine potelée s'en empara et il tendit l'autre à Isobel. Ainsi liés, nous reprîmes notre chemin jusqu'au marchand de glace. Wyatt s'amusait à se balancer entre nous, et grands enfants que nous étions, nous rentrions dans son jeu à grands renforts de " Uuuuuun, deuuuuuux, trois ! " tonitruants. Mais toutes les bonnes choses ont une fin ; le marchand de glace se profila devant nous. Heureusement, la glace, c'est aussi chouette que les pirouettes ! Nous commandâmes et nous installâmes ensuite tous les trois sur un banc, non loin de là.

▬ Alors, dis moi bonhomme, qu'est-ce qui te ferait plaisir, pour ton anniversaire ?

Dans ma tête, je priai pour qu'il ne me demande pas un jet privé. Pour mon septième anniversaire, c'est ce que j'avais quémandé à mon père. Je devais être un peu sot, à l'époque. Enfin, ce qui me rassure, c'est qu'il était pire que moi.... Il m'en avait vraiment acheté un ! Ma mère l'avait obligé à le revendre dans la journée... Finalement, tout ce que j'avais eu ce jour-là, c'était un Action Man... Comparé à un jet, imaginez un peu la déception d'un gamin de 7 ans !

Un petit coup d'électricité. Comme un rapel. Une évidence. La photo était sous ses yeux et pourtant il y avait quelque chose qui clochait, qui n'était pas à sa place. Ou peut-être était-ce justement ça. C'était comme il le fallait. Chase. Lui. Chase... C'était bizarre. En fait c'était trop bizarre. Comme une ressemblance frappante. Un quelque chose. Le nez ? Les yeux ? Les cheveux ? Le sourire... On aurait dit les mêmes... En plus vieux. C'tait un vieux lui. Il devait avoir l'âge de sa 'mam... Mais c'était quand même étrange. Disons curieux... Les papas c'est comment ? C'est p't-être son papa après tout. L'papa de Wyatt, c'est Chase ? C'pour ça que sa 'man est si gentille avec lui ? Mais pourquoi ils font pas de bisous ? Les papas et les mamans ils se font des bisous... Eux, ils font pas de bisous... Alors, c'est pas son papa ? Wyatt a pas de papa ! Tout le monde a un papa... Pourquoi il a pas de papa ? Parce qu'en plus Iso parlait d'un autre garçon... Aletyio ? C'est lui s'papa ? Pourquoi il l'a jamais vu ? Et puis pourquoi il vit avec Chase si c'est pas son papa ? Le gens ils vivent avec leurs parents... Et là... Y a sa maman et... Chase.

Le petit ne quitta pas la photo des yeux. Des questions bouillonnaient dans sa tête de petit garçon de presque trois ans. Il avait été assez précoce. Marcher, parler... Tout c'était passé tellement vite. Les premières dents dataient d'il n'y a que très peu de temps, quand on y repense. Et il parlait déjà... Un vrai petit renard. Rusé, malin et curieux... Des qualités qui lui seront toujours très utiles. Il avait tout d'un gamin trop intelligent. Peut-être qu'il le serra toute sa vie. Peut-être qu'il aura ses diplômes plus tôt que tout le monde... Ce qui n'était pas forcément une bonne chose. Mais qui aurait rendu Isobel fière, la plus fière de toute les mères. Quoi que, elles sont toutes comme ça, non ? Elle l'aimait ce petit. Et elle aimait son père. D'une manière différente mais tout aussi profonde. C'était aussi le sang de Chase qui coulait dans les veines de Wyatt. Le sang d'un homme adorable. Quelqu'un de bien. Isy était fière des origines de son fils. C'était certain. Ce qui la poussa à faire confiance à son blond d'ex petit-copain. La mannequin prit les papiers de l'adoption, lança un petit sourire qui se fut plus timide que les autres, et alla les mettre dans un lieu sûr. Personne n'y toucherait avant qu'elle ne le fasse. C'était décidé, Chase deviendrait officiellement le père de son fils. Et quoi ? Ça vous pose un problème ? Car... En fait... Elle s'en contre balançait royalement. Pardonnez le langage. Mais c'était plus fort qu'elle. Aujourd'hui l'anglaise offrait un avenir à son fils. Isy lui permettait d'avoir un père, présent.

« Dites moi, ça vous dit d'aller manger une glace, tous les deux ? »

Le petit était toujours là. La photo l’obsédait. Elle était un peu trop haute, alors par moment il se hissait sur la pointe des pieds, pensant qu'il verrait mieux. Isobel posa une main sur son épaule, le faisant sursauter.

« Qu'est-ce qui se passe mon choux ? »

Bonne question. Wyatt lui aurait bien posé la même. Il plongea ses yeux dans les verts de sa mère. Un regard qu'il avait craint par moment mais où se trouvait toujours le réconfort qu'il cherchait. C'était sa maman. Elle le prenait dans ses bras et le berçait sur le canapé. Elle lui chantait cette chanson avant de s'endormir. Fallait-il qu'il dise ce qu'il lui passait par la tête ? D'ailleurs qu'est-ce qu'il en pensait ? Il ne savait même pas le résultat de cette fouille photographique. C'était tout de même trop complexe pour lui. Il n'arrivait plus à s'exprimer est bafouilla :

« Pa.. pareil ! »

Isobel hocha la tête. Elle ne dit rien d'autre. Comme s'il n'y avait aucune réponse, ni explication rationnelle, spontanée. Non, Wyatt devait faire erreur.
Quand à elle, Isobel se mordit l'intérieur de la joue pour ne pas sourire, ne pas pleurer, ne pas regarder Chase dans un état de stress. Elle se contenta de se montrer sereine sans faire d'erreur. Ce n'était sans doute pas le bon moment pour lui annoncer. Il ne comprendrait pas. Il est encore trop jeune. Chase et Isy serait toujours là pour le lui expliquer plus tard. Ils étaient jeunes après tout ! Wyatt devait grandir, il devait apprendre des choses sur la vie et après il aurait toutes les réponses nécessaires. Rien ne servait d'embrouiller son petit esprit enfantin maintenant.

La blonde lui prit la main en lui disant :

« C'est vrai que vous vous ressemblez tous les deux ! C'est magique ! En tout cas, la photo rend vraiment bien, vous faites de la concurrence au travail de maman. Tu veux une glace ? Fraise ? »

« Chocooolat ! »

La réponse n'étonna nullement l'anglaise. C'était son parfum préféré et elle s'amusait à l'enquiquiner avec la fraise. Car c'était toujours ce qu'elle prenait et il n'était a parement pas fan. C'était vrai que c'est plus marrant de se peinturlurer la figure de marron ! Enfin, bon... C'est ça la vie d'un garçonnet. Dire le contraire de sa maman, répéter tout, entrer dans les pièces au mauvais moment, répéter les insultes de maman devant des grands, s'amuser à tirer sur la nappe, aboyer quand on voit un chien, réclamer des promenades à poney... Un planning passionnant !

