Ah ah ah ah ah ah... [Terminé]

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... Luce est parti. Il n'est plus ici. Le visage creux, crée le lit de ses larmes, et le fleuve de son ressentiment s'écoule. Il est contre mon torse, et san pleurer, je suis inondé de larmes. C'est un pleur gras, sale, qui le libère, même s'il tente de s'y noyer. Accroché a un de mes bras comme un noyé à sa planche, il surnage. Si je n'étais pas si despéré, je serais sans doute surpris. Une telle réaction ne peut être qu'exessive. Quoi ? Je l'ai frappé. Je ne le repousse pas. Pourquoi ? Pourquoi n'ais-je pas saisi Luce, pourquoi ne l'ais-je pas éclaté contre la table sur laquelle errent encore croissants et chocolat, vestiges de ce qui aurait dû être un début. Oui, cela aurait dû être un début, un début de journée, comme on en fait temps, un début de journée... C'est une fin. Sans doute. C'est étrange.
Rien ne me traverse. Il m'aime. Je le deteste. Je veux le tuer. Il faut que je le protège. Samantha. C'est pour toi ? C'est pour moi ? C'est pour lui ? Une pensée, un geste, une idée. Pour qui ? Pour quoi ? Tu ne vas pas te noyer, il n'y a pas d'eau. Juste de l'air, qui brûle. L'air brûle mes yeux qui ne pleurent pas, et ma gorge, qui n'est pas tordue par le moindre sanglot. L'air m'éttouffe.

Depuis combien de temps sommes nous ainsi, debouts au milieu de la cafétéria ? Je ne saurais le dire. Un siècle est passé, je suis vieux. Je suis vieux de douleur, je voudrais crier, mais le seul cri rauque qu'il me reste est celui de l'agonie de mon dernier sentiment. Je l'emprisonne en moi, sans savoir pourquoi. L'exaler serait simple. Si simple. Un coup d'oeil a mon ami me dissuade. Foutu môme. Inutile. Tu es inutile tu comprends ?! Eh, c'est qui qui devrait s'écrouler ? Eh, t'en a pas marre de me piquer la vedette ? Eh, c'est qui le chouchou, chaque fois ? Eh, pourquoi ? Pourquoi Sam est amoureuse de toi ? Eh, et pourquoi t'es assez con pour m'aimer ? Parce que t'es con, tu sais ça ? Eh, et pourquoi je peux pas en finir avec toi, là, tout de suite, maintenant ? Pourquoi...

La lettre est tombée au sol, petite tâche blanche souillée de bleu. Je me penche, Luce toujours cramponnéà moi tel une moule à son rocher. Je la ramasse, délicatement. Du bout des doigts, je tiens le chiffon sale qui a servi à décrasser nos coeurs poussiereux. Pourquoi donc l'as-tu enduit d'acide ? Avec elle, avec Luce, que je me décide à porter vu qu'il est trop éteint pour même marcher, je sors. C'est un silence qui me traverse. Il me traverse, et me porte.

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Je m'écroule. J'ai parlé, j'ai crié, j'ai dépensé toute ma matière, je suis vide, maintenant, de nouveau. On aura beau penser le contraire, je suis aussi gris que le néant qui m'entoure. C'est quand même un comble ; être obligé de devoir s'en remettre à son instinct primitif pour pouvoir aligner deux mots. Alors oui, je pleure, car je suis vide mais plein d'une eau croupie qui déborde par tous mes pores. C'est une eau sale et qui prend sa source profondément dans mon ventre, et qui se déverse au-dehors, inondant tout. C'est une source intarissable, insalubre et puante qui contamine tout, qui n'a pas de fin, et qui efface toute couleur, qui mange avidement toute trace de lumière : finalement, peut-être est-ce moi qui suis gris, et qui ait rendu gris tout le reste. J'ai honte d'être si gris. J'ai honte d'abriter cette eau. Alors je la pleure.