Ils sortirent à trois de la chambre et se dirigèrent ensemble vers nulle part. Le fermier semblait savoir où trouver un glacier, ou même simplement des glaces... Donc Isy le suivit sagement. C'était d'un tel bonheur de pouvoir se promener en famille. Chase d'un côté, elle de l'autre et le fruit de leur union. Union rompue... Mais éternelle. Jamais Isobel n'aurait pu lui en vouloir. Surtout vu tout ce qu'il faisait à présent. Il ferait un bon père. Avec trois années de retard... Enfin, presque trois années ! Wyatt sembla penser la même chose :

« Chase, tu v'dras v'nir à mon anniverzaire ? Vais devenir un grand ! »

Isy tourna la tête pour regarder la réaction de Chase. C'était dans pas longtemps. Le 15 novembre. Il venait d'être invité à l'anniversaire de son fils, par son fils. Le premier anniversaire auquel il pourrait assister. C'était sans doute quelque chose d'incroyablement précieux pour lui qui venait se "racheter". Isobel était totalement pour. Elle voulait le bonheur de Wyatt et ça passait par celui du lycéen, alors...

La grande blonde nous observa tous les deux, mains sur les hanches, avant de dire que notre punition serait horrible. Je n'arrivai pas à masquer mon sourire. Elle nous dit ensuite qu'elle allait nous prendre en photo. J'avais peur que Wyatt proteste mais il ne dit rien, toujours dans mes bras. S'approchant de son bureau, elle s'empara de son appareil sous nos yeux attentifs. Isobel prit ensuite la photo après m'avoir consulté du regard. Les deux blondinets que nous étions lui adressèrent un grand sourire pour la photo, qui sortit immédiatement du polaroïd. La jolie blonde secoua alors le petit bout de papier. Elle le regarda ensuite sans nous le montrer, sourire aux lèvres. Intrigué, je me hissai sur la pointe des pieds pour apercevoir quelque chose, en vain.

▬ Voilà qui est fait ! Vous êtes beaux tous les deux... Ce qui me rend plus clémente... Je ne vous enfermerai pas dans la cave ! Mais préparez-vous à avoir le droit à pleins de bisous tout baveux, des compliments et des câlins !

Pour toute réponse, elle obtint un "beurk" dégouté et un éclat de rire. Elle se dirigea ensuite vers la porte et y accrocha la photo. Je m'approchai, le gamin toujours dans les bras. Isy joua un peu les offusquées, ce qui me fit sourire encore plus largement, puis elle se bougea pour nous laisser admirer la photo. J'approchai et collai quasiment mon nez à la photo. C'est fou comme ce gamin pouvait me ressembler, avec sa touffe de cheveux blonds et ses grands yeux bleus. Je fixai la photo un instant en souriant. Tous les jours, en partant, je pourrais la voir. Il n'y avait rien de mieux pour commencer la journée, pas vrai ? Ah, si, bien sûr ! Voir Wyatt et Isy tous les matins ! Et bientôt, le conduire à l'école ! Déjà cette perspective m'enchantait.

▬ Allez hop bonhomme, on descend !, fis-je en le reposant au sol.

Lui resta un moment encore à regardé la photo. Il avait l'air intrigué, c'était plutôt rigolo à observer. Quant à moi, je trainai Isobel à l'intérieur de la chambre et récupérai les papiers d'adoption. Je les lui tendis pour qu'elle les range en lieu sûr et les signe quand elle le voulait. Une fois que ça serait réglé, il ne resterait plus qu'à décider comment on s'arrangeait pour tous les frais, et c'était niquel. Mais bon, on avait peut-être besoin d'un peu plus de calme pour y réfléchir. En attendant, j'avais une meilleure idée.

▬ Dites moi, ça vous dit d'aller manger une glace, tous les deux ?

Une, j'adorais les glaces. Deux, j'avais pas envie de continuer à ranger mes affaires. Trois, je voulais prolonger encore un peu l'ambiance bon enfant qui régnait entre nous. Je me tournai vers Wyatt, souriant. Il était toujours le nez collé à la photo. Je haussai un sourcil, perplexe. Mais qu'est-ce qu'il pouvait bien regarder, comme ça ? J'échangeai un regard interrogateur avec Isy.

Chase était plié en deux par les rires. Il n'en pouvait plus et ce fut encore pire quand la blonde vient à la rescousse de son fils. L'étudiant finit par demander la pitié de ses deux assaillants. Un regard au garçonnet puis à Chase finit par convaincre Isobel de le laisser tranquille, pour cette fois. Wyatt s'arrêta quelques temps après, le sourire aux lèvres, content d'avoir participé à cette attaque.
Mais rapidement la situation bascula à l'avantage du jeune homme. Il attrapa le blondinet et le hissa sur son épaule, la tête à l'envers. Isy se mit à genoux sur le lit, les mains jointes.

« Nooon ! Pitié, ne lui faîtes pas de mal ! »

Les mots ne servirent à rien car Chase mangea cruellement le petit. L'anglaise fit mine de pleurer. Le rire l'envahit rapidement. Ils étaient complètement fous. Tous les trois... La belle s'affaissa sur le lit, les bras appuyés sur son ventre. Puis soudainement quelqu'un frappa contre le mur. Les voisins... Oh ! Ils se plaignaient, pauvres étudiants... Isobel était seule dans la chambre depuis un moment et ils n'étaient pas contents qu'elle s'amuse un petit peu pour une fois. Ce n'est pas comme si elle le faisait tout le temps ! Elle n'apportait même pas de garçons... Elle avait Alecto et c'était une histoire qui prenait son temps... Enfin une histoire passée. Depuis cette soirée à la plage, l'étudiante n'avait aucune nouvelles de son petit-ami. Devrait-elle plutôt dire "ancien". Ça avait été beaucoup plus rapide que prévu. Son cœur se serra. Et dire qu'elle avait pensé qu'il ne serait pas comme tous les autres. Qu'il ne partirait pas au moment où elle lui annoncerait la nouvelle. Quand on aime quelqu'un, on se fiche de son passé. On l'aime avant tout. Qu'il ait des enfants ou non, c'est secondaire. Non ? Ce n'est pas comme si, elle lui avait clairement dit qu'elle voulait qu'ils se marient pour élever son fils... Non. Isobel voulait le revoir. Elle voulait comprendre. Sa tristesse se transforma en amertume. Et ce fut ses voisins qui en payeraient certainement le prix.
Ils allaient voir à qui ils avaient à faire ! En plus de cela qu'avaient-ils fait ? Ils rigolaient un petit peu beaucoup bruyamment... Pas de quoi casser trois pattes à un canard !
Isy préféra prendre cette réaction à la rigolade. En réalité, la blonde ne voulait pas montrer à Chase l'épisode qui venait de se passer dans sa tête. Son rire fut plus discret, plus retenu.
Qui était dans la chambre déjà ? Cette chambre était entourée par la 4 et la 8... Donc c'était soit ce garçon insupportable, soit... De toute façon c'était forcément lui !

« Oups, les voisins sont fâchés ! Tu crois que Maman va nous enfermer dans la cave pour avoir été vilains ? »

Isy se releva interpellée et plaça ses poings sur ses hanches. Ils étaient beaux tous les deux comme ça... Tellement beaux... Elle aurait voulu reprendre une photo pour se souvenir à jamais de cette image. Le père et son fils... Tous les deux réunis, face aux yeux ébaillits de la blonde. Mais il fallait qu'elle enchaîne. Qu'elle dise quelque chose...

« Vous allez avoir une punition hooooooorrible ! Mais avant ça, j'aimerai vous prendre en photo tous les deux. Histoire d'immortaliser notre colocation. »

La mannequin interrogea Chase du regard pour avoir son accord. Ceci fait, elle se leva, prit une nouvelle fois l'appareil, se plaça devant eux et les pris. La photo sortit du polaroid. Isobel la prit entre ses doigts et la bougea pour qu'elle sèche plus rapidement.
Le résultat finit par arriver. Magnifique ! Un sourire s'afficha sur le visage d'Isobel. Mais elle garda la photo pour elle.

« Voilà qui est fait ! Vous êtes beaux tous les deux... Ce qui me rend plus clémente... Je ne vous enfermerai pas dans la cave ! Mais préparez-vous à avoir le droit à pleins de bisous tout baveux, des compliments et des câlins ! »

« Beuuurk ! »

La réaction du petit amusa Isobel. Elle s'approcha de son petit bureau, prit un morceau de patte collante, le plaça au derrière de l'image. L'anglaise s'éloigna de la porte, l'air boudeuse d'avoir reçu en retour, de son amour dégoulinant, une réponse de dégouts. Elle accrocha la photo sur la porte, se retourna en la cachant, ses bras se croisèrent.

« Si c'est comme ça je pars, jeune ingrat ! Ce bon, maintenant je ne suis plus la favorite ! Pff c'est inadmissible. »

Son menton s'éleva vers le plafond mais elle ne pu tenir ainsi longtemps. Elle s'écarta et montra enfin la photo aux deux garçons !

« Tadaaaaa ! »

Il suffit qu'elle les regarde tous les deux pour se réconforter et oublier ses soucis du moment.

Mes mains se tordaient toujours l'une contre l'autre, quand Isy posa la sienne dessus, apaisante. Derechef, j'arrêtai de me torturer. Le regard que nous échangeâmes à cet instant signifiait bien plus que le "Merci" qu'elle prononça. On se comprenait, notre but était le même. Le bonheur de Wyatt, coûte que coûte.

▬ Vraiment. Si j'aurais su ça il y a un an... Jamais je n'y aurais cru. Et tu as bien raison... Je ne te laisserai pas tout payer... Mais tu dois faire partie de sa vie. J'ai vécu sans mon père et je sais ce que c'est... Tu as... Tu vas faire un bon père. Donne-moi ces papiers que je les signe, coloc' !

▬ Merci, Isy...

A mon tour de la remercier. J'étais vraiment touché par ses paroles. En fait, Isy ne pouvait pas me rendre plus heureux qu'en m'accordant sa confiance. Cela ne devait pas être facile pour elle, étant donné que je l'avais déjà trahie de la pire manière qui soit en fuyant Londres... J'appréciais vraiment son geste, et je ne savais comment la remercier, si ce n'est en faisant tout mon possible pour effectivement être un bon père. Il n'était pas trop tard. Isy m'adressa ensuite un petit clin d'oeil. Une larme roula sur sa joue. Je sentais mon coeur tout en pelotte, dans ma poitrine, et j'avais une boule dans la gorge. Ce moment était un des plus importants de ma vie, je le ressentais. Jamais je n'oublierais ce jour où Isy avait accepté de faire de moi le père "officiel" de son fils. Notre fils...

▬ Pour ce qui est de le dire à Wyatt, je pense que c'est à toi de le dire... Enfin, tous les deux. Il ne m'a pas encore posé la question. Mais ça ne tardera sûrement pas, tu sais, avec la maternelle et les nouveaux copains...

Je hochai la tête, doucement. J'étais d'accord avec elle, et content que mon fils puisse lui aussi affirmer à ses copains qu'il avait un papa. Je comprenais bien à quel point ça avait dû être difficile pour Isy, étant petite. A moindre échelle, on se moquait déjà de moi à Londres parce que ma mère vivait à Miami. Les enfants croyaient que je n'avais pas de maman, et à cet âge-là, la méchanceté est cruellement enfantine, presque naïve, mais bel et bien blessante. Heureusement, Wyatt n'aurait jamais à connaître ça.

▬ C'est quand tu veux, Isy... Tu sais mieux que moi quand le moment sera opportun.

Sourire échangé, petite grimace de la part de la jeune fille. Les feuilles valsèrent alors sur le lit, et elle agrippa ma main, avant de tirer. Paniqué, je la regardai sans comprendre. Quoi ? Est-ce qu'elle jugeait que c'était maintenant, le bon moment ? J'avais l'impression que je n'étais pas prêt. Genre, pris au dépourvu. Et puis, je ne pouvais pas lui annoncer ça... comme ça ! Pas coiffé, habillé n'importe comment, tout ça ! Le stress commençait vraiment à monter quand nous nous assîmes de chaque côté du petit blond. Il nous regarda sans comprendre, et Isy lui suggéra de me souhaiter la bienvenue, comme ils savaient si bien le faire. Immédiatement, le gamin sembla emballé... et moi, j'étais plus rassuré. Enfin, ça ne dura que deux secondes ! Parce que tout de suite après, deux mains féroces me matraquèrent de Guili-Guili et j'éclatai de rire en me tordant dans tous les sens pour leur échapper. Isy, elle, se leva et m'abandonna à mon triste sort. Puis, elle fit un truc vraiment traitre : me prendre en photo pendant mon agonie. Et puis, pire... Elle se lança dans la bataille, en renforts. Je hurlai encore plus fort, mort de rire, affalé sur le lit avec le petit à califourchon sur moi. Puis, illumination.

▬ Grâce, grâce ! Je me, hahaha, je me rends !!! Grââââce !

Les chatouilles s'atténuèrent doucement, mon petit jeu de pauvre victime faisait son effet. En plus, avec la larme au coin de l'oeil, c'était parfait ! Larme de rire, évidemment. Non, ce n'était pas du tout parce que j'étais simplement heureux d'être là, de m'y sentir bien et en famille... C'était juste à cause de chatouilles, si si ! Je me redressai sur les coudes, un grand sourire aux lèvres. Puis, d'un coup, j'attrapai le petit par la taille et me relevai, tout en le jetant sur mon épaules, tête en bas.