Non, je n'ai plus de corps, il a été inondé. Seul mon néant reste, et encore, plus pour longtemps. Il se remplit, au fur et à mesure, de cette boue noire qu'est mon désespoir. Je ne veux pas. Cette boue noire, a beau être matérielle, elle ne remplit que l'esprit. Cette boue ne remplit qu'en apparence, elle n'est que leurre, elle n'est là que pour cacher mon néant. Alors je ne veux pas de cette boue. Je préfère être vide que rempli de néant.

Non, je ne veux plus. Je ne sais plus qui est là. Eden ? Qui est-il ? Je crois que je le connais. Je crois. C'est le nom de mes larmes. C'est le nom de mon eau, le nom de ma boue, le nom de mon vide. Bonjour, Eden. Enchanté. J'aurais préféré que tu sois, au lieu de mes larmes, de mon eau, de ma boue ou de mon vide, un jardin. Avec un tel nom, comment ne pas être vert, luxuriant, attirant, comment ne pas savoir répandre ses parfums aux quatre vents, comment ne pas charmer le premier passant ? Je ne sais pas. Mais tu y arrives. Parce que tu n'est plus que boue. Et j'ignorais qu'il était possible d'aimer autant la boue.
Tu me prends dans tes bras. C'est une perche que tu me tends. Tu es là, tu m'as fais mal, et je saigne, je saigne de partout, tu vois, je pleure. Mais j'ai envie de croire que tu es là, que tu viens pour me sauver du sol mouvant dans lequel je m'enlise. parce que j'ai peur, je gesticule, parce que je m'enfonce dans les tréfonds du gris, alors tu viens, tu tends tes bras. Alors je m'y accroche. Je m'y accroche comme un demeuré, c'est ma dernière chance de sortir de ce bourbier. Je ne veux plus saigner. Peu m'importe d'être vide, peu m'importe la boue, tant que c'est ton bras auquel je m'accroche.

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Oh. Un la. Ça tourbillonne dans ma tête. Une leur c'est allumée dans son oeil. Il a levé le nez et me fixe avec un air d'incompréhension totale. Je ne dis rien, baisse le bras. Il est revenu, c'est l'essentiel. Même si je lui en veux a le crever, même si ce n'est pas sa faute, même si... Je l’achèverais volontiers. Tant qu'il est par terre. On ne laisse pas souffrir les animaux en fin de vie. On les euthanasie. On devrait faire pareil avec les humains... Je me porte garant. Encore que, la garantie n'irait pas loin. Pas sur qu'en possédant une petite aiguille magique, je ne me l'injecte pas directement. Pas sur...

Oh, un si. C'est le brouillard total ici. Pourtant tout est clair. Moi en haut lui en bas, et pourtant le schéma devrait être inversé. Je meurs debout. Lui se réveille, au sol. J'ai jamais été fan des conventions. Sa lèvre a éclatée. Je m'en veux. Ou non. Je ne sais pas. Je m'en fous. Je le regarde. Lui aussi. Il me regarde. Dans ses yeux passent toutes les émotions. Le mien est plutôt vide, seulement habité par Samantha. Samantha, c'est le nom de ma tristesse. Je n'ai jamais ressenti que ça grâce a elle, et ne ressentirais jamais rien d'autre. Tristesse extrême, qui n'est que souffrance.

Voilà. Luce pleure. Luce est une fille. Je l'ai toujours su quelque part. Luce est une fille. Je ne comprends pas Luce. Je ne comprends pas les filles. Même si j'étais homo ça ne marcherait pas entre nous. Ça resterait une fille. Une petite fille balbutiante. Pourquoi ? Pourquoi ais-je fais ? Mais qu'est le verbe faire, sinon une action ? Une action est elle toujours guidée par une pensée ? Ne peut elle être induite par le corps lui même ? Si c'est le cas, que deviens son pourquoi ? La machine est lancée. Rien ne saurait enrayer le Luce, lancé a plein régime. Il se noie dans les mots. Les mots sont ceux de sa souffrance, chaque phrase le lacère et il continue, tentant d'achever son petit coeur, qui bat trop fort pour lui. Il veut mourir, alors il parle. Je voudrais vivre. Je me tais.