▬ Vengeaaaaaaance !, braillai-je comme un con. Isy, une rançon ou je mange Wyatt !

Et comme pour bien prouver que je ne plaisantais pas, je commençai à faire semblant de lui manger la jambe, avec plein de bruits exagérés pour l'amuser. Nos éclats de rire volaient à travers la pièce, quand soudain nous fûmes stoppés par des grands bruits en provenance du mur. Un grand silence se fit quand nous comprîmes qu'il s'agissait de nos voisins de chambre qui commençaient à péter des plombs. Un regard échangé avec Isy, et j'éclatai de rire. Une fois le fou rire passé, je re-basculai le gamin dans l'autre sens. Je le gardai dans mes bras, sans le poser par terre, avant de lui faire un clin d'oeil.

▬ Oups, les voisins sont fâchés ! Tu crois que Maman va nous enfermer dans la cave pour avoir été vilains ?

Même si j'essayais de me contrôler, je ne pouvais pas cacher mon amusement. Soudain, je me rendis compte que c'était bel et bien la première fois que je serrais mon fils contre moi. Une envie de pleurer de joie me submergea et je du me mordre la lèvre pour ne pas craquer devant eux. Je croisai le regard d'Isy, tout en espérant qu'elle enchaine.

La réponse de Chase fut d'un réconfort incroyable pour la jeune femme. Il lui expliqua ce qu'elle avait besoin d'entendre. Que ce n'était que pour protéger son fils, pas pour lui voler. Qu'en qu'à de danger, il serait toujours là. Wyatt aurait un papa. Il ne sera jamais dans l'attente de nouvelles, de réponses... Le petit n'aura jamais à ne pas savoir quoi mettre dans la case "métier du père". Jamais, ses copains le pousseront dans la cours de récréation en insultant ses origines.

Isobel était heureuse. Tellement contente de retrouver le Chase qu'elle avait aimé. Ce garçon en plus évolué tout de même... Il prenait des décisions, les assumés, il était sûr de lui, compréhensif...
L'étudiant tenta un sourire à la fin de son récit. Un coup d’œil à ses mains montra à l'anglaise qu'il était anxieux. Ses doigts s'entremêlaient entre eux. La blonde posa sur ses mains en mouvant, la sienne. Sa deuxième vient rapidement les rejoindre. Et elle le serra gentille. Dans un geste tendre qui se voulait positif.

« Merci. »

Le mot était doucement sorti de sa bouche. Sa gorge était toujours serrée. Mais il fallait qu'elle dise autre chose. Qu'elle signe... Il fallait régler ça. Il fallait qu'elle parle.

« Vraiment. Si j'aurais su ça il y a un an... Jamais je n'y aurais cru. Et tu as bien raison... Je ne te laisserai pas tout payer... Mais tu dois faire partie de sa vie. J'ai vécu sans mon père et je sais ce que c'est... Tu as... Tu vas faire un bon père. Donne-moi ces papiers que je les signe, coloc' ! »

Elle lui fit un petit clin d’œil. C'était comme dans un rêve finalement. Une larme glissa à nouveau sur sa joue. Mais cette fois-ci, Isy pouvait assurer que c'était de la joie. Elle aurait désiré que son père fasse le même geste... Qu'il s'implique lui aussi. Car jusque avant ses 18 ans, son père n'avait rien fait pour elle. Et quel geste finalement ! L'obliger de venir à Miami... Ce n'était sans doute pas prémédité mais il avait réussi à changer la vie d'Isobel.

« Pour ce qui est de le dire à Wyatt, je pense que c'est à toi de le dire... Enfin, tous les deux. Il ne m'a pas encore posé la question. Mais ça ne tardera sûrement pas, tu sais, avec la maternelle et les nouveaux copains... »

La mannequin fit une petite grimace pour accompagner ses dires. Elle attrapa l'une des mains de Chase qui était encore entre les siennes. Les feuilles furent posées sur le lit du garçon et elle l'attira vers l'endroit où le petit était assis. La demoiselle invita le garçon à s'asseoir d'un côté et elle alla de l'autre.
Wyatt entre eux, retira les écouteurs.

« Quoi ? »

« On souhaite la bienvenue à Chase, comme on le fait bien chez nous ? »

Un sourire diabolique s'installa sur le visage de la belle. Wyatt compris immédiatement, il retira le baladeur et sauta sur le lycéen en tentant de le chatouiller.
Isobel rigola devant le spectacle, elle se leva, alla chercher un objet dans son armoire... Un appareil photo polaroid. Une fois la photo, qui serait certainement floue, prise ; Isy alla rejoindre son fils pour lui apporter un peu d'aide dans ce combat.

« Vous regretterez d'être tombé sur nous, jeune homme ! Muahah ! »

« Muhah ! »

Je fus un peu pris au dépourvu quand Isy éclata en sanglots. Je ne vais pas dire que je m'attendais à ce qu'elle éclate de rire, mais sa réaction me surpris. J'avais peur qu'elle ne soit triste... Ou je ne sais pas trop quoi. J'avais parfois de mal à me comprendre moi-même, alors les autres, c'était souvent peine perdue ! Wyatt rappliqua alors dans la seconde et lui demanda ce qu'elle avait, en s'accrochant à sa jambe. Il était tellement mignon, avec sa petite joue écrasée sur la cuisse d'Isy, comme ça. La jolie blonde se pencha, l'attrapa et m'invita à faire un câlin collectif. Rassuré, j'entourai les épaules d'Isy de mes bras et posai un bisou sur sa tempe. J'étais bien, là. En famille, même si elle ne répondait pas à la définition "habituelle", c'était bel et bien ce que représentaient Isobel et Wyatt à mes yeux. Bien vite, la jeune maman dû cependant lâcher son fils. C'est que le petit blond commençait à faire son poids ! Elle l'autorisa ensuite à aller écouter de la musique. Il s'éloigna, tout content, vers le baladeur de sa mère. Le casque était trop grand pour lui et lui tombait à moitié sur les épaules, c'était adorable. Isy et moi le regardâmes faire un instant, avant de revenir au problème qui nous occupait précédemment.

▬ Qu'est-ce qu'il va se passer ? Je veux dire... Si je signe, tout changera, pas vrai ?

Je comprenais ses inquiétudes, bien sûr. Mais au fond, qu'est-ce qui changerait ? Je me grattouillai la tête, songeur.

▬ Hm... Oui et non. Ces papiers, c'est uniquement au niveau légal. Donc, si tu signes, je serai "officiellement" le père de Wyatt, aux yeux de la loi. Au final, ça ne change pas grand chose, parce qu'on lui annonce quand tu veux, et seulement si tu veux. Tu restes sa mère, c'est à toi que reviennent les décisions. C'est juste qu'en plus, il aura... un papa. Ce qui changera, en plus de ça, c'est ta situation financière. Tous les frais se feraient à deux et, si un jour on en vient à se haïr, tout ça, 'fin tu vois quoi, ils te garantissent que je continuerai à m'occuper de Wyatt financièrement. Ce n'est pas le plus important à mes yeux, et de toute façon même sans ces papiers j'insiste pour payer la moitié de tous ses frais - puisque ça m'étonnerait que tu me laisses tout payer... Non, le plus important pour moi, c'est que s'il t'arrive un jour quelque chose, Wyatt ne sera pas orphelin. C'est ce qui m'a décidé à me renseigner, pour l'adoption. Je ne veux pas qu'un jour, on me dise que mon fils ira dans une famille d'accueil parce que je ne suis pas légalement son père, ou parce que j'ai un jour refusé de le reconnaître comme étant mon fils alors que j'avais encore de l'acné juvénile sur le visage, tu me suis ?

Je tentai un petit sourire envers Isy. J'espérais qu'elle n'allait pas prendre mal mes propos. Après tout, imaginer qu'il puisse un jour lui arriver quelque chose, ce n'était pas très gentil. Mais je préférais me dire que c'était prévoyant et responsable. Adulte. Je tordais mes doigts les uns dans les autres, attendant qu'elle me réponde, qu'elle me donne son avis à propos des papiers d'adoption...

Le cœur de la blonde accéléra quand Chase lui dit qu'il devait lui montrer quelque chose. Le genre de phrase qui typiquement pouvait mettre la pression. Dans cette situation, il équivalait un "il faut qu'on parle" ou encore "j'ai quelque chose d'important à te dire". Tous les scénarios étaient possibles. Bonne ou mauvaise nouvelle, il cachait quelque chose... Et cette chose était dans son sac. Isobel effaça au mieux qu'elle pu le stress de son visage avant que l'étudiant ne se retourne. Elle se murmurait que ce ne pouvait être grave. Car dans ce cas Chase aurait amené ça autrement et pas dans cette conversation. Oui, vraiment, elle s'inquiétait pour rien. Peut-être était-ce parce qu'elle se doutait que Wyatt faisait partie de l'histoire. Ses sentiments s'emballaient toujours quand on parlait de lui...

Le jeune homme lui tendit des papiers. Des tas de feuilles... Les yeux de la demoiselle passait d'un mot à l'autre, d'un paragraphe à l'autre. Elle ne lisait pas, elle n'arrivait simplement qu'à constater que son intuition était vraie. Wyatt Wilson... Banque... Relevé de compte... Des zéros... Des signatures... Des tampons... Officiel...

« Il faut que tu saches que je suis prêt pour ça. Je te l'ai déjà dit, mais j'ai fait la plus grosse erreur de ma vie en vous abandonnant à Londres, et il est temps pour moi de réparer tout ça. Je suis prêt à assumer, et j'en suis même super heureux, Isy. Wyatt est un gamin génial et je... »

Les larmes montaient. Isobel les sentait. C'était comme si un énorme poing s'était enfoncé dans son ventre. Son gorge était, quand à elle, nouée. Chase ne lui avait pas encore tendu les papiers et pourtant... Pourtant elle se doutait que ça allait être dur de lire ces mots. Trois ans... Trois années à agir seule. A faire des bêtises. Elle baissa son regard sur les feuilles qui étaient dès lors dans ses mains.
Adoption. Ce fut trop fort. Elle éclata en sanglot. Ce n'était pas forcément une tristesse. Non... Des tas de sentiments s'étaient mêlés en elle. Isobel n'aurait su dire pourquoi elle pleurait. C'était venu tout seul. C'était silencieux...
Tout d'abord elle en voulait à Chase. Isy lui reprochait de ne se rendre compte maintenant que leur enfant était un gosse génial. Et même si elle avait passé ce cap, cette haine qui l'avait envahie les années précédentes resurgissait encore plus forte et douloureuse. Une sorte de rouleau compresseur anéantissant tous ses principes et son amour.
En même temps, elle avait peur. La blonde était terrifiée à l'idée de perdre son fils. Et s'il était mieux élevé chez Chase, dans le bonheur et l'argent ? Dans le confort et la tranquillité... Loin de cette mère qui l'a durant un certain temps oublié pour se jeter dans les bras des premiers venus. Cette mère qui n'a jamais réussi à lui offrir une vie simple. Cette mère qui tient trop à lui, au point de tout renoncer pour le voir heureux... Oui, elle craignait tout ça. C'était peut-être fou, ou ne pas connaître Chase. Mais quoi qu'il en soit, personne ne pourrait lui enlevé cette hantise du futur. Cette frayeur de voir un jour, Wyatt lui être retiré. Le voir partir loin d'elle vers quelque chose qu'il aime plus, qu'il envie...
Et alors que ses mains tremblaient et que les larmes coulaient sur ses joues lisses, un sourire se dessina. Le papa était enfin présent. Wyatt ne subirait pas l'absence de son père. Il ne recevrait pas simplement des cartes d'anniversaire. Il allait pouvoir apprendre à jouer au baseball, à respecter la nature, à réparer une voiture... Le fermier était sans doute ce qui pouvait arriver de mieux dans la vie du petit.

Évidement, Wyatt ne mit pas longtemps à rappliquer. Isy n'avait encore rien pu dire, que le garçonnet s'approcha et s'accrocha à la jambe de sa mère en demandant ce qu'il se passait. Isobel s'essuya vaguement le visage et le prit en disant :

« Viens dans mes bras mon loulou... Venez tous les deux ! »

A peine relever elle s'approcha de Chase et écarta son bras encore libre pour l'inviter dans leur câlin. Elle resta ainsi en instant, à respirer lentement pour se calmer. Elle pouvait mettre ses idées au clair sans inquiéter personne.

« Tu sais que t'es quand même lourd, Wyatt ! Je ne vais plus pouvoir te porter comme avant, dit-elle en reposant le petit, tout en lui collant un bise sur le front. Ça ne t'ennuie pas de laisser maman et Chase parler un instant ? Je te laisse même écouter la musique ! Zou ! »

Encore naïf le petit rejoins le lit où se trouvait, posé sur la commode, un baladeur de musique. Il mit le casque, beaucoup trop grand pour lui, sur ses oreilles et tout en le tenant de ses petites mains, il balançait la tête au rythme de la musique douce programmée pour lui.
Après l'avoir regardé un instant, l'anglaise se retourna vers son ami et posa les yeux sur les feuilles qu'il lui avait donné.

« Qu'est-ce qu'il va se passer ? Je veux dire... Si je signe, tout changera, pas vrai ? »

Elle se tournait de temps en temps pour vérifier ce que faisait le gamin puis venait planter son regard dans celui du lycéen. Il était sans doute plus renseigné qu'elle. Et dans ce domaine, elle ne pouvait se permettre de commettre une erreur. De plus, elle ne pouvait pas se payer un avocat pour la renseigner. La seule chose qu'elle pouvait faire était d'avoir confiance en Chase. De croire en lui et en ses intensions... Rien de très compliqué, en soit... Mais le doute surgissait, prenant le demoiselle par surprise. Jamais, Isobel n'avait pensé se retrouver dans cette situation. Peut-être aurait-elle dû réfléchir avant d'agir...