Je l'écoute. Sa souffrance fait échos à la mienne, mais ne la rejoinds pas. Je ne peux pas le rejoindre dans son océan de douleur. J'ai déjà le mien, et je n'ai pas pied. J'attrape ses poignets qui cachent ses yeux et le regarde. Je souris, et mon regard est doux. Parce que j'ai envie de le finir, de le tuer peut être pour de bon, pour que cette histoire ridicule, ces chapitres bizarres de mon existence ou j'ai cru qu’être heureux était possible, a défaut de ne rien ressentir, pour que tout ceci disparaisse sans laisser de trace, pour ça, je lui dit ce que je ne lui aurait pas dit autrement.

-Je préfère te savoir en colère et désespéré que vide. Te frapper me fait plaisir si c'est pour t'entendre gueuler. Ses mieux que tes yeux sans couleur. Tes yeux sont vides depuis longtemps. Mes "morues" ne sont pas si nombreuses que tu penses. Je n'ai pas envie d'elles, ca limite un peu les echanges, pas vrai ? William, ca a l'air de plutôt bien se passer non ?

J'essuie doucement le sang de sa lèvre avec le doigt. Puis je le prends dans mes bras. Parce que je veux le tuer. C'est dur, d'aimer.

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J'ai pas vraiment compris ce qui m'arrivait.
Ca s'est passé très vite, en fait. J'ai vu Eden se décomposer, j'ai vu la lettre, je me suis décomposé, j'ai eu mal, je me suis retrouvé le cul par terre. Merde. Comment je me suis retrouvé collé au sol ? Et puis j'ai mal au menton aussi. Je lève les yeux vers Eden. Il a le visage crispé en un rictus mêlant la douleur et la satisfaction, le poing encore brandi vers l'avant. Bordel de merde ! C'est qu'il m'a frappé fort !
Je me relève, du moins j'essaye. Putain. Je saigne. J'en ai marre, si ça continue je vais commettre un homicide. Je plante mon regard dans les puits sombres qui servent d'yeux à Eden. Je ne sais pas à quoi ressemble ma figure, mais j'espère fortement qu'elle n'a rien d'amical. Je ne sais pas quoi répondre. C'est la rupture d'Armistice entre ma tête et la petite voix au fond de mon ventre :
- Reste calme, parle-lui lentement ! dit l'une,
- Putain, mais rebelle-toi ! Fous-lui un putain de high kick dans sa tronche à ce macho aveugle et narcissique ! dit l'autre.
C'est Hiroshima dans ma tête. Ca fume par tous les trous. J'en ai trop sur les nerfs, je pleure. En plein milieu de la cafétéria, la masse grise que constituent les gens autour de moi se taisent, ils doivent nous prendre pour des fous. Je sens leurs regards posés sur moi. Le silence règne dans la salle, seuls mes sanglots font vibrer la salle.

- Putain, pourquoi t'as fait ça ?

Entre deux larme, je balbutie ça. Ma petite bataille a l'air de trouver un terme : pour une fois dans ma vie, une seule fois, j'ai décidé d'arrêter d'écouter ma tête. De laisser sortir cette petite voix hors de mon ventre.

- Putain, Pourquoi t'as fait ça ?! Ca te fait rire de taper tes potes ?! Ca te faire rire de frapper les gens qui t'aiment ?! Ca y'est, Sam s'est barré, alors tu pètes ta durite ? Evidemment que j'avais remarqué qu'elle t'obsédait ! Tu crois peut-être être très discret quand tu la suis du regard à chaque fois qu'elle bouge, que tu la bouffes des yeux dès qu'elle est à moins de 50 mètres de toi ?! En même temps, elle était gentille, belle, c'était notre amie, tu devais sûrement la trouver bonne. T'es qu'un gros dégueulasse. J'en peux plus de voir ta gueule tous les jours. Tu te rends pas compte que, tous les matins, quand je me lève, que je me dis que je vais voir ton visage, ça me déprime ?! T'es mon meilleur ami, je pourrais pas vivre sans toi. D'ailleurs, sans toi, je vivrais déjà plus. Mais t'es aussi une espèce de gros salaud. Et je suis amoureux de toi, ouais. Je sais pas pourquoi. C'est comme ça, faut croire que la vie envoie des épreuves. Mais toi, en bon macho obsédé que tu es, tu préfères passer du "bon temps" avec tes morues. Putain, c'que tu m’énerves !! J'en peux plus de tout ça, tu comprends ?! J'EN PEUX PLUS !!