Isy me regarda un instant sans comprendre, faisant l'aller retour entre moi et Wyatt de ses grands yeux perplexes. Ils ne le restèrent pas longtemps, la pièce tomba assez vite. Quand elle comprit de quoi je parlais, ses yeux s'arrondirent comme des billes et elle forma un "non" silencieux sur ses lèvres. Heureusement, le petit blond était occupé à s'amuser dans son coin, il ne faisait pas attention à nous. Derechef, elle m'entraina dans un coin de la pièce, près de lavabo, pour qu'on puisse discuter.

▬ Il va falloir qu'on s'accorde sur ce sujet... Je... J'ai pas réfléchi... Mais ça risque de se reproduire.

Je hochai doucement la tête, le regard fixé sur mon fils. A l'époque où Isy et moi sortions ensemble, elle faisait souvent des gaffes de ce genre. C'était dans sa nature, d'être distraite et insouciante. D'ailleurs, je l'avais très souvent taquinée à ce sujet, à l'époque. Mais là, l'enjeu était tout autre. Il ne s'agissait pas de révéler par accident à une telle greluche que son mec sortait en réalité avec une autre fille. Il s'agissait de Wyatt, de sa famille... L'enjeu était bien plus important, et lui révéler qui était en réalité son père à cause d'un lapsus, pour moi ce n'était pas la meilleure façon. Il était peut-être temps que je montre à mon amie ce que je gardais bien précieusement dans mon sac depuis de longues semaines... Je soupirai, vrillant mon regard au sien.

▬ Isy, il faut que je te montre certaines choses... Je... attends moi là deux secondes.

Je m'éloignai vers mon sac, fouillai à l'intérieur et en sortis une mini farde à rabat dans laquelle je gardais mes documents les plus importants. Je m'en emparai, avant de revenir près d'Isobel. Je m'appuyai contre le lavabo et sortis quelques documents de ma poche. D'abord, des extraits de compte, au nom de Wyatt. Le jour-même où je l'avais rencontré, j'étais allé à la banque et je lui avais ouvert un compte épargne, sur lequel j'avais placé une somme de 10.000 $. Une broutille, en comparaison de ma fortune colossale. Tous les mois s'y rajoutaient automatiquement 100 $, et il en serait ainsi jusqu'à sa majorité. Je tendis les papiers à Isobel, avant de sortir une pochette brune. A l'intérieur, les papiers officiels pour l'adoption de mon fils. Je m'étais renseigné, j'avais effectué toutes les démarches nécessaires pour les obtenir. Il ne nous restait plus à Isy et moi qu'à en parler et, peut-être, à les signer... Avant de les lui tendre, il 'fallait que je lui explique.

▬ Il faut que tu saches que je suis prêt pour ça. Je te l'ai déjà dit, mais j'ai fait la plus grosse erreur de ma vie en vous abandonnant à Londres, et il est temps pour moi de réparer tout ça. Je suis prêt à assumer, et j'en suis même super heureux, Isy. Wyatt est un gamin génial et je...

Merde, connerie d'émotion qui me prenait à la gorge. Je préférai me taire et lui tendre les papiers. Elle comprendrait par elle-même où je voulais en venir...

Chase tira la langue à l'annonce de la blonde. Un gloussement s'échappa involontairement de sa gorge. De vrais enfantillages... Après tout, ils n'étaient encore qu'au lycée et à l'université pour Isobel... Deux adolescents se taquinant sur des choses futiles. Ce n'est rien de bien inquiétant ou même original. C'était tout à fait normal. Sauf que dans la pièce un petit garçon s'agitait dans tous les sens. Un enfant qui n'aurait pas dû être là, si les vies de ces deux adolescents étaient si communes. Isy était tout de même contente de cette vie. Laborieuse certes, mais heureuse.

Quelque chose cependant clocha dans son tableau idyllique. Le comportement de Chase. Ce n'était pas normal. Il ne souriait plus, crispé. La demoiselle se redressa et le regarda plus attentivement. Il la fixait, perplexe. Le garçon ne disait rien et pourtant son regard était clair. Il commença une phrase sans la finir. Son regard passait du petit à l'étudiante. La blonde revint sur les mots qu'elle venait d'employer. Sur la tournure de sa phare... Avait-elle fait quelque chose de mal ? avait-elle fait une allusion sans le savoir ? Son cerveau tenta de revenir en arrière, comme pour trouver la solution à cette situation.Il tient ça de toi... Ses yeux verts s'arrondirent en comprenant. Chase se demandait si Wyatt était au courant. Si Isobel lui avait raconté toute l'histoire. Non, le petit ne le savait pas, c'était trop dur, trop compliqué. Il était trop jeune pour comprendre ce qui s'était passé il y a trois ans. Et ce qui a encore des conséquences... Elle avait simplement fait une énorme boulette... Pour changer !
Isy hocha lentement la tête. Et forma un "non" sur ses lèvres. Elle pivota vers le petit qui semblait occupé. Chase et elle devaient avoir une conversation. Ils devaient mettre les choses au clair.

A vrai dire, Wyatt n'avait jamais posé la question pour savoir qui était son papa. Le petit n'avait jamais vécu avec un homme à la maison. Simplement Isobel et sa mère... Mais avec les premières heures de garderie, les premières journées de maternelle, il se faisait de plus en plus curieux. Wyatt commençait à poser des questions. Et celle sur sa lignée, sur son père, finirait pas tomber.
Jusque là, l'anglaise s'était dit qu'elle serait honnête avec lui, qu'elle lui avouerait que son papa était parti à sa naissance. Pourquoi ? Bonne question... Elle n'aurait pas insisté et aurait ajouté qu'ils étaient très bien tous les deux. En grandissant, le petit blond aurait sans doute posé plus de questions. Peut-être même qu'il aurait fait des recherches... Il y aurait certainement eu une crise dans cette petite famille aux allures modèles. Si le père d'Isobel ne l'avait pas forcée à venir étudier à Miami, cette confrontation ne se serait jamais déroulée.
Mais c'était différent désormais. Ils allaient tous vivre dans la même chambre. Les deux jeunes avaient tous les deux des vies de couples diamétralement opposées. Alors quoi ? Wyatt n'aurait pas une enfance simple lui aussi. A croire que les histoires compliquées sont génétiques ! Entre les parents divorcés et la mère célibataire... Et maintenant des enfants se côtoyant comme des amis ayant eu ensemble un fils... Des amis... Ils n'étaient que des amis... Rien que des amis... Papa rend visite à maman et ils boivent du thé ensemble... Maman a invité papa à son mariage... Papa il aime telle fille et maman tel garçon, pourtant ils vivent dans la même chambre avec moi ! Pourquoi mes parents ils font pas de bisous ?... Isy imaginait certaines scènes. Une boule naissait dans son ventre. Elle ne voulait pas retenter quelque chose qui s'était déjà mal fini. Ou même attendre une possible histoire. Pourtant elle voulait le bonheur de son fils et elle savait que ce manque de simplicité ne facilité rien.