J'ai crié, je prends ma tête entre mes mains, je pleure de plus belle, la petite voix est satisfaite, elle a gagné, et moi je m'écrase. J'ai foutu le bronx dans ma tête et autour. Ca va être la merde pour tout ranger.

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Lentement, la réalité réintègre les pores de ma peau. Oui. C'est la première chose que j'ai senti. Une putain de larme salée qui roulait sur ma joue. Le sel. Elle à effleurée ma lèvre supérieure pour y déposer son iode. Je l'essuie rageusement, et cesse de rire. J'ai toujours l'impression de le faire, car le son résonne toujours à mes oreilles. Pas mal de personnes nous regardent, et je sent leurs regards. Habituellement je déteste ce genre de situation. Etre le point de mire de l'assistance ne m'a jamais follement emballé, je préfère qu'on m'ignore. Les affrontements, c'est en comité restreins. En foule, ça m'a jamais tellement branché. Mais là, j'en ai tellement rien à cirer que ça en devient magique...

Luce, tout décomposé, tient la lettre de Samantha. Sûr qu'elle fait son petit effet... C'est comme de boire du vitriol tout en s’enfonçant des bouteilles de coca dans tout les orifices disponibles. douloureux, très dérangeant et suffocant. Ses phrases tournent dans mon esprit, s'y enroulent, m'enserrent. Violée. Partie. Amoureuse de Luce. Amoureuse de Luce bordel !

Je me tourne vers lui, soudain saisi par la colère. Luce amoureux de moi. Mais la blague ! Tu sais ce que c'est l'amour, toi ? Toi qui passe ton temps a aller à droite et a gauche, toi qui n'essaie jamais rien, toi tu sais ? Luce, qui raconte ses vues sur moi a Samantha. Samantha qui ne tiens plus, qui s'en va. Samantha qui l'aime. Oh! Pas de doute ! Je m'en doutais déjà a dire vrai. Ses regards, ses multiples attentions, son attitude vis a vis de lui ne sont pas les choses qu'on ne peut pas remarquer. Surtout pour moi, qui passait des heures à observer la jeune femme. Ironie quand tu nous tiens... J'ai jamais été fana de géométrie, j’entraperçois la raison à l'instant.

Luce n'a jamais été très courageux. Jamais très battant non plus. D'ailleurs, du Luce, il ne reste plus grand chose; mon ami c'est désintégré. AH ! Mais ce serait trop facile ! Une lueur dangereuse s'allume dans mon regard. Comment ça ? Tu voudrais disparaître ? Esquiver la réalité ? Échapper à ça ? Mais si tu crois que je vais tout endurer tout seul, tu te plantes mon grand ! Si tu souffres tant mieux ! Je ne souffre pas. Tu ressentiras pour moi, je te promet que je ne vais pas te faire de cadeau. Amoureux de moi ? Mais tu ne vas pas le rester, parole !

... Oui voilà. Ce qui m'a fait péter les plombs, c'est de le voir à la dérive, abandonnant tout. La lâcheté à un terme. On peut être séché par une nouvelle, séché profondément, triste. Là, il est juste parti. La colère m'a saisit. Mon poing est parti sans que je l'ai vraiment souhaité ou calculé, et maintenant que j'y pense, en fait, je le souhaitait. Ca me démangeait même depuis un certain temps. Mon poing heurte son menton et l'envoie rouler au sol. J'ai mal à la main. Cela me réjouis, je souris.

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Ca sent la journée pourrie à plein nez.
Salle grise, plateau gris, gens gris, bouffe grise, visages gris. Tout est gris autour de moi, et dans moi. Je ne réfléchis pas, je me demande même si je pense. Où je suis ? Tout est gris. Dehors, il fait gris. Des putains de nuages gris. J'ai peur que ma vie devienne grise. Je sais pas si je pourrais vivre une vie grise. J'ai besoin de rouge, et de bleu, et de vert, et de violet. De turquoise et d'orange.
Mais je crois que j'ai encore un petit espoir. Tout est gris, oui, mais il reste une tache de couleur. Une grosse tache difforme, qui prend trop de place dans ma vie grise. Du moins, plus qu'il ne le faudrait. C'est une tache multicolore et rayonnante, une tache que même le plus puissant des Skip oxyaction-deux-en-un-détachant-dégraissant-décapant-superpouvoirogène n'aurait pu effacer de mon panneau gris.
Cette tache avait un nom. Eden.
Il était là, juste devant moi, il lorgnait sur les croissant. Je crois que ce pauvre garçon entretient des liens affectifs fictifs avec les croissants. Faut dire qu'il a pas l'air très en forme, en ce moment.
Je passe au self. Un chocolat chaud pour moi. C'est tout. J'ai envie d'une grenadine, mais pas de ça en vue ici. Tant pis.
La cuisinière m'adresse un regard, me tend une main tenant un objet gris.

- On a laissé ça pour vous.

... Une enveloppe. Enfin je crois, tout est tout gris. Je la retourne.

"Luce et Eden"

C'est l'écriture de Samsam. J'ai des sueurs froides. Un frisson court le long de mon échine : quand Samantha veut parler à quelqu'un, elle le fait en face. Jamais nous n'avions reçu une lettre d'elle. Et l'inconnu de me présage rien de bon.
Eden m'arrache l'enveloppe des mains. Entre ses mains, le manuscrit devient un objet luminescent. Il l'ouvre d'un geste brusque, la lit.
Lentement, je vois le garçon en face de moi se décomposer. Son visage tombe en morceaux, et les débris de sa peau s'amoncellent à ses pieds. Sa coquille de couleur se désintègre, et Eden devient gris.
J'ai peur. Beaucoup.
Je ne parle pas. Je saisis la lettre, la lis.
... Non. Non, non, c'est une mauvaise blague. Samantha, notre Samsam, elle ne peut pas nous avoir fait ça. Et puis... et puis... Elle m'aimait moi. Et moi qui lui avait tout déballé sur mes quelques sentiments. Tu parles d'un ami.
J'ai mal. Je l'ai fait souffrir, elle me rend la pareille. Elle nous rend la pareille.
Et tant de chose qu'elle ne m'avait pas dites. J'ai envie de pleurer.
J'ignore si, dans mon monde gris, je suis une tache de couleur. Je présume que non. Je suis trop vide pour être rouge, bleu, vert, violet, turquoise ou orange. Trop creux, trop gris. Je n'ai pas de coque lumineuse à briser. Aucune seconde peau. Je n'ai rien sous mon enveloppe grise. Et tout comme Eden avait perdu sa couleur, je sens mon gris se démanteler. Le problème, c'est que sous mon gris, je n'ai rien.

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Luce et moi, on se dirige d'un pas alerte vers notre petit déjeuner.
J'entends déjà le croissant qui m'apelle. Il me parle, il me dit : "viens me voir, oublie ta soirée de merde d'hier!"

Soirée de merde me dirais vous ? (Oui, parcer que les croissants, de base, tout le monde sait qu'ils parlent). Et bien oui. Soirée de merde. Mais vous connaissez pas ma vie et c'est tant mieux, j'ai autre chose à foutre que vous la raconter.

C'est un poil tendu, entre Luce et moi, mais dans l'ensemble c'erst bien mieux que ces derniers jours. Bon, j'y suis peut être allé un peu fort mais merde à la fin ! JK'en ai ma claque d'être la bonne poire. Le fouteur de merde du groupe, c'est moi ! Et personne d'autre, nom d'une mamie en string de guerre !