« Il va falloir qu'on s'accorde sur ce sujet... Je... J'ai pas réfléchi... Mais ça risque de se reproduire. »

Isobel avait pris Chase à part, dans le petit coin près du lavabo. Elle ne parlait pas fort pour que le petit n'écoute pas cette conversation. Seulement, elle le connaissait parfaitement. Si une manigance se faisait sans qu'il en fasse parti, il rappliquait à une vitesse folle pour demander des comptes. Il allait falloir que ce sujet soit abordé loin de ses petites oreilles enfantines. Ou bien, qu'ils disent tout, maintenant. Mais était-ce ce que désirait le lycéen ? Était-ce ce qu'elle voulait elle aussi ?

Isy me parla de l'état de santé de sa mère. Apparemment, elle s'en remettrait, même si ma rééducation serait lourde. Elle était en train de m'expliquer que le plus embêtant, c'était qu'elle ne pouvait plus s'occuper de Wyatt, quand celui-ci prit la parole d'un air empressé. Il était tout content de me dire que les poneys, c'était cool, mais que "m'man" avait peur qu'il ne tombe. Je lui souris, avant de m'agenouiller devant lui et de lui ébouriffer les cheveux.

- J'suis sûr que tu deviendras un vrai champion, bonhomme ! Quand tu seras plus grand, je t'apprendrai à faire des sauts d'obstacles et tout et tout ! Tu vas voir, ça sera cool !

Isy nous observait en souriant, je la voyais du coin de l'oeil. Elle rappela alors Wyatt à l'ordre, ce qui me fit sourire. Quelle autorité, dis donc. Pourvu qu'elle ne soit pas comme ça avec son pauvre colocataire ♥

- Viens mettre des chaussons jeune homme ! Et tu te souviens de ce que l'on a dit ? Pas de bêtises ! Il peut-être mignon parfois et un véritable petit diablotin bourré d'énergie la minute d'après ! Je suis sûre qu'il tient ça de toi... Vu les photos que ma mère m'a montrées...

Le petit se précipita vers Isy, avant d'enfiler les dits chaussons. Je tirai la langue à mon amie, souriant. Bah, elle pouvait bien me taquiner, je le méritais. Néanmoins, mon sourire s'effaça rapidement, remplacé par un air interrogateur. "Je suis sûre qu'il tient ça de toi"... Je questionnai Isy du regard. Avait-elle dit à Wyatt qui j'étais, en vrai ? Je n'osais pas poser de question de peur de mettre les pieds dans le plat, mais le fait qu'elle dise ça devant notre fils me laissait perplexe. Est-ce simplement qu'elle n'avait pas fait attention, ou alors Wyatt savait-il à présent que lui aussi, il avait un papa ?

- Isy, tu...?

Je ne poursuivis pas ma phrase. J'avais trop peur de faire une bêtise, de lâcher le morceau. Surtout que si je demandais simplement si elle lui avait dit, Wyatt se poserait des questions. Ce petit était malin comme un singe, il ne fallait pas répéter les choses deux fois pour qu'il les comprenne, ça c'était une évidence. Mon regard alla de la mère à son fils, interrogateur... et un peu stressé. Le fait de ne pas savoir s'il était au courant me perturbait de plus en plus, et je mourrais d'envie de poser la question à Isy. Il ne me restait plus qu'à espérer qu'elle comprenne où je voulais en venir d'un simple regard !

Isy vidait toujours le sac de courses. Un regard vers Chase lui permit de voir sa réaction. Étonné. C'était normal après tout. Qui aurait pu savoir qu'ils se retrouveraient dans la même chambre ? Surtout maintenant que la demoiselle avait fait la demande pour garder le petit... C'était étonnant et tellement génial à la fois. L'étudiant pourrait se rapprocher de son fils en douceur. Devenir un être à part entière dans sa vie. Lui apprendre des choses, lui raconter des histoires, veiller sur son bien-être. En espérant, évidemment, qu'il accepte ces tâches !
Isobel ne se faisait pas trop de soucis à ce sujet. Après tout, le fermier lui avait bien fait comprendre qu'il s'en voulait d'avoir fuit comme un lâche. De toute façon, qui pouvait vouloir partir encore une fois, après avoir vu la bouille de Wyatt ? La blonde se mordilla la lèvre pour empêcher un immense sourire d'apparaître quand elle vit son fils hocher la tête pour approuver.

La réaction de Chase fut rapide. Beaucoup d'exclamations. Serait-ce du bonheur ? La petite famille... Il se retint. Le poids de la réalité s'abattit sur la jeune femme. Ils n'étaient pas une famille. Ils ne l'avaient jamais été et ne le serait certainement jamais. C'était dur. Loin du rêve de toutes les petites filles. Mais l'anglaise ne pouvait pas se plaindre. Elle avait prit la décision d'assumer ce petit bébé. Elle avait prit la décision de l'avoir à 16 ans. Elle avait choisit son prénom, elle l'avait nourrit, vu grandir... Non, ce n'était pas maintenant qu'elle pouvait se lamenter de ne pas connaître la parfaite petite vie de princesse.

Turner lui demanda des nouvelles de sa mère. C'était grâce à lui qu'elle n'avait pas péter un câble en allant à l’hôpital. Parfois elle se demande ce qu'aurait été d'apprendre la nouvelle sans personne à ses côtés. Katherine Wilson avait eu les jambes quasiment brouillées par l'accident. Un camion est toujours plus fort qu'une petite voiture. Ce n'était pas si grave, elle avait simplement besoin d'une rééducation et du repos. Le plus gros problème dans tout ça, était les frais des soins. Isobel n'en avait pas trop parlé avec sa mère mais les factures qui avait dû être signées étaient salées. Bien trop pour le budget de la petit famille Wilson, qui va devoir une fois de plus faire attention.

« Ma mère s'en remettra... Elle a eu un fauteuil puis des béquilles... De la ferraille pour réparer des jambes en morceaux ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus joyeux. Surtout que maintenant, elle ne peut plus s'occuper de Wy... »

Le petit avait tenté de récupérer la parole dès le début, et il ne se gêna pas pour la récupérer au moment où il entendit sa mère finir une phrase. Il s'empressa alors de dire, en sautillant aux pieds de Chase :

« Les poneys c'cool ! 'man avait peur qu'j'tombe ! hihi »

Il rigola vaguement en regardant Isy qui lui faisait un signe pour qu'il se taise. Un sourire permanent envahissait son visage quand elle se trouvait en sa présence. Bien sûr, il faisait des bêtises, des tas de bêtises. Mais comment lui en vouloir ? Il était si mignon avec ses petites mèches blonde en bataille, son regard toujours expressif. Isobel comprenait pourquoi les mères considéraient toujours leurs enfants comme des bébés. Son envie de le garder ainsi était toujours plus grande. Elle voulait revivre les moments, même difficiles. Elle voulait l'embrasser et le chatouiller sans qu'il lui dise : "Nan mais 'mam ! Arrête tu me fous la honte là !"