Mais Sam', en voyant nos têtes pas nettes de chihuaha outragés, Sam va tout arranger; Même si en ce moment, pour une raison obscure, elle me hait. Enfin, chaque chose en son temps n'est-ce pas ? Elle déteste voir le paaaaauuuuvre Luce triste, ça doit être son air de bébé, ça lui donne envie de le consoler. POURQUOI DIEU M'A PAS FAIT UN AIR DE BEBE BORDEL ?
... Même si je me fais pipi dessus ça ne marchera pas. J'ai rien d'un bébé somalien déshydraté, et bonjour l'odeur. Sam va m'engueuler sans trop savoir de quoi elle parle vu que moi même je n'en sais rien, et tout va rentrer dans l'ordre !

Ca, c'est ce que, dans ma naïve et affligeante naïveté, ca, dis-je, ce tissu de jolies paroles toutes belles ficellées dans un joli papier entouré d'un noeunoeud rose pétasse, c'est ce que je croyais. Croire. AH ! La blague !

Si t'existe, Dieu des cons, je te fume quand je crève ! T'as compris espèce de pédale ? Je te fume ! Pédale. Ahahahahahaha. Mais merde quoi !
Hein ? Ah vous ne comprenez rien à mes errement ? Mais ça ne change pas beaucoup en même temps, faites pas chier. Parce que là, je suis au bord du meurtre, ou du suicide, j'hésite un peu.

Mais comme j'ai envie de pleurer et que je ris depuis que j'ai fini de lire, j'vais quand même vous faire un topo... Rire tout seul, ça a rien de très drôle, et dans la vie, il faut savoir partager !

Nous allions donc gaiement, et lorsque nous nous sommes servis, la gentille cuisinière nous a tendus une lettre, d'oû l'écriture de Sam était clairement reconnaissable. Pour ceux qui arrivent en cours de route, Sam, c'est pas la femme de ma vie, j'en ai rien à foutre d'elle et je suis absolument pas jaloux quand elle sort avec un autre. Nan monsieur.

Donc, notre curiosité enfantine eveillée (enfin un prétexte pour être proches. Putain si je savais les choses à l'avances.... Enfin), nous avons pris de quoi manger, et la précieuse envellope. J'ai envoyé un p'tit smeuse à la damoiselle, pour lui demander c'que c'était que cette connerie, mais j'ai eu la surprise de recevoir une notification : le numéro ne correspondait plus à rien. Là, j'ai commencé à stresser un peu. pas clairement à paniquer non plus, mon esprit cherchant des réponses rationnelles et surtout rassurantes...

Bon ok, j'ai tout de même arraché l'envellope à Luce et l'ai lue d'une traite. Ok. Mais j'étais pas vraiment paniqué. Maintenant non plus, remarquez. Je suis stone, c'pas pareil.

En gros, elle dit :

Qu'elle quitte le lycée sans prévenir qui que ce soit
Que son père la violait (ca explique pas mal de trucs. Elle a pas précisé s'il était mort ou non. J'vais me renseigner. Je peux l'aider en le poussant un peu, ce bonhomme... Dans la vie, un coup de main ne fais pas de mal).
Qu'elle aime Luce (le bâtard!)
Que Luce est amoureux de moi (je suis plus à ca près hein... L'immonde bâtard!)
Qu'elle supporte plus tout ça... connasse. C'est qui qui supporte vos minables cachoteries ? Sale petite conne.

"Je vous aimerais toujours."

Sam est amoureuse de Luce. Luce est amoureux de moi. Je suis amoureux de ... De personne ! Je ris. Mon petit déjeuné, intact, demeure sur le plateau. Pardon Monsieur croissant, je sais que tu voulais me rencontrer et faire des choses pas nettes avec moi... Mais les relations entre croissants, ou les relations tout court, je pense que je veux faire un break. Je ris sans m'arreter. Parce qu'à part une énorme blague, ça ne peut rien être d'autre, pas vrai ?