« Viens mettre des chaussons jeune homme ! Et tu te souviens de ce que l'on a dit ? Pas de bêtises ! après un petit temps Isobel ajouta pour Chase. Il peut-être mignon parfois et un véritable petit diablotin bourré d'énergie la minute d'après ! Je suis sûre qu'il tient ça de toi... Vu les photos que ma mère m'a montrées... »

De la taquinerie ? Nan... Vraiment pas dans les habitudes de l'anglaise. Jamais elle n'aurait osé demander exprès à voir des photos pour pouvoir se moquer par la suite. C'était bien trop diabolique !

Le petit bonhomme accourut vers moi, avant de m'expliquer beaucoup trop rapidement pour que je puisse comprendre quoi que ce soit d'autre... qu'il avait fait les courses. Ah ? Je lui souriais, heureux de le voir. Comment Isy savait-elle où se trouvait ma nouvelle chambre ? J'étais content, cependant, qu'elle vienne me faire une surprise pareille. C'était toujours avec un plaisir non dissimulé que je retrouvais mon fils et sa mère pour quelques activités que ce soit. La jolie blonde entra alors dans la pièce, des paquets dans les mains. Elle alla les poser sur le lit, avant de se diriger vers moi pour me faire la bise.

- Salut, Isy ! ♥ Je suis content de vous voir !

A cet instant très précis, je ne me doutais pas encore qu'il s'agissait en réalité de ma nouvelle colocataire ! Ce que la jeune femme ne tarda pas à m'annoncer...

- Qu'est-ce que tu fais là ? Mmh question idiote ! Enchantée moi c'est Isobel, votre nouvelle colocataire pour... Ne pas vraiment vous servir, j'ai pas mal de boulot sur les bras ! C'est sympa ce que tu as fait de ton côté de la chambre... Le vide commençait à me désespérer ! Sinon tes vacances se sont bien passées ? Avec Wyatt on est allés à la ferme, il était déçu de ne pas t'y voir mais bon les poneys ont compensé ce manque !

Mes yeux s’écarquillèrent de surprise. Un immense sourire éclaira mon visage, tandis que Wyatt approuvait les dures de sa mère en hochant vigoureusement la tête.

- Nooon ? Tu plaisantes ?! Mais c'est génial ! J'hallucine, on est colocataires ! C'est trop fort ! La petite famille réu... hum., me rattrapai-je à temps. Euuuuh oui, mes vacances, super ! J'ai été à Londres, plutôt longtemps. Et comment va ta mère, Isy ? Et toi bonhomme, t'as fait de l'équitation, alors ? Les poneys ont été cool, ils ne t'ont pas donné trop de mal ?!

Même si je le pensais sincèrement, je trouvais pas très délicat de nous qualifier de "petite famille". De une, Wyatt ne savait pas (encore ?) qui j'étais, en réalité. J'espérais que ça ne tarderait pas trop, mais ce n'était pas à moi de choisir ou d'imposer quoi que ce soit. J'étais parti, je devais à présent assumer ce fait. Et de deux... Et bien, Isobel et moi n'étions plus ensemble depuis longtemps. C'est pourquoi j'embrayai rapidement sur d'autres sujets : faire passer ma bévue et faire comme si de rien n'était. Surtout que le sort de la grand-mère de mon fils me tenait à coeur. J'espérais sincèrement qu'elle allait bien, et qu'elle s'était remise pas trop difficilement de son accident. Ce jour-là, je n'avais jamais vu Isy aussi démunie... Je l'avais aidée, conduite à l'hôpital pour voir sa mère... J'avais gardé Wyatt presque tout le temps, avec ma mère, à la ferme, pour qu'Isy puisse rester au chevet de sa mère. Et puis, les choses s'étaient calmés, j'étais parti à Londres et je n'avais pas eu de nouvelles depuis.

Qui dit rentrée des classes dit restructurations. Mon colocataire de l'année passée, Dylan, avait quitté Wynwood. J'en étais très déçu, parce qu'on s'entendait à merveille, lui et moi. Avant lui, j'avais partagé ma chambre avec Hugo. Encore un super pote qui avait quitté l'école prématurément. Et cette année ? Qui aurait la corvée de me supporter ? C'est ce que j'allais découvrir tout de suite !

J'avais emballé toutes mes affaires et je me rendais d'un pas léger au deuxième étage. Déjà un bon point, ça en ferait deux de moins à monter ! Chambre 6. Je toquai - on ne sait jamais... - et n'obtins pas de réponse. Je me décidai alors à pousser la porte, un carton sous le bras. La pièce était en tous points semblable à celle qui m'avait abritée deux ans durant au quatrième, si ce n'est... Si ce n'est une odeur particulière. La fraicheur, peut-être ? Avec Dylan et Hugo, on ne pensait pas spécialement à aérer, à parfumer les lieux, ranger nos chaussettes... Des trucs de mecs, quoi. Quand je vis le couvre-lit du lit déjà occupé, je compris. Cette année, je partagerais ma chambre avec une gonzesse. Outch, méchant, ça. Parce que les gonzesses, c'est synonyme de rangement, de propreté, tout ça... Mauvais. Moi qui aimais laisser trainer mon bordel... Je soupirai, posai mon carton et retournai au quatrième chercher le suivant. Je fis l'allée-retour plusieurs fois, croisant des gens aussi affairés à la tâche que moi - c'est la rentrée pour tout le monde ! Enfin, au bout du cinquième trajet, j'avais ramené toutes mes affaires.

Lit ? Fait ! Posters ? Accrochés ! Livres ? Rangés ! CD's ? Aussi ! J'étais en train de ranger mes vêtements dans ma garde-robe quand j'entendis la clinche grincer. Pas génial, il faudrait que je mette quelques gouttes d'huile dessus. Si ma nouvelle coloc' était une fêtarde, je ne voulais pas être réveillé en plein milieu de la nuit par cet horrible grincement. Et je ne voulais pas la réveiller non plus, ceci dit en passant, parce que je n'étais pas le dernier pour m'amuser. Surtout que cette année, la bande s'était étoffée. Je ne me retournai pas immédiatement, occupé à me débattre avec un cintre. La voix que j'entendis alors me surpris. Toute fluette, mignonne et adorable... Et cette petite voix de gamin zozotant, je ne la connaissais que trop bien !

- Wyatt ?! Qu'est-ce que tu fais là, bonhomme ?